Depuis plusieurs années, ONG locales, réserves naturelles, universités et municipalités, avec le soutien de bailleurs de fonds étrangers, ont planté des centaines de milliers d’arbres au Liban. Au total, le ministère de l’Agriculture souhaite reboiser 70 000 hectares, avec 40 millions d’arbres selon un objectif fixé il y a deux ans. Malgré l’amélioration des techniques, ces plantations restent coûteuses : il faut compter en moyenne 10 à 15 dollars par plant. Les graines, collectées dans la nature, germent et grandissent dans des pépinières, pendant une période de six à dix mois. Les jeunes plants s’achètent ensuite entre un et deux dollars, selon les espèces : à partir d’un dollar pour le pin, 1,25 dollar pour le cèdre et jusqu’à 2 dollars pour le genévrier de haute montagne. La Coopérative des producteurs d’arbres natifs du Liban (CNTPL) – qui regroupe neuf pépinières du pays – propose une grille de prix unique. Tous les arbres plantés sont originaires du Liban, afin de ne pas mettre en péril la faune existante, soit près d’une trentaine d’espèces. Ce qui coûte cher, ce n’est pas tant de planter le jeune plant, que d’accompagner son évolution pendant une durée de trois ans, un laps de temps indispensable pour s’assurer de sa viabilité. « Il faut compter le transport vers les sites de reboisement, la mise en place d’un système d’irrigation, un arrosage et une maintenance régulière par des ouvriers, ou encore l’installation de clôtures pour protéger les jeunes arbres des troupeaux de chèvres », explique Raoul Nehmé, président de l’ONG Jouzour Loubnan, qui a planté près de 200 000 arbres depuis 2007. Quand le gardiennage est directement pris en charge par les municipalités, à l’instar des six projets pilotes de reforestation financés par l’Union européenne depuis juillet 2014, les coûts peuvent être moins élevés. « Dans le cas de l’espèce pinus pinea d’une taille de 50 cm de long, le coût moyen unitaire des plants est de 4,5 dollars sans irrigation et de 8,4 dollars avec irrigation », explique Nicolas Ritzenthaler, chargé de programme pour l’environnement et le développement rural à la Délégation européenne. Le coût de plantation varie aussi selon l’altitude, l’aridité. « En haute montagne, comme à Kfardebiane, la plantation est plus onéreuse, car des machines sont nécessaires pour préparer la terre. Cela n’est pas le cas par exemple au sud du Liban, où le travail peut se faire manuellement », soutient Joyce Bejjani, directrice de projet à la Lebanon Reforestation Initiative (LRI), un vaste programme financé par Usaid sous le patronage de l’USFS (US Forest Service) qui a permis de replanter plus de 500 000 arbres depuis 2011.
Le principal défi pour les acteurs du secteur consiste à rationaliser les frais de plantation.
« Les coûts sont encore trop élevés pour mener des campagnes de reforestation à très grande échelle », assure Raoul Nehmé. Jouzour Loubnan travaille sur plusieurs axes pour réduire les coûts : ne pas arroser les plants entraîne certes une hausse du taux de mortalité, mais permet au final de planter davantage d’arbres. Autre piste : planter directement des graines ; des expériences pour certaines espèces comme le chêne et le cèdre ont déjà été réalisées. « Le prix d’un arbre qui aura poussé à partir d’une graine sera inférieur à un dollar, mais pour qu’il ne soit pas mangé par les chèvres, il faut ajouter des clôtures individuelles et débourser 2 à 4 dollars par plant », précise le président de Jouzour Loubnan. À la LRI, on évoque aussi l’importance de la coopération avec les communautés locales. « Il faut réserver des espaces pour le reboisement avec l’aide des municipalités, ce qui évitera d’installer des clôtures, et fournir en échange d’autres terrains aux éleveurs pour leurs pâturages. L’idéal serait d’arriver à planter des arbres aux alentours de six dollars l’unité », affirme Joyce Bejjani.