L’attentat qui a visé le siège de la Blom Bank dans le quartier de Verdun a provoqué des dégâts matériels importants, posant une nouvelle fois la question de l’indemnisation des sinistrés, notamment les propriétaires des voitures garées à proximité. Ces derniers seront-ils indemnisés par leurs assureurs ou par l’État ? Que peut faire le gouvernement pour réduire la facture ? Éléments de réponse avec Randa Aractingi, consultante indépendante en assurances.

Y a-t-il une police d’assurance spécifique pour couvrir les risques d’attentats ?
Oui. Cette police, appelée “Political violence”, est assez courante dans les zones de conflit. Les clients ont la fausse perception qu’elle est trop chère, mais le montant de la prime doit être évalué en fonction du risque potentiel. La Blom Bank avait sans doute souscrit à ce type de couverture, car le taux de sensibilisation dans les grandes entreprises est élevé au Liban. La banque a des agences disséminées sur l’ensemble du territoire et elle a probablement conclu les contrats nécessaires pour se protéger. D’autant que la Blom Bank est l’actionnaire principal d’Arope, l’une des compagnies qui propose ce type de police, notamment pour les voitures. 

Pour les véhicules, une assurance tous risques n’est-elle pas suffisante ?
Dans le jargon des assureurs, la police “tous risques” est en fait une police “tous risques, sauf…”. C’est-à-dire que l’assureur couvre tout ce qui n’est pas exclu spécifiquement dans la liste figurant dans la police. Cela peut aller de l’égratignure jusqu’aux attentats. C’est au client de négocier pour obtenir le moins d’exclusions possibles, souvent en y mettant le prix. Si le risque d’attentats est exclu, le propriétaire peut néanmoins assurer son véhicule, pour moins de deux cents dollars, avec une police distincte de la police obligatoire ou de la police tous risques.
Mais à mon avis, la plupart des sinistrés, dans l’attentat de Verdun ou d’autres, n’étaient pas couverts. Leur dernier recours est la caisse d’indemnisation créée par l’État pour ce genre de drame. Malheureusement, les moyens de l’État libanais sont limités et la multiplication de ce type d’incidents rend le coût des indemnisations exorbitant pour les finances publiques, et donc le citoyen.

Que peut faire l’État pour réduire la facture ?
L’État libanais pourrait rendre obligatoire l’inclusion d’une couverture contre le risque d’attentats dans l’assurance auto obligatoire, sans en fixer le prix. Plus la population assurée est large, plus la prime est réduite, donc avec plus de 1,5 million de voitures immatriculées au Liban, la prime ne dépasserait pas deux dollars par an. Cette somme est abordable pour tous les propriétaires de voiture.

Une libéralisation des prix de l’assurance obligatoire, avec une couverture plus étendue, est-elle dans l’intérêt du consommateur ?
Actuellement, la police auto obligatoire ne couvre que les dommages corporels engendrés par le conducteur. Le prix, fixé par l’État, est élevé. Mais qu’en est-il des dégâts matériels ? Étant donné le nombre d’accidents de la route, nous pouvons raisonnablement penser qu’ils constituent un fardeau pour la société. Le projet d’étendre la portée de l’assurance auto obligatoire pour couvrir tous les risques contre tiers est à l’étude depuis plus de dix ans. Il suffit d’y ajouter les risques de guerre ou d’attentats. Encore une fois, en libérant les prix et en faisant jouer la concurrence, la prime restera raisonnable. C’est la loi du plus grand nombre. D’une part, tous les dégâts engendrés par les automobilistes seraient couverts et, d’autre part, l’État continuerait à percevoir une taxe de 10 % sur chaque police, sans avoir à verser des indemnités en cas de guerre ou d’attentats.