Un article du Dossier

La difficile survie des hôtels libanais

Président du Syndicat des hôteliers du Liban, propriétaire gérant du Printania Palace à Broummana ainsi que du Monroe à Beyrouth.

Quel est votre bilan de l’année 2015 et vos prévisions pour 2016 ?
L’année 2015 a été très mauvaise notamment à cause de l’embargo imposé par les pays du Golfe. Il faut bien comprendre que les ressortissants de ces pays sont les moteurs du tourisme au Liban. Ils ont un pouvoir d’achat inégalé par les autres clients. Ce sont eux qui louent les plus grandes suites, les plus grosses voitures et tout cela en grande quantité. Leur absence est donc la première cause de nos mauvais résultats. Viennent ensuite le reste des pays du monde qui déconseillent aux voyageurs de venir au Liban ou au moins d’éviter le Nord, le Sud et la Békaa… finalement il ne reste pas grand monde.
Selon nos prévisions, 2016 sera la continuité de 2015. Même s’il semble que nous ayons retrouvé la stabilité sécuritaire, la situation politique reste inchangée et les difficultés du Liban seront toujours les mêmes.

Quelles mesures le syndicat prend-il pour faire face à cette situation ?
Après avoir fait le constat que la plupart des touristes évitent le Liban, nous avons identifié et tentons de travailler avec ceux qui continuent de venir, à savoir les Jordaniens, les Égyptiens et les Irakiens. Nous avons par exemple constaté que
70 000 Jordaniens en moyenne viennent chaque année au Liban par avion. Ce chiffre reste inchangé malgré la crise, mais nous avons perdu les 210 000 qui venaient par la route. Pour les encourager à venir, nous sommes en négociation avec des tour-opérateurs en Jordanie pour monter un partenariat entre une dizaine d’agences de voyages et le ministère libanais du Tourisme. Il s’agit de vendre la destination Liban en Jordanie à travers une campagne marketing et la mise en place de séjours organisés de trois à cinq jours. Selon nos prévisions, nous pourrions attirer environ 100 000 touristes jordaniens supplémentaires grâce à cette opération. L’idée par la suite est de faire la même chose en Égypte et en Irak.
D’autre part, nous avons participé à une initiative pour attirer des touristes chinois. Il s’agissait de proposer des packages régionaux Liban/Égypte ou Liban/Turquie, puisque les compagnies aériennes Egypt Air et Turkish Airlines font la connexion avec la Chine. Malheureusement, depuis notre voyage officiel en Chine, qui devait poser la première pierre de ce travail, la situation sécuritaire s’est beaucoup détériorée en Égypte comme en Turquie, et les Chinois ne vont pas venir de si loin pour seulement quelques jours au Liban.

Le succès des chambres d’hôte représente-t-il une menace pour l’hôtellerie traditionnelle ?
On ne peut pas vraiment les comparer, car les chambres d’hôte ciblent le tourisme domestique et disposent de peu de chambres, c’est donc un marché différent en termes d’échelle et de clientèle. Toutefois avec la crise actuelle on peut parler d’une forme de concurrence déloyale dans le sens où les chambres d’hôte – qui ne sont pas soumises à la même classification que les hôtels et ne sont pas assujetties à la même politique des prix – sont en train de tarifer leur offre au prix de chambres de luxe alors que les établissements cinq étoiles baissent leurs prix drastiquement.
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