Un article du Dossier

Immobilier : faut-il craindre un crash ?

Face à un marché en difficulté, la Banque du Liban (BDL) a émis en juin dernier une circulaire intermédiaire (n° 427), autorisant les banques commerciales à fournir des facilités de crédit aux sociétés immobilières souhaitant racheter des propriétés à des promoteurs en difficulté, à condition néanmoins que les transactions concernées répondent à un certain nombre de critères. Il s’agit ainsi uniquement de biens financés par un prêt bancaire en cours de remboursement et dont le solde restant équivaut à non moins de 50 % de la valeur du produit. En parallèle, les biens acquis doivent être utilisés d’abord pour rembourser les crédits bancaires correspondants, avant d’être vendus sur le marché dans un délai maximal de 10 ans. Parmi les autres conditions, les sociétés immobilières sont tenues de financer l’opération d’acquisition en utilisant un minimum de 40 % de leurs capitaux propres, contre un maximum de 60 % provenant de facilités de crédit. Selon le chef du département de recherche à la Byblos Bank, Nassib Ghobril, cette circulaire – la première en son genre depuis au moins 2001 – constitue un aveu direct des difficultés rencontrées par les promoteurs en termes d’écoulement de leur stock. « Il s’agit d’un bailout (renflouement) et la preuve concrète qu’il existe désormais un réel problème sur le marché », souligne-t-il. « Le danger réside au niveau du degré d’endettement des promoteurs. L’idée reçue est que ces derniers ont souvent recours à l’autofinancement mais, en réalité, il existe près de deux milliards de dollars de crédits immobiliers, toujours en cours », ajoute-t-il.
Cette intervention musclée de la Banque centrale ne vise pas tant à sauver certains promoteurs qu’à « protéger les banques contre le risque croissant de non-paiement de la part des constructeurs et d’un effet domino qui entraînerait un crash », estime pour sa part Jihad el-Hokayem.
Un point de vue que réfute Massaad Farès, président de la Real Estate Association of Lebanon (Real). « La mesure prise par la BDL n’est ni un renflouement ni la preuve d’un éventuel effondrement. Elle fait simplement partie des nombreux efforts déployés par la Banque centrale depuis dix ans pour soutenir l’immobilier au Liban, qui représente près d’un tiers du PIB », assure-t-il.
Massaad Farès est en passe de créer une société immobilière dans le cadre de la récente circulaire, en partenariat avec Namir Cortas, président de l’Association des promoteurs immobiliers du Liban (Redal). Celle-ci sera dotée à terme d’un milliard de dollars, dont 40 % levés auprès d’investisseurs individuels et institutionnels, et 60 % sous forme de crédits accordés par les banques. La filiale financière de la Bankmed, MedSecurities, a déjà été désignée pour se charger des placements. « L’objectif est d’acheter des appartements en gros et de les vendre au détail à des résidents ainsi qu’à des Libanais de la diaspora, en profitant des économies d’échelle. Par conséquent, nos achats ainsi que nos ventes seront à des prix intéressants, et permettront de lancer une nouvelle dynamique en injectant des liquidités sur le marché », précise-t-il. Les appartements n’ayant pas encore été vendus depuis 2011 constituent la principale cible de la société.
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