Un article du Dossier

Les sièges sociaux fleurissent à Beyrouth

Les sociétés libanaises sont de plus en plus nombreuses à décider d’investir dans la construction de leurs propres sièges sociaux. Une tendance qui se développe depuis peu et qui répond à la fois à des considérations économiques et pratiques.

Au moins une dizaine de compagnies construisent ou s’apprêtent à construire leurs sièges sociaux dans la capitale. La tendance n’est pas vraiment nouvelle, mais elle semble être en augmentation. « Au cours des cinq dernières années, le phénomène s’est accentué. Les sociétés qui connaissent plusieurs phases successives de croissance économique, avec une augmentation de leur masse salariale, passent nécessairement par cette étape-là », affirme Ziad Dagher, COO du groupe M1 Real Estate, dont la société construit un immeuble de bureaux à côté du centre Starco. Les banques sont particulièrement concernées, car elles concentrent un important nombre d’employés et sont particulièrement attentives à leur marketing. La plupart des grands établissements du pays, comme les banques Audi, Blom ou Byblos, ont déjà bâti leurs sièges sociaux au cours des 15 dernières années, tandis que les banques d’une taille intermédiaire s’y sont mises plus récemment. « Le secteur bancaire se porte bien, les établissements disposent de liquidités et peuvent allouer leurs profits à ce type d’investissement durable », estime Joseph Torbey, président-directeur général du Crédit libanais. La banque va achever les travaux de son immeuble de bureaux sur la corniche al-Nahr au début de l’année 2015.
Les sociétés qui choisissent de se doter de leur propre siège social cherchent d’abord à gagner en visibilité, à créer une image qui leur est propre, mieux identifiable pour leurs clients. Viennent également un certain nombre de considérations pratiques : regrouper tous les employés sous le même toit permet des gains de temps et d’argent. « Nos frais administratifs et de fonctionnement devraient diminuer de 40 % une fois notre siège achevé. Il ne sera plus nécessaire de louer des bureaux pour les employés, il sera possible de réaliser des économies d’électricité, de personnel de sécurité, de réduire le service courrier… La logistique sera beaucoup simple à gérer et la synergie entre les employés plus facile », explique Joseph Torbey. « Au lieu de louer des salles de grands hôtels pour des conférences ou des démonstrations, nous disposerons dans notre nouvel immeuble de bureaux d’un grand auditorium et de salles de conférences, où nous pourrons organiser tous ces événements », explique par exemple Joanne Chéhab, directrice générale de Ch. Sarraf & Co., une filiale du groupe Malia Holding qui construit un nouveau siège social à Amaret Chalhoub.

« Meilleure productivité »

Assurer un meilleur confort aux employés reste aussi un paramètre important dans la décision de construire son propre siège social. « Les employés doivent pouvoir travailler dans les meilleures conditions, disposer d’espaces où ils peuvent se concentrer ou recevoir des clients. C’est la garantie assurée d’une meilleure productivité », assure Joanne Chéhab.
Les sociétés en profitent souvent pour reconfigurer les espaces de travail, notamment avec des bureaux non séparés par des cloisons, en open space – sur le modèle de certaines compagnies européennes ou américaines, davantage d’espaces de détente ou encore un environnement plus vert. La question des parkings pèse aussi lourd dans la balance. « Nos employés devaient parfois se garer en double file ou attendre une quinzaine de minutes avant de trouver une place de parking. Dans notre nouveau siège, nous aurons deux étages réservés au stationnement des employés, ce qui va considérablement faciliter l’accès au lieu de travail », explique encore Joanne Chéhab. Certaines compagnies voient enfin dans la construction d’un siège social un investissement sur le long terme. « Au fil des années, notre bien foncier prendra de la valeur », affirme ainsi Rania Akhras, directrice générale de al-Mawarid Real Estate, la filiale immobilière de la banque éponyme. Pourtant, la vocation des sociétés n’est pas nécessairement de construire elles-mêmes leurs propres locaux. « Les entreprises n’ont généralement pas intérêt à immobiliser leur capital dans l’immobilier, surtout que les taux de rendement locatif sont faibles, mais plutôt à utiliser leur capital pour développer leur activité principale », explique Ziad Dagher. « En Europe et aux États-Unis, ce sont surtout des fonds de pension, des fonds d’assurance ou des fonds souverains, qui cherchent à construire des sièges sociaux pour faire fructifier leurs actifs sans trop prendre de risques. Au Liban, ce système n’existe pas et les sociétés finissent par être propriétaires de leurs sièges, davantage pour des raisons pratiques que financières », conclut Ziad Dagher.
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