Entrepreneur libano-britannique, Alexandre Asseily est l’une des figures incontournables de la diaspora libanaise de la Silicon Valley. Créateur de la société Jawbone qui développe des dispositifs électroniques prêts à porter, il est aussi fondateur ou actionnaire de plusieurs entreprises dans des secteurs aussi variés que les nouveaux médias, les rencontres en ligne, la santé, ou encore la Fintech. Rencontre en marge de la conférence Life & Endeavor Lebanon Global Business Summit.

Quelle est votre relation avec le Liban ? Comment vos origines libanaises ont-elles influencé votre carrière ?
Mon père est libanais et j’ai grandi ici avant de partir à Londres. Ma famille a toujours eu une fibre entrepreneuriale très forte et je pense que je tiens cela d’eux. Au-delà, le fait d’être libanais, de faire partie de cette diaspora, est peut-être un atout, mais il ne faut pas surestimer cette dynamique.

Sentez-vous qu’il y a un intérêt particulier de la diaspora libanaise pour l’écosystème entrepreneurial local ?
Dans un premier temps oui, car les gens se disent « c’est super ce qui se passe au Liban, l’écosystème est en train d’exploser et donc je veux aider ». Mais très vite, cet enthousiasme retombe et passe à « ça ne sert à rien d’investir dans un pays qui n’a pas de gouvernement, qui n’arrive pas à ramasser ses poubelles et où Internet ne fonctionne pas ». Faire face à ces obstacles est un vrai défi, surtout pour quelqu’un qui a le choix d’investir ailleurs, donc, ce que je remarque, c’est qu’il y a une forme d’euphorie qui se dégonfle rapidement. C’est la raison pour laquelle à chaque fois que je viens à Beyrouth, je dis à qui veut l’entendre que la priorité c’est l’infrastructure. C’est très beau de parler d’économie numérique, mais ça ne sert à rien si je ne peux pas télécharger une vidéo.

Aidez-vous des entrepreneurs libanais ?
Je n’aime pas donner des conseils banals à des centaines de personnes, c’est une perte de temps. À l’échelle mondiale, j’ai investi dans une dizaine d’entreprises et je passe du temps à travailler avec quatre ou cinq entrepreneurs dont Hind Hobeika, la fondatrice d’InstaBeats. Avec elle, j’ai un vrai rôle, je connais bien son produit et je l’aide sur l’ensemble de sa stratégie.

Quelles sont les forces et les faiblesses des entrepreneurs libanais ?
Ils ont beaucoup d’avantages. Ils ont de bonnes formations universitaires, ils sont innovants, ils parlent plusieurs langues et sont très bien implantés sur le marché régional. Cela veut dire qu’en théorie une entreprise basée à Beyrouth peut facilement se développer sur tout le Moyen-Orient, voire au-delà. Ceci dit, je remarque souvent qu’ils sont timides dans leurs ambitions. Quitte à se donner du mal, autant voir les choses en grand.

Conseilleriez-vous à un jeune entrepreneur libanais d’émigrer pour réussir ?
Non, il faut avant tout essayer sur place. Les universités sont de bon niveau et le coût du travail est peu élevé, donc il y a  beaucoup de produits qui peuvent tout à fait être développés au Liban. Certaines entreprises comme Bookwitty par exemple qui a réussi à créer un vrai Amazon arabe en sont la preuve, mais il faut faire attention à ne pas foncer dans le mur non plus, car certains projets vont forcément se heurter au manque d’infrastructures.