L’appel d’offres lancé en février par le gouvernement pour la collecte et le traitement des ordures au Liban a capoté, peu de sociétés privées s’étant présentées. Le délai pour l’appel d’offres a été prolongé, mais aucune solution ne se profile à l’horizon.

La crise de la gestion des déchets ne semble pas encore près de trouver son épilogue. Alors que le gouvernement a fixé au 17 juillet la date de la fermeture de la décharge de Naamé, aucune alternative n’a été trouvée. En février, le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) a lancé un appel d’offres pour la collecte et le traitement des déchets solides au Liban, suite au nouveau plan de traitement des déchets adopté par le gouvernement le 12 janvier 2015. Un plan qui prévoit de diviser le pays en six zones de service. Les résultats de l’appel d’offres devaient être divulgués le 29 mai, mais peu de compagnies y ayant participé, celui-ci a été relancé à la mi-juin, pour donner un mois supplémentaire aux sociétés désireuses de concourir. La nouvelle deadline a été fixée au 13 juillet. La seule zone qui a suscité l’intérêt est la zone 2, qui regroupe les cazas du Kesrouan, du Metn et de Jbeil. Trois offres ont été déposées par des compagnies libanaises en joint-venture avec des sociétés étrangères. La première offre émane des sociétés libanaises Lavajet et Dany Khoury for Contracting, associées avec l’entreprise italienne Daneco ; la seconde a été déposée par le trio Butec, Indevco et le groupe français Pizzorno Environnement. Enfin, les sociétés Araco (Jihad al Arab) et Soreco ont également participé à l’appel d’offres. Dans les zones 1 et 3, qui regroupent Beyrouth et ses banlieues, ainsi que le Metn-Sud (soit plus du tiers des déchets libanais), aucune offre n’a été déposée. La compagnie Averda, propriétaire de Sukleen, qui jouit du monopole de la gestion des ordures dans ces zones depuis 1997, s’est abstenue. Pour la Békaa, le nord et le sud du Liban, une seule société s’est à chaque fois présentée, invalidant de facto l’appel d’offres.

L’obstacle des décharges

Les objectifs exigeants du plan de gestion des déchets, qui imposent dans un laps de temps très court de ne rejeter que 40 % des déchets en décharge pendant les trois premières années, puis 25 % les années suivantes, ainsi que l’obligation pour les compagnies de déterminer l’emplacement des décharges, alors que l’État libanais n’a jamais réussi à le faire face à l’opposition de la population, semblent avoir découragé les investisseurs. Des pressions politiques auraient empêché certaines sociétés à se présenter, en particulier pour Beyrouth et le Metn-Sud, une information difficilement vérifiable. « L’attrait pour la zone du Metn-Kesrouan-Jbeil s’explique en grande partie par l’existence d’une décharge sauvage à Hbaline, à 5 km de Jbeil, qui appartient à la Fédération des municipalités de Jbeil, et que les compagnies envisagent de transformer en décharge contrôlée, ce qui est catégoriquement refusé par la population », explique Fifi Kallab, présidente de l’association Byblos Ecologia. Les sociétés privées ayant concouru à l’appel d’offres dans la zone 2 proposeraient des solutions de “Waste to Energy”, à savoir l’installation de petits incinérateurs de déchets pour produire de l’électricité ou des usines de RDF (Refuses Derived Fuel), permettant de transformer les déchets en combustible pouvant alimenter les fours des cimenteries. En cas d’impasse, le ministre de l’Environnement, Mohammad Machnouk, a évoqué l’option de l’exportation des déchets à l’étranger. Le coût évoqué serait de 110 euros par tonne (contre environ 165 dollars la tonne actuellement à Beyrouth et au Mont-Liban avec le groupe Averda) et différentes destinations possibles comme la Turquie, le Maroc ou le Portugal. Le coût réel sera largement supérieur, avertissent cependant différents observateurs. « Le coût par tonne exportée sera au minimum de 200 dollars, car un certain nombre d’opérations seront préalables à l’exportation : collecte, tri, mise en balle et traitement des déchets pour enlever les matières liquides, abondantes dans les déchets organiques, qui représentent 53 à 60 % des déchets libanais », affirme Raja Noujaim, coordinateur de la coalition civile contre la politique du gouvernement pour le traitement des déchets. Une source au ministère de l’Environnement affirme « qu’aucune décision n’a été prise à ce stade », sans pour autant donner plus de détails.