Fondée au début des années 1950 Daou Frères a pris le nom de Comfort Mat après sa reprise en 2002, par Élie Daou, le fils de l’un des trois fondateurs. C’est la dernière entreprise de recyclage du textile au Liban. Elle récupère les tissus issus des chutes de production des usines d’habillement (entre 0,04 et 0,15 dollar le kilo) et de la toile de jute, deux matières qui, une fois recyclées, servent pour la confection des couches inférieures des matelas ou au rembourrage des oreillers et des couettes. Comfort Mat recycle 500 à 600 kg de jute et de coton par jour, mais a dû considérablement réduire ses activités avec la crise en Syrie. « Il y a quatre ans, nous recyclions quotidiennement quatre à cinq tonnes, et nous avons réduit nos activités de recyclage à huit à dix heures par jour alors qu’auparavant nous fonctionnions 24h/24 », explique Élie Daou, PDG de Comfort Mat. L’entreprise importait 60 % de ses matières à recycler de Syrie, en particulier de la toile de jute, qui servait à emballer le coton syrien, une activité stoppée par la guerre. Elle importait aussi du jute de Jordanie, une opération rendue impossible depuis la fermeture du principal poste frontière de Nassib début 2015. Le jute n’est pas disponible en quantité suffisante au Liban, surtout depuis Tapis Liban – un important fournisseur de Comfort Mat – a mis la clé sous la porte à la suite d’un incendie il y a trois ans. La société libanaise doit donc importer par voie maritime depuis deux ans du jute de Turquie, ce qui a triplé ses coûts. Au total, Comfort Mat importe 70 % des matières qu’elle recycle. Bien qu’elle ait reçu des propositions en ce sens, notamment de la municipalité de Zahlé, la société n’a jamais envisagé d’utiliser des matières textiles issues des déchets. « Ils ne sont pas triés et beaucoup trop sales pour pouvoir passer dans nos machines. Le Liban n’organise pas de collecte des vêtements comme dans les pays européens. »
Les tissus et le jute utilisés par Comfort Mat sont régénérés en fibres grâce à la technique de l’effilochage, puis sont solidifiés sous forme de “nappes”. Depuis quelques années, l’usine a été confrontée à la baisse de la demande d’entreprises libanaises qui produisent des matelas, comme Primaflex ou Sleep Comfort. « Le coton recyclé est peu à peu remplacé par des fibres de polyester ou de la mousse, qui allègent les matelas, même si la qualité est moins bonne. Chaque matelas ne contient plus que quatre à cinq kilos de coton, soit trois fois moins qu’auparavant. C’est une tendance mondiale », assure Élie Daou.
Depuis une dizaine d’années, Comfort Mat s’est substituée à Daou Frères pour fabriquer aussi ses propres matelas de A à Z afin de créer de la valeur ajoutée à la matière première issue du recyclage des tissus et de la jute. Le montant de l’investissement n’a pas été communiqué. Le recyclage ne représente plus aujourd’hui que 30 % de son chiffre d’affaires dont le montant n’est pas non plus communiqué. « Les coûts énergétiques très élevés par rapport aux autres pays de la région ont conduit la dizaine d’usines de recyclage du textile à fermer les unes après les autres », affirme le PDG de Comfort Mat pour expliquer cette réorientation.