La première machine à reproduire des objets en polyamide est arrivée au Moyen-Orient, c’est un atelier artistique beyrouthin, “Bakery”, qui l’accueille. L’imprimante 3D est déjà utilisée dans le milieu de l’art et de l’architecture, mais pourrait relancer l’innovation dans bien d’autres secteurs de l’économie.

Une ancienne boulangerie d’Achrafié, rue al-Khazenein, abrite un four pas comme les autres. On y cuit des préparations à base de polyamide; le thermostat se dose en rayon laser. Ce lieu se nomme Rapid Manufactory, localisé dans l’atelier artistique Bakery, et le four en question est une imprimante 3D, la première au Moyen-Orient.
Guillaume Crédoz, architecte et artiste touche-à-tout, a fait venir cette machine d’Allemagne pour pouvoir fabriquer ses créations conçues sur ordinateur et proposer ce service aux autres architectes, designers ou artistes. Son coût 200 000 dollars.
Le principe de l’imprimante 3D fabriquée par l’entreprise Eos est de produire avec précision des objets à partir de données numériques en polyamide ou en polyamide cimentée, un matériau suffisamment solide pour une utilisation professionnelle : Guillaume Crédoz a déjà testé la production d’objets d’art, de bijoux, mais aussi des pièces de rechange, d’ustensiles. Les données numériques sont recueillies par un scan 3D ou calculées grâce à des logiciels de design. L’imprimante va “cuire” au rayon laser les particules de polyamide selon les informations numériques. Ce processus de fabrication permet de façonner en simultané toutes les faces d’un objet appartenant à un même plan, des formes qui ne pouvaient être produites en une fois le sont désormais : une sphère dans une sphère ou un creux dans une boule. « On sort du schéma classique de fabrication, on peut reproduire toutes les formes imaginables », s’enthousiasme Guillaume Crédoz. Une façon de concevoir les objets qui peuvent s’étendre au-delà du monde artistique.

De l’art à l’industrie

« L’impression 3D raccourcit la chaîne de conception et de fabrication des objets. » Plus besoin de moule et, surtout, plus besoin d’amortir le coût d’un moule avec une série de production : l’objet est directement fabriqué à partir de son plan et peut être personnalisable. « Si finalement les données numériques sont erronées et l’objet imprimé est défectueux, on modifie les paramètres et réimprime l’objet sans que cela ait un coût faramineux », souligne Guillaume Crédoz. Le coût varie en fonction de la forme et de la taille de l’objet. Il faut compter environ 2,5 dollars par mètre cube.
L’impression en 3D pourrait aussi être exploitée dans l’industrie pour tester des prototypes, ou dans le milieu médical, pour des prothèses par exemple.
Depuis son ouverture le 21 mars 2013, l’entreprise a eu environ 60 clients et 74 commandes d’impression, ce qui n’est pas assez pour amortir l’investissement. Alors pour se faire connaître, la Rapid Manufactory a organisé un concours intitulé “What can you build in 10X10X10 cm”  s’adressant aux artistes et designers, mais pas encore aux industriels. Les deux lauréats, Thomas Cremers, architecte, et Nicolas el-Hayek, étudiant en design, ont gagné la possibilité d’imprimer leur œuvre : respectivement une œuvre d’art cubique et une lampe design.

On peut tout reproduire… même des armes à feu
L’association américaine Defense Distributed, qui milite pour la fabrication d’armes avec la technologie de l’impression 3D, relance le débat sur le contrôle des armes en publiant les plans de fabrication d’une arme à feu en résine, le Liberator. Bien que la qualité de cette arme, la première que l’on puisse fabriquer soi-même, ne lui garantisse pas une utilisation pérenne, elle est aussi dangereuse que les modèles en métal. Sa facilité de fabrication, mais surtout la possibilité de la rendre indétectable par les portails de sécurité, ravive la question sécuritaire en particulier dans les aéroports.