Avec 20 000 visiteurs, les organisateurs de la Beirut Art Fair (BAF) se félicitent d’un succès sans précédent. En revanche, les ventes n’ont pas été à la hauteur de l'édition précédente.

Pour sa cinquième édition, qui s’est achevée le 21 septembre 2014, la Beirut Art Fair (BAF), a attiré quelque 20 000 simples curieux ou fins connaisseurs d’art et de design modernes ou contemporains.

Du point de vue du nombre de visiteurs, cette foire commerciale confirme sa réussite : en 2013, lors de sa précédente session, 18 000 visiteurs avaient fait le déplacement.

« Compte tenu de la situation géopolitique libanaise et régionale, la BAF reste un événement positif : pendant quatre jours, l’art prime sur la morosité », explique Saleh Barakat, de la Galerie Agial, qui a fait le choix d’exposer le travail d’un seul de ses artistes, le Libano-Sénégalais Hady Sy.

Au total, 47 galeries (dont 14 spécialisées dans le design) venues de 14 pays différents, représentant plus de 300 artistes, étaient présentes.

Le montant définitif des ventes n’est pas encore connu. Toutefois, les organisateurs ont d’ores et déjà annoncé un chiffre d’affaires en baisse par rapport à 2013, où les ventes avaient atteint 2,8 millions de dollars (soit 155 dollars de dépenses moyennes par visiteurs).

Le nombre de transaction en revanche est en augmentation cette année : « L’année dernière, un certain nombre de pièces se sont vendues à plusieurs dizaines de milliers de dollars. Cette année, les galeries semblaient avoir anticipé une baisse : la plupart d’entre elles exposaient des œuvres à moins de 40 000 dollars », explique Laure d’Hauteville, coorganisatrice de la foire.

On est loin de la vibrionnante Art Dubaï (85 galeries, 33 pays différents, 500 artistes représentés en 2014). Cette année, Art Dubaï a compté sur 25 000 entrées payantes et assuré un volume de transaction de plus de 45 millions de dollars, selon les chiffres officiels. Ce qui porte la dépense moyenne par visiteur à 1800 dollars.

On est loin aussi de la Biennale d’art contemporain d’Istanbul (80 galeries, 24 pays différents, 600 artistes représentés en 2014), qui s’est terminé fin septembre. En 2013, la foire d’Istanbul a accueilli 75 000 visiteurs et atteint 60 millions de dollars de ventes au total. Soit une dépense moyenne par visiteur de 800 dollars.

« Ce serait une erreur de comparer Beyrouth avec des capitales comme Dubaï ou Istanbul. Beyrouth se positionne davantage comme une « boutique art fair » avec une soixantaine de galeries au maximum. Ce qui correspond à la taille du marché ainsi qu’aux demandes des acheteurs. Mais cela n’a rien de péjoratif : la BAF défend la scène artistique libanaise, particulièrement vivante, en lui permettant de trouver sa place au sein d’un marché mondialisé », assure Pascal Odile, directeur artistique de la BAF.

La difficulté du positionnement de la foire de Beyrouth est toutefois de jongler entre cet aspect « Boutique fair » - c’est souvent dans les lieux les plus « intimes » que l’on peut dénicher des choix artistiques pointus – et son côté « événement culturel et touristique grand public », à l’instar du salon du livre francophone par exemple.

D’où une exigence artistique parfois inégale, aux dires de plusieurs professionnels libanais. Sous couvert d’anonymat, l’un d’entre eux s’avoue même en colère.

« La plupart des œuvres exposées n’étaient dignes du niveau artistique de Beyrouth. Quand Guiseppe Penone ou Michelangelo Pistoletto exposent à Beyrouth, comme c’est le cas cette saison, quand on peut se prévaloir d’une des scènes artistiques les plus riches de la région, comment accepter des figurines roses fluo, du (mauvais) pop art revisité ? », dénonce-t-il.

Pourtant, Beyrouth commence à s’insérer dans l’écosystème des foires mondiales. Du 27 au 30 novembre, prochain un pavillon libanais, orchestré par Janine Maarmari, sera présent à la Singapore Art fair, un autre salon régional, organisé par l’équipe du BAF. En tout, une dizaine d’artistes libanais devraient y être exposés avec notamment Saïd Baalbaki ou Taghreed Darghouth.