Pour la première fois depuis leur lancement en 2005, le prix Holcim pour la construction durable au Moyen-Orient et en Afrique récompense cette année deux projets libanais. Le jury qui distingue des projets environnementaux et sociaux, a étudié 2064 propositions, dont 15 % en provenance du Liban. Le prix en or de cette catégorie, 100 000 dollars, a été remis à une équipe turque, tandis que l'architecte libanais Raëd Abillama a reçu l'argent pour son projet de rénovation du Bois des Pins, le plus grand parc public de la capitale qui s’étend sur 40 000 m2 et devrait rouvrir en 2015.

Cinq étudiantes de l'Université américaine de Beyrouth (AUB) ont quant à elles obtenu le 4ème prix dans la catégorie parallèle baptisée “nouvelle génération”. Décerné le 16 octobre, le prix récompense leur projet de transformation des déchets en énergie conçu pour la municipalité de Bauchriyé, à l’est de Beyrouth.

Contrairement au projet de rénovation du Bois des Pins, le projet n'a pas reçu le soutien de la municipalité de Bauchriyé. Portant sur la création d'un complexe de 19 700 m2, dont 6490 de bâtiments, il comprend un incinérateur de déchets, un espace d'exposition et des espaces publics. L’objectif est d’y incinérer les 45 000 tonnes de déchets produits annuellement par la municipalité et générer une énergie capable de résoudre les problèmes d'électricité du quartier, sans aucun impact négatif sur l'environnement. « 200 tonnes de déchets incinérés peuvent fournir de l'électricité à 100 000 foyers et 15 usines durant un an », explique l’une des étudiantes, Marylynn Antaki, en citant une étude de 2011, menée par l'organisme SWEEP. La chaleur dégagée par la combustion, ainsi que les gaz qui s'en échappent et sont ensuite refroidis, peuvent en effet être transformés en énergie électrique.

« Aucun projet d’incinérateur n’a abouti à Beyrouth jusqu’à présent, car les autorités ne comprennent pas la nécessité d'un tel investissement », déplore-t-elle. Celui de leur projet est estimé à 18 millions de dollars. L'incinérateur pourrait dans un premier temps recycler 200 tonnes de déchets par an, puis atteindre sa capacité maximale de 800 tonnes, si une meilleure organisation de la collecte permet de couvrir les quartiers adjacents de Bourj Hammoud, Jdeideh et Sad el Bauchriyé, où sont produites respectivement 20 000, 75 000 et 40 000 tonnes de déchets par an, dont la majeure partie est abandonnée dans des décharges ou brûlée sauvagement. C’est d’ailleurs cet emplacement central qui a conduit les auteurs du projet à choisir ce site.

Réduire la pollution en créant de l'énergie n'est pas le seul objectif du projet, soulignent ses créatrices Marylynn Antaki, Christina Attiyeh, Mira Boumatar, Romy El Sayah et Yara Rahme. « Le site d'exposition offrira aux artisans locaux un tremplin pour leur commerce, car situé à l'entrée de Bauchriyé, le complexe est très accessible. Un parcours aménagé le long de la chaîne d'incinération permettrait également de sensibiliser les visiteurs ».