Un sacré bon roman ! Ce n’est pas seulement Le Commerce du Levant qui l’affirme, mais rien moins que Stephen King, qui le clame sur le bandeau de couverture des “Maraudeurs”. Premier roman de Tom Cooper, ce texte à l’humour grinçant se situe dans la petite ville de pêcheurs de crevettes, Jeannette, en Louisiane. Mais quand le romancier s’y installe en 2010, l’ouragan Katrina a ravagé la région cinq ans auparavant et rien n’y est tout à faire pareil. Le jeune Wes, par exemple, a vu sa mère se noyer sous ses yeux. Cinq ans plus tard, la marée noire – liée à l’explosion de la plate-forme Deepwater Horizon en 2010 – achève de ruiner ceux qui avaient encore quelque chose à perdre. Sans compter la concurrence de la crevette chinoise, qui inonde le marché américain, et laisse les Louisianais au bord de la banqueroute.
Quelques-uns, bien sûr, continuent d’y croire et s’accrochent à ces terres immergées comme Gus Lindquist, un pêcheur manchot accro aux antidouleurs,  qui s’acharne à retrouver le  trésor du flibustier Jean Lafitte. « Ce qu’il découvre est un peu plus que ce qu’il escomptait », dit l’écrivain, lors d’un entretien, sans vouloir en dévoiler plus. Parmi les autres personnages, on s’attache au jeune Wes Trunch, écartelé entre le passé et le futur,  qui cultive un champ de cannabis quelque part sur une île isolée de la baie, dont personne ne veut rien savoir parce que lui et son frère ont la réputation d’être dingues et d’avoir la gâchette facile. Quant à Cosgrove et Hansen, pieds nickelés improbables de cette histoire, ils sont à l’affût de la moindre combine pour trouver à la fois de la dope et quelques dollars. Description d’un monde en sursis, ce bayou, pétri de croyances loufoques et de tradition,  est en train de se noyer sous le coup de la mondialisation. Un monde de naufragés qui nous emporte loin.
“Les Maraudeurs”, Tom Cooper, Albin Michel, 23 dollars.