L’idée de Nawaya est née d’une rencontre en 2009 entre Zeinab Saab, jeune consultante en mission au Liban pour l’Organisation des Nations unies, et Nadeen Hosn, une adolescente de la Békaa passionnée de stylisme. « Lorsqu’elle m’a montré ses croquis de robes, j’ai pensé qu’elle avait un potentiel, mais que venant d’un milieu pauvre elle n’aura sans doute jamais accès aux ressources pour le réaliser. Combien d’autres jeunes talents ont ainsi été avortés par manque d’opportunités ? » se demande Zeinab Saab. Trois ans après, la jeune consultante quitte New York et s’installe à Beyrouth avec une mission : soutenir les jeunes talents issus de milieux défavorisés. Elle fonde l’ONG Nawaya Network et lance le Talent Program pour accompagner les jeunes dans la concrétisation de leur projet artistique. Entre 2012 et 2015, une quinzaine de personnes en ont bénéficié, dont Nadeen Hosn, qui travaille aujourd’hui pour un designer.

« Mais avec la dégradation de la situation économique et la crise des réfugiés, l’urgence est devenue d’aider les jeunes à générer rapidement des revenus », explique-t-elle. C’est ainsi qu’en 2015, l’ONG, qui compte désormais une vingtaine d’employés, lance deux nouveaux projets : SE Factory et le Entrepreneurship Program.

SE Factory est un bootcamp de codage informatique. « Les universités dispensent des formations trop théoriques. Résultat, les jeunes ont du mal à s’insérer dans le marché du travail, alors que la demande dans les métiers du numérique est importante. » SE Factory propose donc une mise à niveau technique grâce à une formation dispensée à Beyrouth sur 14 semaines à raison de 10 heures par jour, pour seulement 100 dollars. Des frais largement accessibles qui ont été permis par une levée de fonds d’environ 400 000 dollars auprès d’entreprises et de fondations. « Nos bénéficiaires sont généralement des jeunes diplômés en sciences de l’informatique venant de milieux modestes : l’origine sociale ne devrait pas freiner l’accès à une éducation de qualité », affirme Zeinab Saab. Une qualité qui s’avère payante : sur la centaine d’alumni du programme, 90 % sont actuellement employés. En moyenne, leurs salaires sont passés de 600 dollars à 1 400.

Le deuxième projet, l’Entrepreneurship Program, financé par l’Unicef, offre une formation d’un mois à des jeunes défavorisés qui souhaitent lancer leur microentreprise. Les meilleurs projets sont ensuite sélectionnés pour financement et incubation. Sur les 4 400 jeunes à avoir suivi le programme, 510 ont été incubés. « Le soutien est adapté au besoin de chacun (conseils, formations, équipements, financement). Les projets sélectionnés sont très variés, allant de la petite restauration à la création de site web. C’est l’innovation que nous mettons en valeur », précise Zeinab Saab. Le but est de capter les désirs de la jeunesse et saisir ses intentions, qui se dit nawaya en arabe.