À 21 ans, Samy el-Khoury a déjà une semaine chargée. Les lundis, mercredis et vendredis, il est étudiant en génie électrique à l’Université américaine de Beyrouth (AUB). Les mardis et jeudis, il dirige une start-up d’intelligence artificielle. « Il faut s’habituer, ça peut être fatigant », dit-il.

C’est en classe de terminale, à 17 ans, qu’il élabore son premier projet : un drone capable de surveiller les pistes de ski, de détecter les personnes accidentées, leurs coordonnées GPS et d’appeler les secours. Le concept remporte plusieurs compétitions d’innovation au Liban, mais aussi en Pologne et au Koweït. Le lycéen, qui a conçu les batteries et le moteur du drone, comprend alors qu’il a trouvé sa voie. Le bac en poche, Samy el-Khoury décide de poursuivre ses études à l’AUB, mais il a vite envie de remettre les mains dans le cambouis.

C’est à l’occasion d’une conférence qu’il rencontre celui qui deviendra son associé, Amer Mouawad, qui venait de revendre sa société spécialisée dans l’impression 3D, Zombiesoft.

Ensemble, ils créent l’une des premières start-up d’intelligence artificielle au Liban, Vision in Motion (ViM), en 2016. Elle propose aux entreprises d’analyser les comportements de leurs clients (le parcours qu’ils font dans une boutique, ce qu’ils regardent, ce qu’ils touchent…) à partir des vidéos de caméra de surveillance. L’idée séduit vite : ViM intègre l’accélérateur Speed@BDD, remporte la compétition Seedstars au Liban et lève en tout 100 000 dollars.

À peine un an après son lancement, l’entreprise signe ses premiers contrats, notamment avec Pepsi.co pour équiper des supermarchés aux Émirats.

Mais « pour faire passer ViM à l’échelle supérieure, il fallait investir beaucoup en temps et en capital, entre 600 000 et un million de dollars », explique Samy el-Khoury, qui opte plutôt pour un rapprochement avec l’un de ses anciens clients, spécialisé en analyse de données des médias et réseaux sociaux en ligne. ViM fusionne ainsi avec la start-up libanaise Yakshof. « Ils arrivaient à extraire beaucoup de données texte, photo, vidéo, mais ils ne savaient pas forcément comment les traiter, nous si », résume Khoury devenu directeur associé.

Aujourd’hui, Yakshof propose des services personnalisés aux entreprises qui souhaitent surveiller ou contrôler l’impact de leur contenu en ligne. Elle peut par exemple analyser la réaction des utilisateurs à une campagne ou limiter la propagation d’une fausse rumeur.

Basée à Beyrouth, Yakshof a bénéficié du soutien de plusieurs investisseurs privés, pour un montant total non divulgué. La start-up affirme être rentable et compte une douzaine de gros clients. Elle emploie quinze personnes et opère dans six pays. Pour Samy el-Khoury, l’avenir de l’entreprise est lié à sa capacité à innover, d’où l’importance de miser sur la recherche et le développement, notamment en intelligence artificielle.

En parallèle, le jeune entrepreneur, qui n’a pas encore décroché sa licence, s’est déjà lancé dans un nouveau projet. Le prototype a été validé par les investisseurs et la fabrication lancée. Qu’est-ce que c’est ? Un objet connecté et portatif. Il n’en dira pas plus.