Habib Kairouz, associé gérant du fonds d’investissement
en capital-risque américain Rho Ventures
En tant qu’expatrié et investisseur spécialisé dans le secteur de l’économie numérique, quel regard portez-vous sur l’évolution de l’écosystème libanais ?
Lors de mes nombreuses visites au Liban, j’ai pu constater l’amorçage d’une véritable dynamique dans le secteur. Il y a cinq ans, on a assisté à l’émergence d’une première génération d’entrepreneurs ayant choisi de surfer sur la vague du redécollage de la “Net économie” aux États-Unis pour monter leurs propres sociétés dans le pays plutôt que d’émigrer. Ce mouvement a néanmoins été freiné par l’absence de capitaux dans la région qui obligeait les entrepreneurs à bâtir un modèle économique basé sur la survie à court terme plutôt que la création de valeur.
Aujourd’hui, la situation n’est plus la même et l’ensemble des ingrédients commencent à être réunis pour que l’écosystème puisse vraiment franchir un cap. La circulaire 331 de la Banque du Liban (BDL) a levé l’obstacle capitalistique, les initiatives de soutien se sont multipliées et l’on commence à voir des “success stories” locales comme les “exits” de Diwanee (voir Le Commerce du Levant
n° 5651) et Shahiya (voir Le Commerce du Levant n° 5659). Mais ce type d’opération doit vraiment croître, en nombre mais aussi en valeur, pour que les sorties atteignent l’équivalent de deux à trois fois la taille des fonds qui y ont investi.
Vous mentionnez le caractère décisif de la circulaire 331. Est-ce à dire que les pouvoirs publics ont un rôle stratégique à jouer dans son évolution ?
La circulaire 331 est un parfait exemple de partenariat public-privé vertueux pour amorcer le décollage industriel du secteur. Mais cela ne peut être pas viable à long terme. Pour que cette impulsion se transforme en succès durable, il est impératif que l’argent investi génère des rendements suffisants et que ce capital subventionné soit progressivement substitué par celui d’investisseurs institutionnels motivés par une logique classique de rentabilité.
Pensons à ce qui s’est passé au Canada dans les années 1990 : pour développer leur secteur technologique, les gouvernements ont adopté une politique très active de stimulation de l’offre de capital-risque, principalement à travers des fonds d’investissement publics et de fortes incitations fiscales. Cela a abouti à une très forte abondance de capital et l’émergence d’une génération d’entrepreneurs, mais engendré beaucoup de gaspillages car créer des sociétés était devenu un but en soi et la performance des investissements s’est avérée secondaire. Les pouvoirs publics ont donc dû revoir leur système pour retrouver une certaine attractivité dans la compétition mondiale.
Quels peuvent être les arguments du Liban dans cette compétition ?
La spécialisation à partir de ses avantages comparatifs ! Pour attirer les investisseurs, il faut miser sur des activités qui ne risquent pas d’être compromises par l’instabilité sécuritaire, comme les services sur le “Cloud”, et qui présentent de vraies perspectives de revenus sur le marché arabe. Il faut donc plutôt viser une clientèle d’entreprises que de consommateurs finaux. À cet égard, le Liban bénéficie de secteurs très développés comme les services financiers ou de communication qui offrent aux start-up technologiques débouchés commerciaux et un véritable “effet cluster”. À elles d’en profiter, sur le modèle de ce qu’a fait la ville de New York par exemple, qui a préféré miser sur la finance et les nouveaux médias plutôt que de tenter de rivaliser avec la Silicon Valley sur son propre terrain.
Lors de mes nombreuses visites au Liban, j’ai pu constater l’amorçage d’une véritable dynamique dans le secteur. Il y a cinq ans, on a assisté à l’émergence d’une première génération d’entrepreneurs ayant choisi de surfer sur la vague du redécollage de la “Net économie” aux États-Unis pour monter leurs propres sociétés dans le pays plutôt que d’émigrer. Ce mouvement a néanmoins été freiné par l’absence de capitaux dans la région qui obligeait les entrepreneurs à bâtir un modèle économique basé sur la survie à court terme plutôt que la création de valeur.
Aujourd’hui, la situation n’est plus la même et l’ensemble des ingrédients commencent à être réunis pour que l’écosystème puisse vraiment franchir un cap. La circulaire 331 de la Banque du Liban (BDL) a levé l’obstacle capitalistique, les initiatives de soutien se sont multipliées et l’on commence à voir des “success stories” locales comme les “exits” de Diwanee (voir Le Commerce du Levant
n° 5651) et Shahiya (voir Le Commerce du Levant n° 5659). Mais ce type d’opération doit vraiment croître, en nombre mais aussi en valeur, pour que les sorties atteignent l’équivalent de deux à trois fois la taille des fonds qui y ont investi.
Vous mentionnez le caractère décisif de la circulaire 331. Est-ce à dire que les pouvoirs publics ont un rôle stratégique à jouer dans son évolution ?
La circulaire 331 est un parfait exemple de partenariat public-privé vertueux pour amorcer le décollage industriel du secteur. Mais cela ne peut être pas viable à long terme. Pour que cette impulsion se transforme en succès durable, il est impératif que l’argent investi génère des rendements suffisants et que ce capital subventionné soit progressivement substitué par celui d’investisseurs institutionnels motivés par une logique classique de rentabilité.
Pensons à ce qui s’est passé au Canada dans les années 1990 : pour développer leur secteur technologique, les gouvernements ont adopté une politique très active de stimulation de l’offre de capital-risque, principalement à travers des fonds d’investissement publics et de fortes incitations fiscales. Cela a abouti à une très forte abondance de capital et l’émergence d’une génération d’entrepreneurs, mais engendré beaucoup de gaspillages car créer des sociétés était devenu un but en soi et la performance des investissements s’est avérée secondaire. Les pouvoirs publics ont donc dû revoir leur système pour retrouver une certaine attractivité dans la compétition mondiale.
Quels peuvent être les arguments du Liban dans cette compétition ?
La spécialisation à partir de ses avantages comparatifs ! Pour attirer les investisseurs, il faut miser sur des activités qui ne risquent pas d’être compromises par l’instabilité sécuritaire, comme les services sur le “Cloud”, et qui présentent de vraies perspectives de revenus sur le marché arabe. Il faut donc plutôt viser une clientèle d’entreprises que de consommateurs finaux. À cet égard, le Liban bénéficie de secteurs très développés comme les services financiers ou de communication qui offrent aux start-up technologiques débouchés commerciaux et un véritable “effet cluster”. À elles d’en profiter, sur le modèle de ce qu’a fait la ville de New York par exemple, qui a préféré miser sur la finance et les nouveaux médias plutôt que de tenter de rivaliser avec la Silicon Valley sur son propre terrain.


