Aline Sara, Anthony Guerbidjian et Reza Rahnema sont des pionniers de l’économie numérique solidaire. Ensemble, ces trois jeunes diplômés de l’Université de Columbia ont lancé NaTakallam, une plate-forme qui met en relation des réfugiés syriens au Liban et des personnes souhaitant apprendre l’arabe à travers le monde.
« En tant que libanaise ayant vécu la plupart de ma vie à l’étranger, j’ai toujours été frustrée par mon niveau d’arabe, explique Aline Sara, cofondatrice de NaTakallam. J’ai essayé différentes méthodes, mais c’était trop coûteux ou inadapté à mes besoins. » En effet, l’enseignement de l’arabe en Occident est souvent limité à l’arabe classique, peu utilisé dans la vie courante. Comme Sara, beaucoup de personnes ont du mal à apprendre le dialecte levantin.
L’afflux de réfugiés syriens au Liban est perçu par Sara et ses partenaires comme une opportunité. « Les Syriens ont souvent du mal à trouver un travail correctement payé au Liban, pourtant beaucoup d’entre eux sont qualifiés », explique-t-elle. Avec l’aide de l’association Sawa, ils proposent donc à de jeunes Syriens ayant une bonne base d’anglais et un accès régulier à Internet de converser sur Skype avec des étudiants en arabe.
Le modèle économique est simple et efficace. Une session d’une heure est facturée 15 dollars aux utilisateurs, soit près de
50 % moins cher qu’une heure de cours particuliers. De cette somme, dix dollars sont reversés aux participants syriens et cinq dollars reviennent à NaTakallam. Côté investissement, les fondateurs parviennent à financer eux-mêmes le site Web ainsi que quelques voyages à Beyrouth.
Pour trouver les premiers participants, NaTakallam utilise d’abord le bouche-à-oreille, puis s’empare des réseaux sociaux. En quelques mois, les élèves affluent. Le plus jeune à ce jour a dix ans, il vit en Alaska.
Aujourd’hui, la plate-forme regroupe 160 “élèves” pour une vingtaine de “tuteurs” et est appelée à se développer. Côté débouchés, les fondateurs souhaitent étendre leur réseau à l’Europe et tentent de créer des partenariats avec des universités américaines qui pourraient utiliser NaTakallam sur le modèle des labos de langue, en complément des cours d’arabe classique. Côté recrutement, la petite équipe étudie les possibilités de collaboration avec des réfugiés en Turquie et en Jordanie.