Depuis 2000, Lamia Moubayed Bissat dirige l’Institut des finances Basil Fuleihan, le centre de formation et de documentation du ministère des Finances. Sa mission : renforcer les compétences des agents de la fonction publique libanaise afin de mieux servir le citoyen.
Née à Beyrouth en 1967, Lamia Moubayed Bissat est une enfant de la guerre du Liban qui a brisé ses capacités de projection dans l’avenir. « Au moment de m’inscrire à l’université, je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire. J’ai coché les deux premiers choix de la liste, classée par ordre alphabétique : agriculture et architecture », raconte-t-elle. Aujourd’hui, à l’approche de la cinquantaine, sa vision est très claire. « J’ai décidé de consacrer ma vie professionnelle à la reconstruction des institutions de mon pays », explique celle qui dirige depuis 16 ans l’Institut des finances Basil Fuleihan, le centre de formation des agents de la fonction publique libanaise qui relève du ministère des Finances.
Il faut dire qu’elle n’a pas trouvé sa voie à la faculté d’agriculture de l’Université américaine de Beyrouth – choisie à pile ou face aux dépens de l’architecture. Au bout de quatre ans, elle se réoriente vers un cursus en économie, avec une spécialisation sur les questions de développement. Lorsque la jeune femme achève ses études, le Liban commence alors sa lente reconstruction, « une période passionnante car il y avait tout à faire », se souvient-elle. Après une expérience de trois ans dans un cabinet de conseil privé au Liban, elle décroche un poste de gestionnaire de projet au Programme des Nations unies pour le développement (Pnud). Sa mission : réhabiliter les entreprises publiques du pays. « À ce moment, j’ai eu un déclic et ai effectué mon premier vrai choix. J’ai compris que construire la paix passe obligatoirement par un État légitime politiquement, mais aussi et surtout par un État efficace et compétent. »
En 2000, Lamia Moubayed Bissat apprend que l’Institut des finances, créé quatre ans auparavant dans le cadre d’un protocole de coopération franco-libanais, cherche un nouveau directeur. Ce sera elle. Ce centre de formation et de documentation a notamment pour vocation de former les agents publics du ministère des Finances, mais aussi tous les agents de l’administration libanaise en charge des finances publiques. Sa première mission est de transformer le projet en institution publique autonome. Les financements français puis européens sont alors arrivés à leur terme et il s’agit de pérenniser l’institut en lui offrant un cadre légal, un statut, un budget, une mission et des moyens de travail. C’est chose faite en 2003. Treize ans plus tard, l’Institut des finances offre un catalogue de plus de 110 formations dans 11 domaines (gestion des finances publiques, comptabilité publique, fiscalité, douanes…), emploie 15 personnes (dont 80 % de femmes), collabore avec un réseau de 300 formateurs externes, et a permis à 3 405 fonctionnaires de se former en 2015. Il est doté d’un budget de fonctionnement annuel d’un million de dollars – un des plus faibles des institutions publiques, selon sa directrice, qui lui est entièrement alloué par le ministère des Finances. Des bailleurs internationaux, notamment la Banque mondiale, l’École nationale d’administration française, l’Organisation de coopération et de développement économiques, ou encore l’Institut arabe de planification du Koweït, financent en outre des ateliers, des conférences ou des cursus que l’Institut des finances offre désormais aussi à des non-Libanais.
Vers une meilleure information du citoyen
Au-delà de cette diversification régionale, rendue nécessaire par l’absence de politique de développement de l’administration publique libanaise en période de paralysie politique, Lamia Moubayed Bissat a choisi un autre axe stratégique : l’information du grand public.
Inscrite dans les statuts de l’institut depuis sa création, la mission de documentation du citoyen sur les finances publiques a été développée dès 2004, mais mérite d’être renforcée, estime-t-elle. « La responsabilité de conduire l’action publique ne repose plus uniquement sur l’État et ses fonctionnaires. Elle incombe également à la société civile et au secteur privé. » Pour l’institut, il s’agit donc de faire connaître au grand public les décisions de gestion des finances publiques qui ont été prises par l’État, mais aussi d’informer les citoyens sur leurs droits et leurs obligations, notamment en matière fiscale. Pour cela, l’Institut des finances s’est doté d’un centre de documentation de 400 mètres carrés ouvert au grand public qui propose pas moins de 22 000 références en français, en anglais et en arabe sur le management, la comptabilité publique, le droit, les marchés publics, l’administration des politiques publiques… ainsi que de nombreux rapports, études et guides pratiques. L’institut a lui-même édité dix guides gratuitement à près de 250 000 exemplaires, le dernier traitant de l’impôt sur le revenu et les salaires.
La directrice travaille aussi au développement de formations certifiantes, qui représentent aujourd’hui moins de 10 % de l’offre. « Ces formations gratuites, qui permettent l’obtention d’un certificat officiel, sont très demandées, car elles conduisent souvent à une évolution de carrière importante », explique Lamia Moubayed Bissat, qui espère qu’elles représenteront au moins 20 % des formations proposées d’ici à cinq ans.
Une expansion qui justifie selon elle d’emménager dans un immeuble dédié, afin que l’Institut des finances devienne une véritable “maison de savoirs”, accessible au public et dotée d’espaces d’échange et d’interaction. « Les centres de formation ne peuvent pas fonctionner de façon isolée et servir uniquement l’État. Car s’il faut bien sûr servir les fonctionnaires dans l’amélioration de leurs compétences, au final, l’objectif est que les fonctionnaires servent mieux les citoyens. C’est toute l’importance de la bonne gouvernance publique. »
Un engagement pour le service public qui nécessite beaucoup de persévérance dans un pays tel que le Liban pour cette mère de deux enfants. « Il y a toujours des moments où l’on se demande si cela vaut la peine de passer tout ce temps, de dépenser toute cette énergie. Mais ma conviction personnelle reste jusqu’à maintenant intacte : l’équipe de l’institut a parfaitement conscience de ses limites, mais nous savons que sur le fond, notre mission est un travail fondateur, nécessaire et absolument vital pour l’avenir du pays. »
Il faut dire qu’elle n’a pas trouvé sa voie à la faculté d’agriculture de l’Université américaine de Beyrouth – choisie à pile ou face aux dépens de l’architecture. Au bout de quatre ans, elle se réoriente vers un cursus en économie, avec une spécialisation sur les questions de développement. Lorsque la jeune femme achève ses études, le Liban commence alors sa lente reconstruction, « une période passionnante car il y avait tout à faire », se souvient-elle. Après une expérience de trois ans dans un cabinet de conseil privé au Liban, elle décroche un poste de gestionnaire de projet au Programme des Nations unies pour le développement (Pnud). Sa mission : réhabiliter les entreprises publiques du pays. « À ce moment, j’ai eu un déclic et ai effectué mon premier vrai choix. J’ai compris que construire la paix passe obligatoirement par un État légitime politiquement, mais aussi et surtout par un État efficace et compétent. »
En 2000, Lamia Moubayed Bissat apprend que l’Institut des finances, créé quatre ans auparavant dans le cadre d’un protocole de coopération franco-libanais, cherche un nouveau directeur. Ce sera elle. Ce centre de formation et de documentation a notamment pour vocation de former les agents publics du ministère des Finances, mais aussi tous les agents de l’administration libanaise en charge des finances publiques. Sa première mission est de transformer le projet en institution publique autonome. Les financements français puis européens sont alors arrivés à leur terme et il s’agit de pérenniser l’institut en lui offrant un cadre légal, un statut, un budget, une mission et des moyens de travail. C’est chose faite en 2003. Treize ans plus tard, l’Institut des finances offre un catalogue de plus de 110 formations dans 11 domaines (gestion des finances publiques, comptabilité publique, fiscalité, douanes…), emploie 15 personnes (dont 80 % de femmes), collabore avec un réseau de 300 formateurs externes, et a permis à 3 405 fonctionnaires de se former en 2015. Il est doté d’un budget de fonctionnement annuel d’un million de dollars – un des plus faibles des institutions publiques, selon sa directrice, qui lui est entièrement alloué par le ministère des Finances. Des bailleurs internationaux, notamment la Banque mondiale, l’École nationale d’administration française, l’Organisation de coopération et de développement économiques, ou encore l’Institut arabe de planification du Koweït, financent en outre des ateliers, des conférences ou des cursus que l’Institut des finances offre désormais aussi à des non-Libanais.
Vers une meilleure information du citoyen
Au-delà de cette diversification régionale, rendue nécessaire par l’absence de politique de développement de l’administration publique libanaise en période de paralysie politique, Lamia Moubayed Bissat a choisi un autre axe stratégique : l’information du grand public.
Inscrite dans les statuts de l’institut depuis sa création, la mission de documentation du citoyen sur les finances publiques a été développée dès 2004, mais mérite d’être renforcée, estime-t-elle. « La responsabilité de conduire l’action publique ne repose plus uniquement sur l’État et ses fonctionnaires. Elle incombe également à la société civile et au secteur privé. » Pour l’institut, il s’agit donc de faire connaître au grand public les décisions de gestion des finances publiques qui ont été prises par l’État, mais aussi d’informer les citoyens sur leurs droits et leurs obligations, notamment en matière fiscale. Pour cela, l’Institut des finances s’est doté d’un centre de documentation de 400 mètres carrés ouvert au grand public qui propose pas moins de 22 000 références en français, en anglais et en arabe sur le management, la comptabilité publique, le droit, les marchés publics, l’administration des politiques publiques… ainsi que de nombreux rapports, études et guides pratiques. L’institut a lui-même édité dix guides gratuitement à près de 250 000 exemplaires, le dernier traitant de l’impôt sur le revenu et les salaires.
La directrice travaille aussi au développement de formations certifiantes, qui représentent aujourd’hui moins de 10 % de l’offre. « Ces formations gratuites, qui permettent l’obtention d’un certificat officiel, sont très demandées, car elles conduisent souvent à une évolution de carrière importante », explique Lamia Moubayed Bissat, qui espère qu’elles représenteront au moins 20 % des formations proposées d’ici à cinq ans.
Une expansion qui justifie selon elle d’emménager dans un immeuble dédié, afin que l’Institut des finances devienne une véritable “maison de savoirs”, accessible au public et dotée d’espaces d’échange et d’interaction. « Les centres de formation ne peuvent pas fonctionner de façon isolée et servir uniquement l’État. Car s’il faut bien sûr servir les fonctionnaires dans l’amélioration de leurs compétences, au final, l’objectif est que les fonctionnaires servent mieux les citoyens. C’est toute l’importance de la bonne gouvernance publique. »
Un engagement pour le service public qui nécessite beaucoup de persévérance dans un pays tel que le Liban pour cette mère de deux enfants. « Il y a toujours des moments où l’on se demande si cela vaut la peine de passer tout ce temps, de dépenser toute cette énergie. Mais ma conviction personnelle reste jusqu’à maintenant intacte : l’équipe de l’institut a parfaitement conscience de ses limites, mais nous savons que sur le fond, notre mission est un travail fondateur, nécessaire et absolument vital pour l’avenir du pays. »
Qui est-elle ? - Mariée, mère de deux enfants - 1967 : naissance à Beyrouth - 1990 : maîtrise en économie agricole et développement à l’AUB - 1995 : embauchée en tant que gestionnaire de programme au Pnud - 2000 : nommée directrice de l’Institut des finances - 2004 : nommée au grade de chevalier de l’ordre national du Mérite par décret du président de la République française. L’Institut des finances en quelques dates et chiffres - 1996 : création du projet de coopération franco-libanais - 2003 : la structure est transformée en institution publique autonome - 2006 : il prend le nom d’Institut des finances Basil Fuleihan - 15 employés - 300 formateurs externes - 3 800 sessions de formation organisées - Plus de 50 000 fonctionnaires formés en 20 ans dont 3 405 en 2015 - Un million de dollars de budget de fonctionnement annuel. |