Du fait de la baisse de fréquentation des commerces situés sur les artères où se déroulent les manifestations, du blocus et de la crise économique et financière, beaucoup d’entreprises ont connu une baisse significative de leur activité. Certains employeurs ont pris des mesures afin de réduire l’impact financier de cette crise, et ce, parfois, en violation des dispositions du code du travail libanais.
L’entreprise peut-elle modifier les horaires de travail et réduire les salaires en raison de la baisse d’activité ?
Des mesures conduisant soit à l’aménagement du temps de travail en fonction des nouveaux besoins de l’entreprise (activité partielle) accompagnés d’une baisse de rémunération des employés (de 20 jusqu’à 30 % de réduction de salaires) ou même des licenciements sans motifs valables ont été instaurés afin de compenser partiellement la perte de revenus.
Mais, le code du travail n’ayant pas prévu de telles dispositions, elles ne sont pas légales. L’employeur n’est pas autorisé à réduire la rémunération du salarié ni à mettre fin à son contrat de travail uniquement en raison d’une baisse d’activité de l’entreprise. L’article 50 du code du travail réglementant le licenciement est très clair : l’employeur doit trouver des raisons légales (fraude, violations graves au règlement intérieur, absences fréquentes sans excuses…).
Lire aussi: De la république marchande au capitalisme de rente, l’histoire d’un échec
Il reste cependant la procédure de licenciement collectif pour raisons économiques, prévue à l’article 50 du code du travail, mais celle-ci ne peut être mise en œuvre que dans le cadre d’une procédure très stricte afin d’éviter tout abus.
Quelles sont les conditions d’un licenciement pour raisons économiques ?
L’article 50 alinéa (F) autorise l’employeur à mettre fin à une partie ou à la totalité des contrats de travail dans son entreprise au cas où des circonstances économiques l’exigent. Dans ce seul cas, il peut être dispensé de l’obligation du paiement de l’indemnité de licenciement.
Ainsi, l’entreprise est tenue de notifier le ministère du Travail au moins un mois avant la résiliation des contrats. Elle doit également prouver son incapacité à garder les salariés et, par conséquent, la nécessité du licenciement. Enfin, elle doit établir avec le ministère un programme afin que ce processus tienne compte de l’ancienneté des salariés, de leurs compétences, de leur âge et de leur statut familial et social.
En outre, l’employeur doit s’engager à réintégrer les salariés licenciés dans l’entreprise quand celle-ci aura recouvré sa capacité financière. Il leur donne ainsi un droit de priorité par rapport à d’autres demandeurs d’emploi pour une période d’une année entière à dater de leur fin de service.
Lire aussi: Blocage des routes : les droits des salariés et ceux du patronat
Par ailleurs, lorsqu’une société informe, conformément à la loi, le ministère du Travail de son intention de licencier des employés pour raisons économiques, le ministère effectue une enquête afin de s’assurer que l’entreprise est effectivement en difficulté financière. En pratique, l’employeur devra produire des états financiers pour les trois dernières années écoulées.
Il convient également de noter qu’il est d’usage au ministère du Travail d’organiser une médiation entre l’entreprise en difficulté et un représentant des salariés visés par le licenciement afin de superviser cette opération. Cette procédure permet d’évaluer la situation financière réelle de l’entreprise et surtout d’essayer de proposer des alternatives au licenciement telles que la réduction des salaires ou des horaires de travail, la suppression des primes et autres avantages.
Lire aussi: Indemnités impayées: quel est le délai pour les réclamer après une démission ?
L’une des différences fondamentales entre le licenciement économique et le licenciement abusif est que, quelles qu’en soient les raisons, celui-ci est immuable, et ne donne lieu qu’à une indemnisation sans octroyer le droit du retour au travail, contrairement au licenciement collectif résultant des circonstances économiques qui donne à l’employé un droit de préférence pour le réembauchage dans l’établissement duquel il a été licencié.