D’ici au 25 mai, l’échéance du mandat du président Michel Sleiman, le Liban est censé élire son successeur. Parmi les scénarios envisagés, il y a aussi celui de l’absence d’élection, de même que celui de la reconduction du chef de l’État sortant – sous réserve d’une modification ad hoc de la constitution.
L’effervescence médiatique, politique et diplomatique accompagnant cette échéance contraste avec l’indifférence des Libanais. Il ne s’agit pas du désabusement qui touche les démocraties occidentales que le taux d’abstention record de la dernière élection municipale en France vient par exemple de traduire. Mais d’un détachement bien plus fort encore envers les institutions qui ne sont plus qu’un simulacre de démocratie. Le mot élection est totalement vidé de son sens : celui de refléter le choix des citoyens sur la base d’un programme.
Qui donc va choisir le nouveau président ? Formellement, un Parlement illégitime car sa prorogation est anticonstitutionnelle. Dans la réalité, de “grands électeurs” qui se situent bien loin des Libanais : les principaux étant l’Arabie saoudite et l’Iran. Toutes les analyses politiques du processus en cours y font référence comme une donnée de base. Sans que cela ne choque quiconque. Car en réalité le Liban en est arrivé à un stade où sa priorité est d’éviter de couler, alors que le bateau prend l’eau de toutes parts : des régions entières qui échappent au contrôle de l’État, des institutions gangrénées par la corruption et le clientélisme, la guerre en Syrie qui menace de changer l’équilibre démographique du Liban et de l’entraîner dans l’engrenage de la violence, etc.
Alors à d’autres les projets de démocratie, de liberté, de transparence, de développement, de croissance, d’équité sociale, etc. Le message adressé à tous les idéalistes est clair : taisez-vous.