Un projet de loi ciblant le Hezbollah, sa chaîne télévisée, et l’ensemble des banques commerciales et centrales « engagées volontairement » avec le parti libanais serait bientôt soumis à la chambre des représentants américaine.

Le « Hezbollah International Financing Prevention Act », soutenu par les représentants Mark Meadows, Brad Schneider et Ed Royce, président du comité des affaires étrangères pour le Moyen-Orient de la chambre, comporte quatre volets : le premier vise à resserrer l’étau autour du réseau financier du parti, par le biais d’une traque plus active des banques et des institutions ayant des liens avec le Hezbollah; le deuxième porte sur un listing des câbles satellitaires qui continuent d’abriter la chaîne Al-Manar, en vue de leur pénalisation ; les troisième et quatrième volets visent enfin à désigner respectivement le Hezbollah comme une organisation de narcotrafic ainsi qu’une organisation criminelle transnationale.

Si elle est adoptée, cette loi « n’aura pas de répercussions sur le secteur bancaire libanais ou sur l’économie locale », estime Makram Sader, secrétaire général de l’association des banques au Liban (ABL).

« Le système bancaire est prémuni contre toute éventuelle sanction, grâce aux mesures prises il y a deux ans par la Banque centrale, notamment la circulaire no. 126 relative aux activités des banques avec leurs correspondants à l’étranger », dit-il au Commerce du Levant.

L’article 1 de cette circulaire, datant du 5 avril 2012, enjoint les institutions opérant au Liban « d’appliquer strictement le règlement relatif au contrôle des opérations financières et bancaires pour la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, notamment avec les clients qui requièrent l’exécution d’opérations transfrontalières en passant par des banques ou institutions financières correspondantes ».

Quant à l’article 2 de la circulaire, il exhorte les établissements locaux à « traiter avec ces derniers (banques correspondantes, NDLR) conformément aux lois, règlementations, procédures, sanctions et restrictions adoptées par les organisations légales internationales ou les autorités souveraines des pays de ces correspondants ».

Le Hezbollah et des individus qui lui sont affiliées figurent déjà sur les listes américaines des organisations terroristes et de l’Office of Foreign Assets (OFAC).

« La circulaire de la Banque du Liban (BDL) faisait suite à une série de réunions entre de hauts responsables bancaires au Liban et des représentants du Trésor américain, au lendemain des accusations concernant la Lebanese Canadian Bank et sa liquidation », ajoute le secrétaire général de l’ABL.

En juin dernier, le Trésor américain avait accusé quatre libanais et trois institutions d’entretenir un réseau de trafic de drogue de plusieurs millions de dollars, en vertu du « Foreign Narcotics Kingpin Designation Act ».

Les quatre individus (Abbas Hussein Harb, Ibrahim Shibli, Mohammad Qasem Saleh et Hussein Ali Harb) auraient participé à ces activités en collaboration avec Ayman Joumaa, dont le nom était au cœur de l’affaire de la Lebanese Canadian Bank, accusée en 2011 de blanchiment d’argent au profit du Hezbollah.

Ce dernier avait transféré plus d'un million de dollars vers un compte appartenant à Abbas Hussein Harb, qui vit en Colombie. L’opération aurait été couverte par Ibrahim Shibli, directeur de la Banque Fenicia à Abbassiyah, une localité au Sud-Liban, selon des informations du US Treasury Department, citées par le quotidien Annahar.

Ce nouvel épisode avait soulevé des inquiétudes au sein de l’administration américaine concernant la poursuite d’opérations illicites par l’intermédiaire du secteur financier libanais, en dépit des mesures prises par les autorités locales.

« Certaines accusations américaines se basent sur des indices sans preuves tangibles (…) », tempère Makram Sader. « Les activités des banques locales sont totalement conformes aux anciennes et nouvelles directives concernant le blanchiment d’argent », assure-t-il.

En outre, les banques locales et internationales sont désormais de plus en plus vigilantes. « Une seule opération suspecte d’un million de dollars suffit pour que l’image de la banque soit détruite, en sus des pertes financières qui peuvent s’élever à plusieurs centaines de millions de dollars», ajoute-t-il.

En juin 2013, la Lebanese Canadian Bank a accepté de verser 102 millions de dollars aux autorités américaines pour échapper aux poursuites judiciaires, après que les autorités aux Etats-Unis eurent saisi 150 millions de dollars appartenant à la banque en août 2012.