Un article du Dossier

Automobile : un marché à la peine malgré la stabilité des volumes

Les concessionnaires de voitures neuves s’inquiètent de l’impact sur le secteur de deux projets de loi en discussion au Parlement. Sous la houlette de l’Association des importateurs d’automobiles (AIA), ils mènent un intense lobbying auprès des parlementaires pour obtenir leur abandon.
Première cible : la probable augmentation des taxes sur les ventes de voitures, envisagée comme l’un des moyens de financer la nouvelle grille des salaires de la fonction publique (voir Le Commerce du Levant n° 5640). Actuellement, les ventes de voitures sont soumises à trois types de taxes : des droits de douane établis par tranches sur la valeur commerciale du véhicule (20 % pour la tranche inférieure à 13 270 dollars et 50 % au-dessus), les frais d’enregistrement (7 % du prix de vente) et la TVA (10 %). Le projet gouvernemental étudié au Parlement prévoit de relever la TVA à 15 % sur les véhicules neufs et usagés, ainsi que leurs pièces de rechange. Une autre piste consisterait à appliquer ce nouveau taux aux seuls véhicules de luxe, sans que cette catégorie soit encore précisément définie. « C’est une aberration : cela va accentuer la ruée vers les petites voitures et réduire encore les parts de marché du luxe », s’insurge Nabil Bazergi. « La chute de notre chiffre d’affaires engendrée par la hausse de la taxation se traduira par une réduction des effectifs », alerte Assaad Dagher Hayeck. L’AIA met en avant des projections internes estimant qu’une telle hausse de la TVA entraînerait une baisse de 30 % des ventes. « Par conséquent, au lieu d’augmenter les recettes fiscales, cette mesure devrait les réduire d’environ 180 millions de dollars, selon nos calculs », affirme Sélim Saad, conseiller à l’AIA. Il poursuit : « En 2011, près de 40 % des véhicules en circulation n’ont pas payé la mécanique. Selon nos estimations, si l’État s’assure de sa bonne collecte et lutte efficacement contre la non-immatriculation des voitures étrangères en admission temporaire qui circulent sur le territoire au-delà du délai autorisé de six mois, il pourrait récupérer plus de 120 millions de dollars. » La possible régularisation des véhicules diesel constitue l’autre motif de courroux des concessionnaires. Confronté aux hausses du prix de l’essence, le Parlement examine un projet de loi portant sur l’autorisation d’importer des véhicules fonctionnant au gaz naturel compressé (GNC) et au diesel répondant aux normes euro 5 (voir Le Commerce du Levant n° 5633). Outre cette disposition, qui concerne les véhicules neufs et d’occasion de moins de quatre ans d’ancienneté, le texte prévoit également des incitations fiscales pour les transports collectifs adoptant ces nouvelles motorisations et la possible transformation in situ des motorisations sous le contrôle d’un organisme étatique. Or, longtemps privilégié dans certains pays d’Europe pour sa consommation moindre sur les longues distances et ses faibles taux de rejet de CO2, le diesel suscite désormais la polémique du fait de ses émissions de particules fines, considérées comme cancérigènes par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). « Même si la législation impose la présence d’un pot catalytique et d’un filtre à particules, rien n’empêchera l’automobiliste de les enlever pour réduire les coûts d’entretien…», objecte Sélim Saad. À quelques exceptions près, la plupart des concessionnaires suivent cette ligne de refus, parfois même alors que les marques qu’ils commercialisent sont très représentées dans ce type de motorisation : « Les gains du diesel en termes de consommation ne sont pas très importants sur les petites routes, comme celles du Liban, tandis qu’en parallèle la plupart des constructeurs développent de petits moteurs à essence turbocompressés qui consomment de moins en moins. Compte tenu de l’absence de contrôle, le coût sanitaire pour le pays me paraît supérieur aux avantages attendus », résume Pierre Heneiné. Quant à l’autorisation des moteurs fonctionnant au GNC, la pierre d’achoppement se situe là encore au niveau des contrôles étatiques. « Il y a déjà des conducteurs qui installent de façon artisanale des bonbonnes de gaz domestiques, très différentes de celle requises, et échappent à tout contrôle technique. Les risques d’accidents ne sont pas à négliger », avertit Sélim Saad.

dans ce Dossier