Le souk du dimanche se porte bien, à en juger par l’affluence des commerces en tout genre qui se répartissent une surface de 7 000 mètres carrés. Parking gratuit assuré.

échoppes débordent de l’espace qui leur est
officiellement réservé pour envahir le parking.
Élie, propriétaire d’une épicerie à Dekwané, y
étale par exemple légumes et fruits sur une
surface de 20 mètres carrés. Il doit louer
l’emplacement beaucoup plus cher qu’à l’intérieur
: « 100 000 livres pour le week-end. »
À quelques pas de lui Mohammad vend,
quant à lui, les survêtements qu’il fabrique
dans son usine de Ouzaï. Il paie son stand
75 000 livres.
Si Mohammad et Élie acceptent des coûts
aussi élevés, c’est que la clientèle est au rendez-
vous. Le souk accueille environ 30 000
visiteurs tous les week-ends, selon le directeur.
Quatre-vingts pour cent d’entre eux sont
des Libanais, aux revenus généralement
modestes, le reste étant des étrangers résidant
dans la région de Beyrouth, dit-il.
Les bénéfices semblent au rendez-vous à en
juger par la diversité des marchandises. De
l’utile à l’accessoire, de l’électroménager aux
jouets, en passant par les vêtements, ou
encore les victuailles, l’offre est étonnante.
Crème curative syrienne, musique éthiopien-
D ans le paysage de la distribution
beyrouthine, l’arrivée des grands
centres commerciaux fait parfois
oublier que ce type d’espaces marchands
existe sous d’autres formes, à l’aspect
moins moderne. Sous ses airs de déglingue
sociale Souk el-Ahad, le marché populaire
de Beyrouth, se porte même mieux que
beaucoup d’autres surfaces marchandes.
Situé à l’entrée nord-est de la ville, il dispose
de son parking sous le pont du Fleuve
de Beyrouth. Quelque 500 commerçants se
répartissent les 7 000 mètres carrés
concédés depuis 1994 par le ministère de
l’Énergie et de l’Eau. Leur activité se poursuit
tous les samedis et dimanches, malgré
le litige judiciaire qui oppose le ministère et
la municipalité de Sin el-Fil à propos de la
propriété du terrain.
Le “marché du dimanche” est un élément
incontournable du paysage urbain, pourtant,
son économie fonctionne selon des
règles informelles. Les commerçants se
sont organisés en coopérative il y a seulement
trois ans. Celle-ci est associée à une
entreprise privée chargée d’organiser et
d’entretenir les lieux. Pour intégrer la
coopérative, chaque commerçant a dû présenter
un casier judiciaire vierge, un certificat
de domiciliation, une fiche d’état civil
et deux photos passeport, affirme le directeur
du marché, Tony Chedid.
Les adhérents louent le mètre carré à 1 500
livres pour un week-end. L’ensemble des
baux rapporte donc l’équivalent de 7 000 dollars
par semaine, soit 28 000 dollars par
mois. Si le directeur communique bien volontiers
ces chiffres, il feint d’ignorer d’autres
flux apparemment non négligeables. Les
ne… tous types de besoins sont satisfaits
dans un périmètre réduit. Une télécommande
est vendue 5 000 livres, piles incluses.
Hors de tout contrôle, les produits de contrefaçon
sont légion, que ce soit des parfums ou
des DVD.
Contrairement à certaines idées reçues,
l’échelle des prix n’est pas forcément au plus
bas. Harout propose par exemple des portables
à 800 dollars. Propriétaire d’une
enseigne à Bourj Hammoud, il préfère fermer
boutique du samedi au lundi matin pour s’installer
à Souk el-Ahad. Le commerçant refuse
de communiquer l’ampleur de ses ventes ou
le montant de ses bénéfices. Le même silence
est de mise dans toutes les échoppes. Seul
le directeur, Tony Chedid, avance un chiffre :
les bénéfices du Souk ne dépasseraient pas
les 2 500 000 livres par semaine.
Une affirmation qui ne convainc pas le
maire de Sin el-Fil, Nabil Kahalé, selon qui
les ressources officielles et officieuses du
marché sont plus importantes. À la place
de Souk el-Ahad, qu’il qualifie d’illégal, il
souhaite créer un marché municipal.