PDG de ComScore, une société spécialisée dans la mesure d’audience sur Internet, le Libano-Américain Magid Abraham a été distingué lors du dernier Forum économique mondial de Davos comme l’un des pionniers technologiques de 2007.

Un PDG, simple et accessible, qui
enchaîne patiemment les rendezvous
et reçoit en pull, sans cravate ni
costume. Homme d’affaires heureux, Magid
Abraham est convaincu que 2007 sera son
année et celle de sa société, ComScore, un
leader de la mesure d’audience sur Internet.
Celui qui a grandi dans le sud de la Békaa, où
il rêvait de devenir physicien nucléaire, a été
désigné comme l’un des 47 pionniers technologiques
2007 lors du Forum économique
mondial de Davos.
ComScore allie « mathématiques, technologie
et flair marketing », dit-il. Créée en
1999 aux États-Unis, en partenariat avec
Gian Fulgoni, la société étudie les
audiences Internet grâce à un panel de
deux millions de personnes réparties à travers
la planète. « ComScore est la seule
société à pouvoir donner l’audience mondiale
d’un site à un instant voulu. Nous
recensons toutes les pages visitées par les
internautes. Nos échantillons de panélistes
couvrent 171 pays quand nos
concurrents ne fonctionnent que sur 10
pays. » Les données récoltées permettent
d’apporter des informations socio-démographiques
précises (sexe, âge, catégorie
professionnelle, etc.) Ce qui permet aux
agences médias d’affiner le planning de
leurs campagnes publicitaires sur le Web.
C’est ce que Abraham appelle un « intelligence
business » : il faut appréhender
le comportement d’un internaute (quels
sont les autres sites qu’il a tendance à
visiter) pour cibler les offres commerciales
les plus adaptées. ComScore a, par
exemple, diffusé en février dernier, à l’occasion
de la Saint-Valentin, une mesure
d’audience des sites de rencontres en
France, aux États-Unis et au Royaume-
Uni. Il en résulte que les internautes
consultent ces catégories de sites (Meetic
ou DatingDirect) principalement en été.
Les Français avec 22 % d’internautes de
plus de 15 ans en sont les plus friands. La
société précise néanmoins que la mesure
ne prend pas en compte les ordinateurs
publics comme ceux des cybercafés.
En 2006, ComScore a réalisé un chiffre
d’affaires de 66 millions de dollars, soit
une hausse de 32 % par rapport à 2005.
Magid Abraham table sur une croissance
similaire pour 2007. « Nous suivons la
croissance Internet et projetons des résultats
aussi performants que l’année dernière.
» ComScore compte bien saisir les
opportunités qu’offre l’émergence du Web
de la deuxième génération, dit 2.0 : l’internaute
y devient un producteur du contenu
et non plus un simple spectateur.
« Nous inventons de nouvelles grilles de
mesures qui sont plus adaptées aux nouvelles
technologies. » L’avenir de
ComScore réside en particulier dans
l’Internet mobile, sur les téléphones por-
Un panel de deux millions
d’internautes
ComScore est partout et déchiffre
tout. C’est en substance le fonctionnement
de la société qui n’emploie
que 360 collaborateurs pour
un panel de deux millions d’internautes.
Ces derniers ont accepté
que la société installe à distance un
logiciel dans leur ordinateur pour
suivre et mesurer leurs comportements
et leurs habitudes sur le
Web. Les données sont recoupées
pour donner des statistiques précises.
Pour les internautes (certains
sont rémunérés) rien ne change, ils
restent libres de leurs pratiques.
Cette base de données a convaincu
des groupes comme AOL,
Microsoft, Yahoo!, ESPN, FoxSports,
Nestlé et nombre d’agences de
publicité qui sont parmi les principaux
clients de ComScore.
79 - Le Commerce du Levant - Mars 2007
tables notamment, avec un impact bien audelà
des États-Unis. Le nombre des utilisateurs
potentiels d’Internet passera de 700
millions à un milliard d’ici à dix ans. Autant
de comportements et de mouvements à
suivre, à mesurer et à déchiffrer pour les
stratégies des multinationales.
La distinction obtenue à Davos va accélérer
le développement de l’entreprise,
notamment en Allemagne, en France, puis
en Inde et en Chine. « Au Moyen-Orient, il
n’y a pas de compagnies internationales
qui demandent ce type de données,
excepté en Israël. » Des panélistes sont
recrutés au Liban et en Jordanie pour les
mesures mondiales, mais la région n’est
pas « une pièce majeure pour le moment »
du dispositif de ComScore.
Magid Abraham tient
à son identité
Magid Abraham est avant tout un
businessman. Il préfère évoquer ses
affaires au lieu de se mettre luimême
en avant. Il concède toutefois
certaines confidences personnelles.
Il dit avoir tenu à conserver
la double nationalité, américaine et
libanaise. On devine que pour lui
le Liban est important. Il l’a quitté
à 17 ans, en 1975, mais y revient
tous les deux ans, seul ou en famille.
C’est en France qu’il a commencé
son parcours universitaire, à
Polytechnique. Après un MBA
“Masters of Sciences in
Management” et une thèse de
doctorat sur les sciences informatiques
à la Massachusetts Institute
of Technology, il a intégré à 23
ans une entreprise de logiciels de
marketing. À 26 ans, il est embauché
à l’IRI, l’un des leaders mondiaux
des études de marché, et en
devient le patron en 1993. Deux
années plus tard, Magid Abraham
lance Paragren Technologies Inc.,
une société spécialisée dans des systèmes
de management des relations
client pour le marketing stratégique.
En 24 mois, la société réalise un
chiffre d’affaires de 27 millions d’euros.
Il la vend, tout en en conservant
la direction pendant deux ans, puis
crée ComScore en 1999.