Une deuxième édition du quotidien al-Akhbar, al-Akhbar Qatar, va être lancée dès septembre prochain. 65 % du contenu sera identique à celui produit au Liban. « Qatar Media, l’agence publicitaire exclusive des médias du pays, prévoit un revenu d’un million de dollars la première année, qui devrait progresser ensuite. L’impression et la distribution ne coûteront que 500 000 dollars. C’est donc un bénéfice net pour al-Akhbar », assure la directrice générale, Hala Bejjani, car la seule dépense supplémentaire consistera en l’embauche de quatre personnes à Beyrouth et de deux au Qatar. Pour le quotidien, ce développement est avant tout un moyen de faire rentrer de l’argent dans les caisses. « Au Liban, nous avons clairement un agenda politique, mais au Qatar il est uniquement commercial », ajoute Bejjani.
Près de deux ans après son lancement, al-Akhbar affiche un déficit de 2,5 millions de dollars. « C’est un peu moins que prévu, précise Bejjani. Un nouveau titre a besoin de plusieurs années pour atteindre l’équilibre. » L’investissement initial, de cinq millions de dollars, était prévu pour une année. Il aura finalement fait vivre le quotidien 18 mois. La moitié de ce budget est consacrée à la masse salariale, le reste couvre les coûts d’impression (assurée par al-Kifah al-Arabi, seule en mesure de produire un format berlinois), de distribution (réalisée par al-Awael) et de fonctionnement.
Les recettes publicitaires, estimées initialement à 600 000 dollars, ont finalement atteint 750 000 dollars. Al-Akhbar a d’abord hésité à confier sa publicité à une régie externe, par peur de perdre son indépendance éditoriale. En juillet dernier, le quotidien a néanmoins signé un contrat avec la société TreeAd et son équipe commerciale publicitaire a alors rejoint celle de l’agence. Au vu des résultats positifs de cette collaboration, al-Akhbar et TreeAd envisagent aujourd’hui de créer une joint-venture, destinée à accompagner l’expansion du quotidien dans le Golfe où la régie est déjà implantée.
Les ventes, elles, s’élèvent à 1,5 million et le titre revendique entre 10 000 et 12 000 acheteurs en fonction de l’actualité et 2 700 abonnés. Des chiffres beaucoup moins importants que ceux affichés par ses concurrents directs – qui n’hésitent pas à parler de 40 000 ou 50 000 lecteurs –, mais sans doute beaucoup plus proches de la réalité. La rédaction, confiée au jeune Khaled Saghié depuis le décès de Joseph Samaha, compte près de 80 personnes.
Dès le départ, al-Akhbar a construit son développement en tenant compte des aléas économiques et du déclin du marché publicitaire de la presse au Liban. « L’idée de produire uniquement un quotidien imprimé est absurde, affirme Bejjani. Nous cherchons à produire des nouvelles, mais le support écrit n’est que l’un des supports. » Al-Akhbar mise, à long terme, sur Internet et le multimédia. Le titre a ainsi investi 45 000 dollars dans le logiciel RapidBrowser qui permet aux journalistes d’écrire des articles, mais aussi de produire des sons ou des vidéos. « La publicité sur Internet ne s’est pas encore développée au Liban, mais dans le reste du monde elle progresse de 100 % chaque année », constate Bejjani.
Outre sa version al-Akhbar Qatar, le quotidien table aujourd’hui, pour combler son déficit, sur une deuxième stratégie : la syndication, ou l’échange de contenus avec d’autres médias. « Il s’agit d’utiliser nos journalistes et nos ressources humaines pour fabriquer d’autres contenus que celui du quotidien », explique Bejjani. Le journal danois Information, qui n’a pas de correspondant au Liban, a déjà acheté, pour 30 000 dollars, des articles d’al-Akhbar traduits et retravaillés. Des quotidiens suisse et hollandais seraient également intéressés par ce type de service. La chaîne de télévision BBC pourrait elle acheter prochainement des vidéos réalisées par les journalistes d’al-Akhbar, en cas d’actualité chaude.
Al-Akhbar, né en juillet 2006, a été fondé par les journalistes Joseph Samaha et Ibrahim al-Amine. Deux hommes d’affaires sont les premiers à soutenir le projet, en déboursant 100 000 dollars : Fady Agha, un Libanais sunnite qui vit aux États-Unis, et l’Irako-Libano-Arménien Vahan Boghossian. Un groupe de Libanais basés à Londres et réunis autour de l’économiste Hassan Khalil apportent deux millions supplémentaires. Ils sont les principaux investisseurs et propriétaires du journal. « Nous sommes farouchement de gauche, la moitié de notre rédaction est communiste. Nous croyons à la résistance comme à un droit pour tous et nous essayons de jeter un pavé dans la mare… D’ailleurs, nous sommes critiqués de tous les côtés ! Mais avant tout, nous sommes des journalistes professionnels. Notre défi est de ne pas être le journal de l’opposition, mais un journal d’opposition », résume Bejjani.
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