Jamil Molaeb a pour lui la sagesse que confèrent les années. Artiste prolixe surtout connu pour sa peinture, il est en constante recherche de beauté et d’émerveillement.

Jamil Molaeb ne se rappelle pas d’un jour où il n’a pas dessiné : « Déjà au brevet, on disait de moi que j’étais un artiste, mais jusqu’à maintenant je n’y crois pas », s’amuse celui qui avoue peindre comme il mange, c’est-à-dire tous les jours (et même pendant les interviews).
Jamil Molaeb est à la recherche constante de la beauté. « Je veux peindre la sensation d’émerveillement face à elle. »
S’il est surtout connu pour ses peintures minimalistes qui lui permettent de « chercher la beauté qui n’est pas présente dans la nature », l’homme est un véritable touche-à-tout, entre peintures abstraites, peintures pittoresques, mosaïques, sculptures, gravures, etc. « J’utilise des moyens et des styles différents, car au Liban le temps et les couleurs de la nature changent chaque jour. »
Né à Beysour dans le Chouf en 1948, cet amoureux de son pays est diplômé de l’Institut des beaux-arts de l’Université libanaise en 1972, où il suit les cours de Chafic Abboud et côtoie Paul Guiragossian. Il poursuit ses études à l’École nationale des beaux-arts d’Algérie en 1973 : « Je voulais aller à l’étranger pour apprendre à dessiner les femmes, les nus et la nature », témoigne-t-il. En 1974, il expose à Dar el-Fan à Beyrouth : « Le peintre Aref Rayess, qui a été mon mentor et ami, a proposé de transformer la maison de Janine Rubeiz en galerie ; Chafic Abboud, Yvette Achkar et moi-même y avons exposé en premier. » Dans les années 1980, Molaeb passe cinq ans aux États-Unis, au Pratt Institute de New York et à l’Université de Ohio, où il complète un master et un doctorat, et où il découvre la sculpture. « Mon expérience américaine m’a débarrassé de mon complexe d’infériorité vis-à-vis de la culture occidentale et m’a donné confiance en moi », témoigne-t-il.
Il rentre au Liban pour peindre son pays : « Il y a une atmosphère de liberté ici qui est stimulante, les gens sont gentils, la femme libanaise est belle, elle m’inspire. »
Il vit principalement de l’enseignement à la LAU et à l’Université libanaise : « J’aime enseigner et découvrir des talents. Oussama Baalbaki, Ayman Baalbaki, Taghreed Darghouth, Greta Nawfal, Hassan Badawi ont tous été mes élèves. »
Éternellement coiffé de son béret, l’artiste habite dans son village natal, mais descend quasiment tous les jours à Beyrouth pour rencontrer ses amis poètes, écrivains, musiciens et autres. Il y discute notamment avec Nazih Khater, le critique d’art du Nahar, dont il dit : « Il a simplifié ma vision, m’a permis de savoir ce qui est important. » Très attaché à sa liberté, il voit en l’art une recherche du sens de la vie, celle d’un corps qui manque. « La peinture est un miroir qui empêche les religions de m’embrouiller la tête », affirme-t-il.
Représenté par la galerie Janine Rubeiz depuis 1993, Jamil Molaeb expose régulièrement depuis 1996. Ses toiles minimalistes, qui rencontrent plus de succès que ses scènes de village, sont adjugées dans les 20 000 dollars en ventes aux enchères en 2011. Son record de vente est à 48 000 dollars pour “Fas”, vendue par Ayyam Dubaï. « Cela m’encourage à continuer et me permet d’avoir des projets de long terme », se réjouit-il. Il travaille notamment à la création d’un musée pour ses œuvres, actuellement en construction à Beysour, bien qu’il avoue une certaine inquiétude : « Ce musée me fait sentir que je suis dans l’histoire, dans le passé. » Il prépare également une exposition en 2013 à la galerie Janine Rubeiz.