Le 20e Salon du livre francophone de Beyrouth a été bénéfique pour libraires et éditeurs, en raison d’une bonne fréquentation et d’un soutien financier de l’Institut français du Liban. Mais la formule est amenée à se renouveler à l’avenir.

« Le bilan du dernier Salon du livre est positif, estime Aurélien Lechevallier, directeur de l’Institut français du Liban, principal organisateur de l’événement. Nous avons constaté une augmentation de l’affluence de l’ordre de 10 %, avec au moins plus de 50 000 visiteurs, dont plus de 20 000 écoliers. C’est d’autant plus remarquable que le contexte était très délicat, avec l’assassinat du général Wissam el-Hassan une semaine plus tôt. » Organisé du 26 octobre au 4 novembre, le cru 2012 a été globalement correct pour libraires et éditeurs. « Étant donné les circonstances, on s’attendait à une chute du chiffre d’affaires, mais au final les ventes sont restées stables par rapport à l’année dernière », explique Émile Khoury, PDG de Virgin Megastore. « Nous avons constaté une hausse de plus de 30 % des ventes par rapport à l’année dernière, et les lecteurs ont beaucoup participé à nos événements », affirme Tania Hadjithomas Mehanna, directrice des éditions Tamyras. À la Librairie Antoine, le son de cloche est nuancé : « Nos transactions ont baissé de  8 % cette année et notre chiffre d’affaires de 10 %, mais une grande partie de cette baisse s’explique par la chute de l’euro », explique Sami Naufal, le PDG de la Librairie Antoine.

Subventions françaises

Si la plupart des exposants s’estiment satisfaits de l’édition 2012, c’est en raison d’un coup de pouce de l’Institut français du Liban, qui a financé à hauteur de 25 % les plus grands stands. « Nous avons bénéficié de conditions spéciales qui ont fait toute la différence avec les autres années où nous étions ric-rac », affirme Sami Naufal. Le prix de 66 dollars le m², déjà négocié à des tarifs favorables dans le cadre d’un accord pluriannuel avec le BIEL sur trois ans (2011-2013), a donc été diminué de près du tiers. « C’était une mesure exceptionnelle pour la vingtième édition du Salon du livre », explique Aurélien Lechevallier. L’Institut français n’a pas déboursé davantage que les autres années – avec une participation financière d’environ 100 000 dollars sur un budget total de 300 000 dollars –, mais a pu compter sur le soutien plus important de sponsors comme la BankMed ou le fournisseur de services Internet IDM. Cette année, l’institut, qui a pris en charge l’organisation de A à Z, n’a pas eu recours à la société Promofair, spécialisée dans l’événementiel, comme lors des dernières éditions. La ristourne financière était une manière de contenter les libraires, fragilisés par le contexte économique. Une partie d’entre eux avait exprimé son souhait d’organiser un salon tous les deux ans, et non chaque année, afin de limiter les pertes. « Se mobiliser dix jours pour le salon est rarement une bonne opération commerciale : cela suppose de déplacer une librairie de plusieurs centaines de mètres carrés, cela engendre des frais techniques et de personnel élevés. Et ce que l’on gagne au salon, on le perd peut-être ailleurs dans nos autres points de vente », explique Sami Naufal. « Chaque année, le salon est menacé, car les éditeurs français ne font aucun effort financier pour nous soutenir, alors que nous faisons de la publicité pour vendre leurs ouvrages. Ils ont tendance à considérer les marchés francophones comme le Liban acquis », note Émile Khoury. Peu de maisons d’éditions françaises sont en effet venues signer des accords avec des partenaires libanais, seuls quelques délégués commerciaux s’étant déplacés à Beyrouth. D’où la volonté de trouver une formule plus intéressante pour les exposants, afin que le salon ne soit pas juste un salon de libraires, mais un véritable salon d’éditeurs. « Il faudrait davantage de professionnalisation, comme dans la plupart des autres salons, avec l’implication d’éditeurs français et francophones, en particulier pour la vente de droits de traduction », soutient Georges Tabet, président du syndicat des importateurs de livres, partenaire dans l’organisation du salon. Deux autres pistes sont aussi à l’étude : une internationalisation plus grande – avec la participation de davantage d’exposants étrangers – et une ouverture aux nouvelles technologies (livre numérique, tablettes…). « Nous réfléchissons dès aujourd’hui à une formule qui équilibre plus la dimension culturelle, commerciale et professionnelle », assure Aurélien Lechevallier.