Banque de détail ou d’affaires, banque de services ou de placement, agence ou filiale, les banques françaises présentes au Liban développent des vocations particulières pour sortir de l’ordinaire.

«Nous ne pouvons pas nous comparer aux banques libanaises qui ont 30 ou 40 branches, déclare Thierry Gigant, responsable de la clientèle des particuliers et du Private Banking à la BNPI-Liban. La Banque Nationale de Paris Intercontinentale n’est pas une banque de détail, mais une banque d’affaires de moyen et haut de gamme». Succursale de la BNPI du groupe BNP-Paribas, BNPI-Liban propose trois types d’activités : les services, le conseil et le placement.
Conseil et placement, voilà ce que retient le Crédit Lyonnais, filiale à 100 % du groupe français du même nom. «L’activité de la banque se déploie sur 3 axes : les grandes entreprises, le financement de projets avec services de conseil et la gestion d’actifs, explique Antoine Koniski, directeur commercial au Crédit Lyonnais. En fait, il existe deux choix pour une banque étrangère : ou bien se positionner en tant que banque spécialisée dont le but est de répondre aux besoins de certaines niches dans le marché, ou alors acheter une banque locale et devenir une banque de détail avec tout ce que cela englobe comme risques et coûts».
Tout en exerçant une activité de banque d’affaires, la Banque Libano-Francaise, filiale à 51 % d’Indosuez (devenu aujourd’hui le Crédit Agricole Indosuez), a choisi d’être également une banque de détail avec ses 22 agences réparties sur le territoire libanais. “La cible de la BLF est la clientèle d’affaires, puisqu’elle s’adresse surtout aux entreprises, explique Bernard Vernhes, son directeur général. Mais, par souci de s’implanter davantage sur le marché libanais, notre objectif actuel est d’apporter à nos clients tous les services disponibles dans d’autres banques locales».

Servir autrement

C’est dans cette perspective que la BLF compte augmenter le nombre de ses agences pour passer de 22 à 28, puis à 33. Elle a racheté, à cet effet, le réseau d’agences du Crédit Lyonnais. Dès septembre, elle lancera également un produit d’assurance vie et à partir de 2001 mettra en place un service d’ATM. «Il est vrai que la banque accuse un retard par rapport à ses concurrents en matière de services, avoue Bernard Vernhes. S’étant contentée d’être une banque traditionnelle d’affaires, sûre et crédible, la BLF a finalement manqué de séduction. Cela n’a pas affecté nos chiffres d’affaires, mais notre clientèle s’en est plainte. Toutefois, il était important pour nous de bâtir une logistique solide avant de proposer tout nouveau produit». Pour conduire cette opération, la BLF bénéficie, évidemment, de l’appui technologique du Crédit Agricole. Ce soutien se traduit par une activité de conseil et de développement en matière informatique.
Si la BNPI a, quant à elle, développé son secteur de services depuis quelques années, c’est avant tout dans un souci de servir sa clientèle d’affaires. «Nos services multiples (chèques, cartes bancaires, Internet bancaire, etc.) ne sont pas des outils de prospection, déclare Thierry Gigant. Le but est de bien servir nos clients actuels en leur offrant les meilleurs services disponibles sur le marché. Toutefois, au Liban, il n’est pas toujours possible de payer au moyen de cartes bancaires. Certains commerçants se méfient toujours de la commission sans se rendre compte des avantages qu’offre un tel service».
Le service d’Internet bancaire, BNPI Net, qui existe depuis 1999 permet, en plus de la consultation des comptes, de faire des virements. «Pour cela, nous disposons à l’heure actuelle du système de cryptage le plus sûr dans les conditions actuelles de la technologie», annonce-t-il à tous ceux qui pourraient s’en méfier également.
Alors que la BNPI et la BLF essayaient chacune à leur manière de développer leurs services, le Crédit Lyonnais a vendu toutes ses agences (12 au total), confirmant ainsi sa volonté d’être au Liban avant tout et surtout une banque d’affaires libanaise et régionale. «En centralisant nos affaires en un seul point (leurs bureaux à Achrafieh), explique Antoine Koniski, nous avons considérablement réduit nos coûts, ce qui nous permet de proposer la meilleure tarification à nos clients. Ces clients qui nous viennent également de la Syrie, puisque nous couvrons ce pays à partir d’ici. Nos trois bureaux de représentation à Amman, Téhéran et Abou Dhabi nous ramènent aussi des clients au siège libanais».

À la recherche
d’une rémunération perdue

Si le Crédit Lyonnais, la BLF et la BNPI optent chacun pour une stratégie différente au niveau des services, leur terrain d’entente et leur point fort, en tant que banques internationales, semblent se situer au niveau de la gestion du patrimoine.
«Les Libanais investissent dans les titres pour 3 raisons, explique Antoine Konisky. D’abord, les investissements locaux ne sont plus intéressants depuis 5 ans. Les taux d’intérêt sur les bons du Trésor et la Bourse n’offrent pas beaucoup de perspectives. Ensuite, les clients et chefs d’entreprise utilisaient leur liquidité pour développer leur activité. Or, ils préfèrent actuellement attendre que la situation intérieure se clarifie. Entre-temps, ils peuvent investir dans le moins risqué et le plus rémunérateur, à savoir les titres. Enfin, les marchés boursiers européens sont de bons produits offrant de bonnes perspectives».
“Les Libanais étaient très focalisés sur les dépôts, raconte Thierry Gigant. Mais, petit à petit, la clientèle se tourne vers d’autres formes d’investissement, à travers les SICAV (fonds communs de placement), Eurobonds, le trading d’actions, et bénéficie grâce à la BNPI d’une gestion professionnelle de ses avoirs».
«Le Libanais ciblait le dépôt à court terme, approuve Bernard Vernhes. Il voulait avoir toujours à sa disposition de l’argent liquide. Mais cette période est révolue. En outre, les dépôts sont moins rémunérateurs sur le long terme que la Bourse».

Monts et merveilles
des titres

«Il est facile de vendre au client en lui promettant monts et merveilles, mais il s’agit de lui expliquer l’intérêt des investissements qu’il opère, souligne cependant Thierry Gigant. Nous ne sommes pas de simples brokers, nous travaillons sur le long terme. Dans un marché volatile, il faut faire attention là où on met les pieds, d’où la nécessité de prendre conseil auprès d’une banque. L’implantation internationale de BNP-Paribas (plus de 700 implantations dans 83 pays), lui permet de donner des conseils à ses clients libanais comme s’ils étaient sur une place financière mondiale. Quand nous faisons de la gestion de patrimoine, nous sommes reliés au siège à Paris, qui nous communique toutes ses préconisations concernant les investissements».
«Le rôle d’une banque dans les investissements boursiers, c’est d’être un conseiller, confirme encore Bernard Vernhes. Il ne s’agit pas seulement d’investir, mais de bien investir». La société de courtage et de gestion de titres du groupe Crédit Agricole au Liban est le Crédit Agricole Indosuez. Cette société propose également ses services de gestion de patrimoine à la clientèle privée de la BLF. Le Crédit Agricole Indosuez ne travaille actuellement que sur la Bourse française, mais s’attelle à élargir ses activités pour se lancer également sur les Bourses américaines.
En matière de gestion d’actifs, le Crédit Lyonnais travaille surtout au niveau institutionnel. À ce titre, la banque signe des contrats avec des banques locales qui distribuent les fonds communs de placement proposés par le Crédit Lyonnais. «Nous avons des fonds adaptés à chaque mentalité et à chaque profil de clientèle», explique Antoine Koniski. L’avantage du Crédit Lyonnais, ainsi que celui des deux autres banques, c’est, finalement, de proposer une expérience, une expertise et un circuit français qui sont également internationaux.