Lui : 40 ans, chef économiste de la BankMed
Elle : 30 ans, peintre
Collection : débutée en 2006. Environ 50 pièces
Première pièce acquise : Hussein Madi, “Une nature morte aux fleurs”
Dernière pièce acquise : Farid Aouad, “Les pêcheurs en Bretagne”

Conserver une trace… Cette idée taraude Mazen Souheid alors qu’il voyage dans le monde entier pour le compte d’une grande institution internationale. Presque sans s’en rendre compte, il rapporte de ses séjours des objets ou des peintures, souvenirs des mois ou des années passés dans ces lointains pays, qu’il ne reverra plus.
Les choses prennent une autre tournure lorsque cet économiste rencontre sa future épouse, Loulia Berbir, apparentée au grand peintre syrien, Fateh Moudaress, elle-même peintre professionnelle. « Quand je suis rentré en 2006, j’ai commencé à m’intéresser à l’art de mon pays. » Des noms lui viennent aussitôt en tête : Ayman Baalbaki, dont il possède une œuvre de la série “Keffieh” ; Tagreed Darghouth, dont il a acheté l’une des fameuses “Têtes de morts” ; Amine el-Bacha, qu’il considère comme l’un des plus grands de sa génération.
En évoluant, sa collection se focalise sur deux thèmes : d’un côté, les peintres de la région, de l’autre, l’art figuratif. « J’applique à ma collection les préceptes d’économie : la valeur d’une œuvre est corrélée à sa rareté. De ce point de vue, l’artiste parfait est quelqu’un comme Mohammad Rawass, qui réalise cinq ou six toiles par an, depuis ses 20 ans. Si j’achète un artiste plus prolixe comme Hussein Madi, je choisis des sujets plus rares dans sa production… » Son acquisition la plus chère ? “La plage” d’Amine el-Bacha, une représentation de Aïn el-Mreissé, acquise 35 000 dollars.
Pour ce jeune couple, l’art est une addiction toujours en développement : « On a débuté par l’art libanais “seulement”, puis l’art du Levant “seulement” et désormais on s’intéresse aussi à des artistes occidentaux, comme l’Anglais Lucian Freud. » Mazen Souheid ne dira pas combien il dépense chaque année, même s’il tente de tenir un budget. « Disons que 90 % de notre épargne part dans l’art. Et que je dépasse souvent mon budget », dit-il en souriant. C’est peut-être pour cela qu’il voit aussi dans l’art un investissement pour l’avenir. « Peu d’acquisitions sont le fait d’un coup de cœur. Aimer est une condition nécessaire, mais pas suffisante : je reste un investisseur. En achetant, je mise aussi sur la valeur future du peintre. »