Si vous dépassez une heure de connexion à Internet par 24 heures, il serait plus intéressant de vous connecter sans téléphone. Un nouveau créneau rentable pour l’utilisateur et les fournisseurs.
Le Liban compte plus de 500 000 utilisateurs réguliers et occasionnels d’Internet qui se partagent plus de 200 000 accès fournis par une quinzaine de sociétés spécialisées. Malgré l’absence de chiffres officiels, Cyberia semble avoir pris la première place. Elle est suivie de près par Data Management et Inconet. Viennent ensuite, par ordre alphabétique, Deltanet, Destination, Diginet, Globesat, Libancom, Litcom, Mineronet, Netgate, PSI Net (Lynx), Sodetel (société mixte ayant comme principaux actionnaires l’État libanais et France Télécom), Terranet et X-net… Cyberia est même positionnée par certains deuxième au Moyen-Orient, après Ittisalat des Émirats arabes unis.
Les fournisseurs d’accès offrent, en plus de l’abonnement à Internet, une panoplie de services allant de la conception et de la réalisation de pages Internet à la création de contenu qui figure généralement dans la page d’accueil de leur site. Pour cette raison, l’appellation exacte de leur activité sera fournisseur de services Internet (ISP : Internet Service Provider).
Démocratie légale et illégale
L’abonnement à Internet a connu ces dernières années une démocratisation marquée. Le coût moyen pour un abonnement mensuel illimité (hors “subvention bancaire”) se situe généralement entre 10 et 15 $. D’autres types d’abonnements sont offerts, ils correspondent à des besoins particuliers d’utilisateurs privés ou institutionnels.
L’accès à Internet nécessite habituellement de passer par le réseau téléphonique commuté, avec une vitesse de transmission qui ne peut dépasser actuellement les 33 600 bps alors que la majorité des modems utilisés atteigne 56 000 bps.
Le coût de la communication téléphonique, facturée au tarif en vigueur, est en moyenne de 1,20 $ par heure (fonction du tarif diurne/nocturne) sans compter les taxes additionnelles. Puisqu’en moyenne un utilisateur se connecte une heure par jour, le montant mensuel à ajouter à son abonnement Internet sera de 36 $ par mois. La facture totale de l’utilisateur s’éléverait donc en moyenne à 50 $.
Profitant de cette situation, un certain nombre de revendeurs d’accès Internet ont proposé la parade suivante : ils offrent à leurs clients une connexion Internet permanente 24h/24, 7 jours/7 à un coût situé entre 30 et 50 $ par mois. À cela il faudra ajouter 75 à 100 $ de frais d’installation. Cette activité a été déclarée illégale par le ministère des P & T.
Techniquement, la solution est simple : ils souscrivent auprès d’un ISP à une connexion Internet à haut débit transportée soit par lignes louées, soit par liaison aérienne micro-ondes. Ils redistribuent, ensuite, ces accès via un réseau de câbles, utilisant la même technologie que celle employée pour connecter des ordinateurs entre eux. Économiquement, les calculs réalisés montrent que le bénéfice mensuel réalisable se situerait entre 1 500 et 2 000 $ pour 200 clients. Pour améliorer leur rentabilité, ils utilisent une connexion par satellite permettant de recevoir les données Internet (Down Load) représentant généralement 75 % du trafic et n’utiliseraient la connexion souscrite auprès de l’ISP que pour l’émission (Up Load), 25 % restants. La liaison satellite étant plus économique en Down Load, ils peuvent ainsi augmenter notablement le nombre de leurs clients en leur garantissant des débits raisonnables.
Côté utilisateur, l’intérêt est double : d’une part sa ligne téléphonique reste disponible et d’autre part il dispose pour une somme fixe mensuelle d’une connexion Internet permanente. À la lumière de nos calculs ci-dessus, une telle solution est rentable à partir d’une heure de connexion par jour.
Les nouvelles possibilités
L’“Internet pour tous” n’est plus un slogan, c’est une réalité. De plus, grâce à l’Internet, les nouveaux produits et services apparaissant dans le monde sont plus que jamais accessibles.
Il faut distinguer deux catégories d’utilisateurs : les privés et les professionnels.
Les utilisateurs privés aspirent à une connexion Internet rapide et fiable. Il est courant de constater des coupures de lignes durant une session d’une demi-heure. À l’heure de la généralisation de la téléphonie et du vidéophone par Internet (Microsoft Messenger Service, NetMeeting, Net2Phone…), il est urgent de disposer de liaisons rapides. Enfin, de nombreux privés continuent leurs activités professionnelles à leur domicile. Offrir des moyens de connexion à coûts abordables et de bonne qualité leur offre les moyens de leur ambition.
Pour ces raisons, il n’est pas interdit d’espérer que les technologies de connexion sans fil (WireLess) feraient leur apparition chez les privés. Une des techniques employées consiste à disposer d’un réseau de satellites permettant la connexion d’ordinateurs à l’Internet via de petites antennes. Le projet SkyBridge entrepris par Alcatel attend la contribution du gouvernement libanais. Il s’agit d’un réseau international de 80 satellites (pour 6 milliards $) permettant une connexion rapide et sécurisée entre ordinateurs, via des stations terrestres. Notre ministère des Télécoms devra rassembler un capital mixte (public-privé) de 150 millions $ et le Liban sera ainsi un des 8 relais de la région. Une autre technologie, disponible immédiatement, consiste à mettre en place des émetteurs locaux pouvant couvrir un rayon de vingt kilomètres. Comparable au réseau de téléphonie mobile, elle permet l’accès à l’Internet à tout ordinateur situé dans l’espace de couverture géographique. Enfin, il est grand temps de mettre en exploitation les possibilités ISDN de nos centraux téléphoniques. Une tarification accessible à tous garantira un retour sur investissement, vu dans le sens global et non pas limité aux seules finances du ministère des Postes et Télécommunications.
Les utilisateurs professionnels sont, pour leur part, demandeurs d’infrastructures leur offrant des lignes de qualité à haut débit. L’Internet City de Dubaï constitue un exemple à suivre dans ce domaine. En effet, elle permet d’attirer les multinationales dont l’activité ne pourrait se passer de telles facilités.
Outre le besoin en infrastructures, la position concurrentielle du Liban au Moyen-Orient nécessite la mise en place, en urgence, d’une stratégie télécoms. Abdel Wahab Omari, PDG de Cyberia, nous la résume en quatre points :
• Adopter une politique claire et stable à l’égard du secteur privé.
• Assurer un libre accès aux infrastructures de télécommunications existantes et développer de nouvelles, y compris l’accès aux connexions par fibre optique, par satellites et par lignes louées. Y appliquer une politique tarifaire motivante.
• Mettre en place un cadre légal tenant compte des besoins particuliers liés à l’économie moderne.
• Adopter le principe d’incitations économiques à l’égard des entreprises qui s’activent – et apportent une valeur ajoutée dans ce domaine.
Pour conclure, il n’est pas interdit de croire que les nouveaux arrivés au Parlement et plus spécialement les jeunes parmi eux et ceux qui font usage de l’Internet se sentent le devoir de s’atteler, en priorité, à résoudre cette situation.