Une certaine culture à la française : les Messageries nous en livrent 1,2 million d’exemplaires
par an, rien que pour la presse. Molière résiste bien.
Attendus tous les jours avec impatience par des milliers de francophones, les Messageries du Moyen-Orient véhiculent, depuis 1967, une certaine culture “à la française” : presses locale et étrangère, livres pour petits et grands, bandes dessinées format poches, etc.
Extension naturelle de la Librairie Antoine (fondée en 1933 par Antoine Naufal), la société MMO distribue aujourd’hui la presse française dans 380 points de vente, la presse locale dans un millier et les livres dans 250 librairies.
Dirigée, depuis 1975, par Georges Tabet (gendre d’Antoine Naufal) – par ailleurs président du syndicat des importateurs de livres –, la société compte 140 employés, un parc de 37 véhicules et 4 bureaux : Hamra pour la presse étrangère, Tripoli pour la presse en général, Sin el-Fil pour la presse locale et Saïfi pour le livre. «En attendant de les regrouper prochainement en un seul local, dont les plans sont déjà établis, et qui sera situé près du rond-point Hayek», nous annonce Georges Tabet.
Dans ces locaux se traitent 80 000 références de livres et 718 titres de presse française sur 2 300 publiés en France, ainsi que 60 titres italiens (essentiellement de mode et de décoration).
Les titres-phares ? On n’étonnera personne en disant que pour la presse française “Paris Match” est le premier titre vendu au Liban, suivi par “Voici” et “Femme Actuelle”. Plus que la presse d’actualité, les périodiques féminins et les titres de jeunesse se vendent le mieux.
Un mécanisme bien rodé
Les MMO fonctionnent selon un système exclusif, puisque c’est la société qui finance le réseau. Elle achète et distribue la marchandise, et n’est remboursée que lorsque le dépositaire l’aura vendue. Pour la branche livres, elle reçoit en office toutes les nouveautés, qu’elle rééclate sur un réseau de libraires en consignation. La Librairie Antoine et les MMO importent à elles seules plus de la moitié des imprimés français au Liban, y compris les livres scolaires et universitaires. Bientôt, c’est le livre électronique en français qui va être développé.
Le Liban représente 11 tonnes par semaine de presse étrangère et 1,2 million d’exemplaires de presse française vendus par an, soit autant que tous les pays du Moyen-Orient réunis. Presque équivalents au volume de la presse étrangère, les 13 titres libanais édités en français sont tous distribués par MMO.
Cependant, le marché de la presse accuse aujourd’hui une légère baisse «due essentiellement au recul du pouvoir d’achat». Cette année, les MMO connaissent un ralentissement d’activité de l’ordre de -10 à -15 %, alors que les prix ont baissé d’autant, suite à la chute de l’euro. «La récession augmente le risque de financement du réseau et le risque client, surtout dans ce métier où la société travaille sans stock, avec une activité au jour le jour». Les délais de paiement des clients, qui étaient auparavant de 45 jours, atteignent actuellement 4 à 5 mois.
Cependant, Georges Tabet est loin d’être pessimiste. «Jusqu’à ce jour, on n’observe aucun recul de la francophonie, bien au contraire», explique le PDG de MMO. Les chiffres de l’Association des publicitaires francophones lui donnent raison : 70 % des élèves choisissent toujours le français comme première langue étrangère et l’audience de la presse libanaise d’expression française est montée de 19 à 26 % en 4 ans (enquête Stat-Ipsos).
Côté couverture du territoire, le Grand Beyrouth et le Metn sont traités directement par les MMO et représentent 60 % des ventes. Le Nord, le Sud, la Békaa, le Kesrouan et Jbeil étaient couverts à travers des grossistes. Cette année, le Nord et le Sud ont été pris en charge directement par la société. «Même si le Nord ne représente que 2 % du marché en presse étrangère, les MMO font l’effort d’être présentes».
Forte présence aussi au niveau de la presse française spécialisée qui est distribuée uniquement par abonnement (15 000 titres en portefeuille). Ce service permet au lecteur de recevoir, chez le libraire le plus proche, le magazine auquel il est abonné, où qu’il soit au Liban. «Nous essayons de développer ce service, car nous voulons être le plus proche possible du client», conclut M. Tabet. Lui qui a réussi le tour de force de servir ces mêmes clients avec un aéroport fermé et littéralement sous les tirs.