
À défaut, ce serait l’architecte Youssef Haïdar, choisi en 2008 pour superviser la transformation de l’immeuble Barakat en musée, qui se serait occupé de la future programmation culturelle. « Il faut juste nommer une équipe, les discussions sont en cours », explique-t-il. Une assertion que la ville de Beyrouth s’est toutefois refusée à confirmer.
Quel que soit le prestataire, le manque de transparence traduit sans doute l’incapacité de la ville à mener jusqu’au bout un projet. La municipalité n’était pas non plus en mesure de répondre au Commerce du Levant sur le montant du budget de fonctionnement de l’institution culturelle. Elle y a pourtant investi une vingtaine de millions de dollars, selon plusieurs sources concordantes. À cela s’ajoute l’expropriation engagée dès 2003 pour un montant total de 2,8 millions de dollars. La France, qui collabore depuis 2003 avec la municipalité de Beyrouth, a financé l’étude de faisabilité pour environ 70 000 dollars. Dédié aux mémoires de la guerre de 1975, ce nouveau musée, d’une surface de 6 500 m2 au total, comprend deux étages d’exposition permanente ainsi qu’un troisième pour l’organisation d’expositions temporaires. Beit Beirut sera, par ailleurs, doté d’un auditorium, d’une médiathèque et d’un restaurant.
Construit en 1924 par l’architecte Youssef Aftimos, à qui on doit aussi le Grand Théâtre du centre-ville, l’immeuble Barakat, propriété de la famille éponyme, se situe au carrefour de Sodeco, sur l’ancienne ligne de démarcation qui divisait Beyrouth en deux pendant la guerre. À l’époque, cinq familles y vivaient. Assez vite, toutefois, des francs-tireurs investissent le lieu, faisant fuir ses habitants. L’endroit se révélant en effet “idéal” pour tirer sur les quartiers ouest (tandis que, côté est, d’autres faisaient de même pour les quartiers ouest). « Quand je suis venue ici la première fois, j’ai réalisé que j’étais à l’endroit exact où des gens tuaient et étaient tués », explique Mona el-Hallak, une architecte libanaise, l’une des principales instigatrices du projet de Musée de la mémoire. C’est pour que la réalité de cette guerre, qui a fait quelque 200 000 morts, ne soit pas oubliée que cette architecte et plusieurs autres acteurs de la société civile se sont battus pour faire de ce lieu le mémorial de la guerre de 1975.