La profession d’intermédiaire financier est bien réglementée. Cela n’empêche pas certains courtiers autoproclamés d’agir à la sauvette. Rappel des principes pour une autoprotection.

La Loi n° 234 du 10 juin 2000 définit la notion d’intermédiation financière et réglemente la constitution et le fonctionnement de l’établissement ad hoc qui, avec la banque et l’établissement financier prévus dans le code de la monnaie et du crédit, détient le monopole de l’intermédiation financière.
Aux termes de cette loi, l’intermédiation financière couvre les activités suivantes, qu’elles soient exercées pour le propre compte de l’intermédiaire ou pour celui de ses clients : les opérations instantanées et à terme, futures et options ; la compensation ; les opérations sur les instruments dérivés ou structurés basés sur les actions, les obligations, les bons du Trésor et toutes valeurs mobilières, ainsi que sur les papiers commerciaux, les devises, les métaux précieux ou les matières premières ; et, enfin, la gestion de portefeuilles financiers.
Ces opérations ne peuvent être exercées que par les banques, les établissements financiers et les établissements d’intermédiation financière. De même, il existe un monopole pour les courtiers de bourse, régis par le règlement intérieur de la Bourse de Beyrouth.
Le monopole de l’intermédiation se justifie par le souci de protection de l’épargne publique et de la sécurité des transactions. Justement, pour assurer encore plus cette protection, la relation du client et de l’établissement d’intermédiation doit, à peine de nullité, faire l’objet d’un contrat écrit contenant certaines mentions : une indication expresse de soumission du contrat à la loi n° 234/2000 ; la nature du contrat de gestion (“discrétionnaire ou lié”) ; la durée du contrat avec la mention expresse qu’en tout état de cause il peut être résilié à tout moment en tenant compte des opérations en cours ; et enfin les commissions, frais et rémunérations dus par le client.
Intermédiaire, donc mandataire, l’établissement d’intermédiation financière, la banque ou l’établissement financier est soumis de manière générale aux dispositions du code des obligations et contrats relatives au mandat rémunéré, pour tout ce qui ne contredit pas la loi n° 234/2000. Ceci est également vrai pour les simples opérations de bourse, où il n’y a qu’un mandat ponctuel d’exécution d’un ordre, et pour la gestion de portefeuilles, où le mandat est plus général. Deux autres institutions juridiques relevant du code de commerce peuvent également être appelées à s’appliquer : la commission surtout et le courtage plus exceptionnellement qui sont réglementés dans le code de commerce (articles 279 à 297).
La BDL veille…

L’établissement d’intermédiation financière a en commun avec l’établissement financier qu’il ne peut pas recevoir de dépôts publics. Mais il s’en distingue par le fait que, contrairement à l’établissement financier, il ne peut pas octroyer des crédits, mais seulement des facilités liées aux opérations qu’il exécute. Ne pouvant pas recevoir des dépôts, l’établissement d’intermédiation financière se finance donc par ses fonds propres, par des prêts octroyés par ses actionnaires et par des emprunts obligataires classiques ou convertibles en actions.
La constitution de l’établissement, qu’il soit une société anonyme libanaise ou succursale d’un établissement étranger spécialisé, est soumise à l’obtention de l’agrément préalable de la Banque du Liban qui jouit d’un pouvoir discrétionnaire à cet égard. Comme elle se voit aussi reconnaître un pouvoir de supervision, de contrôle permanent et de discipline de l’établissement en cours de vie. Le capital social minimum est d’un milliard de livres libanaises. Et toutes les actions doivent, en tout temps, être nominatives et détenues, pour le tiers au moins, par des Libanais au sens des réglementations applicables aux actions bancaires. L’agrément de la Banque du Liban est requis pour toute cession qui a pour conséquence l’acquisition, directement ou indirectement, par une seule personne, de plus de 10 % du total des actions de l’établissement, ainsi que pour toute modification des statuts ou pour l’ouverture de succursales. La Banque du Liban tient une liste exhaustive et mise à jour des établissements d’intermédiation financière opérant au Liban (consultable sur son site : www.bdl.gov.lb).
Dans son fonctionnement, l’établissement est donc étroitement encadré par la Banque du Liban et par la Commission de contrôle des banques, ainsi que par le commissaire aux comptes que, comme toute société anonyme, il doit nommer. C’est la protection directe des clients de l’établissement d’intermédiation financière qui a le plus retenu le législateur. La loi n° 234/2000 impose à cet établissement une série de règles tendant à éviter les manipulations des comptes des clients et surtout la mauvaise information, les conflits d’intérêts et les délits d’initiés. Ce triptyque se trouve au centre des règles de bonne conduite que doivent respecter tous les intervenants sur les marchés financiers et qui relèvent de la déontologie financière.

(*) Avocat à la Cour, chargé de cours à la faculté de droit de l’Université Saint-Joseph, docteur en droit, Master’s of Laws. Un texte complet de cette étude sera publié dans le bulletin mensuel de l’Association des banques.