Les ingénieurs sont partout : dans la recherche, le bâtiment, l’alimentaire, l’informatique,
les affaires… D’où une multitude de spécialisations – et jusqu’à 1 700 diplômés par an.
Le génie tient ses promesses, mais il faut un sacré souffle pour pouvoir sortir de sa bouteille.
Le titre d’ingénieur pêche par son imprécision. Des métiers aussi différents que le génie électronique et le génie agroalimentaire n’ont de commun que leur génial dénominateur. En France, on dénombre pas moins de 38 spécialisations portant le titre d’ingénieur. Au Liban, la diversité est moindre, mais la variété des formations est suffisamment importante pour que l’étudiant soit conduit à des métiers radicalement différents les uns des autres.
Les plus courantes restent les génie civil, électronique, électrique, mécanique, puis administratif, industriel, génie en télécommunications, génie informatique. Mais certains établissements proposent encore d’autres formations comme le génie biomédical (à l’USJ, l’AUST) ou la topographie (à l’Université arabe).
Pour plus de clarté, l’USJ a regroupé en départements les différentes formations, à la suite des deux années de classes préparatoires. Cette classification a le mérite de mettre en avant les traits communs à ces différents métiers.
Le département électricité et mécanique englobe les génies biomédical, électrique et mécanique, informatique et réseaux, télécommunications et réseaux. Son objectif est de fournir une culture scientifique et technique de haut niveau, afin que les jeunes diplômés soient directement opérationnels, aussi bien dans un bureau d’études que sur un chantier. Elle comporte par ailleurs des notions de droit, d’ingénierie financière, de gestion et de communication répondant à la vocation de futur chef d’entreprise de l’étudiant.
Le département génie civil et environnement regroupe le génie en bâtiment et l’ingénierie d’entreprise, l’option eau et environnement, ainsi que les travaux publics et transports. Particulièrement axé sur la pluridisciplinarité, ce département offre donc une formation de base couplée à une initiation aux réalités de l’entreprise par le biais d’enquêtes, de visites de chantier et de bureaux d’études.
Ces regroupements, même s’ils ne sont pas proposés sous forme de départements séparés dans les autres universités, comportent néanmoins les mêmes spécificités d’études selon les spécialisations.
Un réseau
de sous-spécialités
Les étudiants ayant opté pour le système français devront passer par deux années réputées difficiles, mais indispensables : les années dites préparatoires en mathématiques supérieures (math sup’) puis mathématiques spéciales (math spé’). Comme leur nom l’indique, ces deux années visent à fournir les notions approfondies en mathématiques, mais aussi en physique, chimie et informatique. Connues pour la pression qu’elles infligent aux étudiants, ces années de prépa apportent néanmoins des connaissances qui s’avéreront fort utiles par la suite. À leur terme, et selon ses résultats, notre jeune postulant ingénieur pourra choisir sa spécialisation, ou carrément se réorienter.
Le système américain n’impose pas ces deux années de purgatoire, mais exige cependant des étudiants de passer un concours d’admission, dont les résultats décideront de l’option à choisir dès la première année. À noter que l’AUB propose tout de même une année de tronc commun au cours de laquelle l’étudiant pourra mieux discerner la spécialisation lui convenant pour l’année suivante.
La suite du parcours variera de quatre à cinq ans selon la spécialisation et le système choisis. Dans tous les cas, l’ingénieur devra avant tout faire preuve d’une bonne dose de flexibilité pour répondre aux besoins spécifiques de l’entreprise.
• Génie civil. Il faudra compter quatre ans (plus sessions d’été) dans le système américain et trois ans après les deux années de prépa dans le système français pour obtenir le diplôme d’ingénieur civil. Ajoutons deux années supplémentaires pour l’obtention d’un mastère ou d’un DEA, sachant que seule l’ESIB (École supérieure d’ingénieurs de Beyrouth, reliée à l’USJ) propose un doctorat. En troisième année à l’USJ et à l’UL, les options bâtiment ou travaux publics font l’objet d’une sous-spécialisation. L’étudiant doit garder en tête qu’en tant qu’ingénieur civil, il sera appelé à travailler sur tous types de construction (édifices, usines, barrages, voies de circulation, aéroports…) ; aussi devra-t-il disposer d’une formation à la fois polyvalente et approfondie dans des domaines aussi pointus que l’hydraulique ou la physique des plaques.
• Génie électrique. Même cursus que pour le génie civil : il faut donc s’investir dans cinq ans d’études, spécialisées dès la troisième année dans les courants forts, l’informatique, l’électronique, l’automatique, ou la microélectrique. Un troisième cycle est toujours accessible dans certaines universités. L’ingénieur électrique peut intervenir à trois niveaux : il conçoit de nouvelles applications répondant à des besoins précis ; il conseille en tant qu’expert technique ; ou enfin, il surveille le bon fonctionnement des appareils dans un cadre donné. Cette formation peut aussi déboucher sur des spécialisations encore plus pointues.
• Génie mécanique. Toujours obtenu en 4 ou 5 ans, ce diplôme peut conduire à des mastères, ou bien sûr directement à la vie professionnelle. L’ingénieur mécanique touche à tous les appareillages, équipements et machineries, aussi bien au niveau de l’entretien que de la création. La connaissance des procédés mécaniques, magnétiques, chimiques et thermodynamiques côtoie donc la recherche technologique dans le cadre des études.
• Génie informatique. Suivant le cycle classique, le diplôme s’obtient en 4-5 ans, puis troisième cycle (mastère ou DEA) et doctorat à l’USJ uniquement. Le choix de cette spécialisation peut se faire directement après les années préparatoires, mais certaines options comme informatique et télécommunications sont comprises dans la formation de génie électrique. À savoir que l’ingénieur informatique est différent de l’informaticien. Il travaille à la conception, la fabrication et l’amélioration du matériel, des installations et des logiciels ; il met en place physiquement les installations dont se sert l’informaticien pour la programmation. La formation en génie informatique comporte néanmoins des cours en programmation, mais surtout en réseaux, interconnexions, bases de données, systèmes d’exploitation, etc.
• Génie industriel. Voici le touche-à-tout du secteur. L’ingénieur industriel évalue, conçoit et organise l’entreprise, le plus souvent l’usine. Il intervient aussi bien au niveau des méthodes de travail que sur la qualité des produits. Bien souvent, des thématiques permettent à l’étudiant de se spécialiser. La productique par exemple donne une vue d’ensemble de tout ce qui concerne la conception d’une usine. À l’obtention du diplôme, l’étudiant peut se spécialiser par un troisième cycle, en chimie industrielle à l’UL par exemple.
Si ces spécialisations, classiques, restent des valeurs sûres, les étudiants s’intéressent de plus en plus à des formations moins connues mais de plus en plus demandées sur le marché professionnel : électronique, télécommunication, ressources hydrauliques, machineries médicales, etc. Bien souvent, ces formations constituent des sous-spécialisations dans le cadre des enseignements proposés.
Des études chères
Parce que l’investissement en laboratoires, profs… est important, les études d’ingénieur coûtent souvent cher. En temps, en énergie et aussi en argent. Même si les tarifs varient selon les établissements, cette formation et ses spécialisations se placent en règle générale sur le podium de tête des études les plus coûteuses. Ainsi, il faut compter à l’USJ, réputée modérée, la coquette somme d’environ 11 millions de livres par an (à multiplier au minimum par cinq donc, sans compter un éventuel troisième cycle et les divers manuels et autres matériels) pour obtenir le diplôme. Seules les études médicales, dentaires ou cinématographiques sont plus onéreuses. À l’AUB, il faut miser sur une dépense d’au moins 5 500 $ par semestre, ce qui place cette formation en tête du palmarès, devant la médecine (5 300 $ par semestre). À Balamand, le crédit coûtera 250 $ contre 230 $ pour les sciences médicales.
Mais le jeu en vaut la chandelle. Les ingénieurs arrivent, en temps normal, à trouver assez facilement un emploi qui, s’il est peu payé à l’entrée dans la vie active, sera rapidement très bien rémunéré.