Les patrons de la MTV auraient pu s’en tenir là, au niveau de la cire rouge. Ils ont choisi une deuxième voie, celle de la production à grande envergure. La deuxième aventure des Murr, lignée Gabriel.
«Les employés de MTV n’ont même
pas pu récupérer leurs affaires personnelles
laissées dans les
bureaux !», s’indigne encore aujourd’hui
Carole Murr Farah, qui occupait le poste de
directrice financière et administrative de la
chaîne. En effet, lorsque le 4 septembre 2002,
par un arrêt de justice, le gouvernement a
condamné la MTV à la peine capitale, tous les
locaux ont été placés sous scellés. Avec interdiction
pour quiconque d’enfreindre le périmètre.
«Et pourtant, cette interdiction n’était
même pas comprise dans le jugement», ajoute
amèrement l’ancienne directrice.
Et c’est ainsi que les studios, le matériel, les
archives et tout l’équipement de la télévision
demeurent, jusqu’à ce jour, hors d’accès,
«sans même la possibilité d’y effectuer les
opérations de maintenance nécessaires».
Mais qu’est-il donc arrivé aux membres de
l’équipe de MTV – pas loin de 500 personnes
? Près d’une centaine d’entre eux
ont quitté le pays pour de nouveaux horizons
(États-Unis, Canada, Dubaï, Koweït et
divers pays arabes), d’autres se sont tournés
vers les télévisions locales pour y animer
de nouvelles émissions. La LBC, la
Future, la NBN et la NTV ont ainsi accueilli
quelques-uns des anciens animateurs et
techniciens de MTV.
Mais c’est aussi “Studiovision”, l’une des
sociétés qui appartient au groupe Gabriel
Murr, qui a absorbé de son côté environ
150 ex-employés de la chaîne. L’activité de
cette société, créée en 1995, et spécialisée
dans la production, a pris plus d’envergure
après l’arrêt des émissions de la télévision.
Ses locaux, situés à Naccache, servaient
auparavant,
en priorité, à
la production
d’émissions
diffusées sur
MTV. Mais sa
clientèle s’est
aujourd’hui
diversifiée.
Forcément.
Et ce sont des chaînes venues de tous
côtés qui actuellement profitent de ses services
et de l’expérience d’une équipe qui
avait fait de la MTV la seconde chaîne nationale
en termes d’audience.
Studiovision fonctionne selon deux modes :
soit elle loue ses studios, avec équipements et
personnel qualifié, à des chaînes de télévision
qui, de leur côté, assurent le programme et
Carole Murr Farah. les animateurs ; soit elle prépare elle-même
des émissions clés en main (idée, exécution,
animation, réalisation…) qu’elle vend à des
télévisions locales ou étrangères. Studiovision
occupe actuellement plus de 17 000 m2 sur 11
étages et s’est dotée d’une équipe et d’un
équipement sophistiqué pour tout genre de
production télé, de A à Z ; un “one-stop-shop”.
AL-WALID N’EST PAS LOIN
La construction du nouveau bâtiment qui
abrite Studiovision vient tout juste de
s’achever – un investissement de 25 millions
$. Et donc, «il est encore trop tôt
pour évaluer la rentabilité du projet»,
confie Carole Murr Farah, qui est également
la directrice administrative et
financière de Studiovision. Et c’est son
frère, Michel, qui en est le présidentdirecteur
général
mais également,
depuis septembre
2003, le directeur
de “Rotana TV” –
chaîne qui appartient
au prince al-
Walid ben Talal –
dont les bureaux se trouvent dans l’immeuble
de Studiovision à Naccache. Si
cette proximité induit une certaine
confusion, et même si toutes les émissions
de “Rotana TV” sont produites par
Studiovision, il n’en demeure pas moins
que les deux sociétés sont des entités
tout à fait indépendantes.
Dans le même esprit, les diverses stations
radio appartenant au groupe fonctionnent
aussi comme des entités indépendantes.
Seule l’une d’entre elles,
Jabal Loubnan, a subi le même sort que
la MTV, et placée sous scellés. Quant
aux autres radios FM, Nostalgie et RML,
elles poursuivent leur carrière avec succès
et continuent de rechercher les
occasions de se développer. Avec,
notamment, des pourparlers pour un
partenariat avec NRJ-France qui englobe
la programmation de RML. Bref, tout
porte à croire que si MTV était souvent
déficitaire, les nouveaux
projets télévisuels
du groupe
Gabriel Murr sont
susceptibles d’être
rentables.
N’empêche que la
fermeture de la
télévision reste pour les créateurs de la
MTV une pilule dure à avaler. Comme
quoi, tout n’est pas nécessairement une
question d’argent.
La construction du nouveau
bâtiment qui abrite
Studiovision vient
tout juste de s’achever.
Un investissement
de 25 millions $
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