Supérette est une appellation française pour petit supermarché. Sauf que celle-ci est libanaise, la première du genre dans la capitale française. Les Délices d’Orient est en fait une enseigne qui a comblé un besoin, celui des Libanais de Paris et autres libanophiles.
C’est une vraie caverne libanaise d’Ali
Baba, dans le bon sens du terme,
qu’ont monté dans le 15e arrondissement
cinq frères, originaires du Akkar. Sur
160 m2, Les Délices d’Orient est l’unique
supérette libanaise de la capitale française.
«Au départ, en 1992, nous n’étions qu’une
simple épicerie. Puis, nous avons décidé de
faire mieux que les autres. Nous avons racheté
les boutiques voisines, cassé les murs et
inauguré une vraie supérette à l’été 2003»,
raconte Romyo Hawly, fondateur d’Orienco, la
société holding qui gère l’enseigne Les
Délices d’Orient.
Les frères Hawly sont en fait à la tête d’une
organisation très bien structurée. D’un côté,
Les Délices d’Orient s’occupe de la distribution
au détail et, de l’autre, Orienco, spécialisée
dans le commerce de gros. Cette dernière
fait venir, deux fois par mois via une autre
société basée à Tripoli, des conteneurs chargés
de marchandises : des galettes, des
conserves, du vin, des biscuits, des
légumes… Au total, 80 % des produits vendus
en magasin viennent du Liban.
Les très nombreux restaurants libanais
implantés à Paris font naturellement partie
des principaux clients d’Orienco. Qui, pour se
diversifier et offrir une gamme complète de
produits, confectionne également des fruits
secs (sucrés ou salés), du pain, du hommos frais ou en conserve
qu’elle vend sous sa
propre marque.
La société, dont les
dépôts sont situés en
région parisienne, a réalisé
en 2003 un chiffre
d’affaires de 8 650 000 euros,
pour un résultat net de 110 000 euros. Pour
sa part, l’enseigne Les Délices d’Orient a affiché
la même année un chiffre d’affaires de
1 750 000 euros, pour un résultat net de
64 000 euros. Une vraie réussite pour cette
petite multinationale familiale. «Nous avons
une trentaine d’employés en tout, mais nous
faisons également travailler de petits artisans
au Liban pour des biscuits secs ou des
galettes. Et cette activité est gérée par trois
de mes frères qui sont restés au pays», poursuit
Romyo Hawly. Qui tient à cette orthographe
de son prénom.
Au total, le point de vente expose pas moins
de 1 500 références. On y trouve de tout. Les
Délices d’Orient propose même des marques
connues au Liban, comme Zwan et Cortas.
Seul manque le fromage libanais, qui reste
interdit en France, suite à l’application des
normes européennes d’hygiène.
UN MINI-QUARTIER LIBANAIS
Les Délices d’Orient compte aussi parmi ses
clients réguliers toutes les ambassades
arabes de Paris. Le reste de la clientèle est
composé à 50 % environ de Libanais, 40 %
de Français ou Européens et 10 % de ressortissants
du Golfe de passage à Paris.
Mais pour mieux fidéliser ses consommateurs,
Hawly a trouvé le petit plus qui peut lui attirer une plus large clientèle matinale. Tous
les jours, par le premier avion qui décolle de
Beyrouth pour Paris, il se fait livrer la presse
quotidienne libanaise. Un coursier se rend à
l’aéroport Charles-de-Gaulle pour récupérer
la liasse de journaux, et tous les titres sont
proposés à la vente dès 14h30. «En semaine,
nous avons une vingtaine d’exemplaires de
chaque journal. Le week-end, c’est le double.
Et tout part, sans problème», explique Hawly.
Cette petite surface a d’ailleurs si bien marché,
qu’elle est en passe de provoquer autour
d’elle un mini-quartier libanais. En quelques
mois, Les Délices d’Orient est parvenue à
animer cette partie du 15e arrondissement,
traditionnellement tranquille, autour de l’avenue
Émile Zola. D’autres traiteurs libanais ont
ouvert. L’un d’eux est situé juste en face de la
supérette. «Avant, il n’y avait rien ici. Mais
depuis que nous sommes là, le commerce
reprend. C’est bon pour tout le monde», estime
Hawly. Qui a imaginé encore une autre
formule pour faire la différence. Situé dans la
rue voisine, il a créé un restaurant-traiteur,
toujours appelé Les Délices d’Orient, et qui
est l’un des rares établissements parisiens à
proposer tous les jours le knefé traditionnel.
Cette spécificité a cependant un prix qui peut
faire bondir les Libanais : 3,85 euros, soit
environ 7 500 LL. Malgré ce prix, il s’en vend
comme des petits pains !
Ce snack propose également différents
manakiches et de multiples spécialités culinaires
du pays. Le service du midi est bien
souvent complet, et Hawly peut être satisfait
de ce troisième établissement qui, déjà,
génère un chiffre d’affaires de 540 000 euros
par an. Et le créneau, pour les Hawly, est
encore loin d’être saturé.