Les parlementaires sont en train de mettre la dernière touche à la proposition de loi de lutte contre le tabagisme, qui fait environ 4000 morts par an au Liban, et qui coûterait près de 300 millions de dollars à l'Etat.

Le texte, qui prévoit l'interdiction de fumer dans les endroits publics et de promouvoir le tabac, provoque toutefois beaucoup de remous, notamment dans le secteur hôtelier et celui de la restauration.

C’est le député Atef Majdalani qui a avancé ce projet en 2004. Aujourd’hui, le texte est entre les mains de la Commission parlementaire de l'Administration et de la Justice, qui effectue les dernières retouches, en essayant de prendre en considération les revendications des uns et des autres.

« Nous ne sommes pas contre une loi interdisant de fumer dans les endroits fermés. Nous avons toutefois besoin d’une période de transition pour l’appliquer », explique Pierre Achkar, président du syndicat des hôteliers, au Commerce du Levant.  Selon lui, « des investissements de centaines de milliers de dollars, voire de millions de dollars, ont été entrepris dans le secteur  pour surfer sur le succès du narguilé par exemple ».

« Nous demandons une période de transition d’au moins cinq ans, afin de permettre aux restaurateurs de rentrer dans leurs frais », réclame Achkar. Entre temps, des zones fumeurs et non-fumeurs peuvent être créés dans les restaurants, avec un renforcement des spécifications techniques en matière de ventilation par exemple, propose-t-il.

Mais pour le député Atef Majdalani, les restaurateurs au Liban ont à leur avantage le climat, qui permet d'accueillir des clients en plein air 10 mois sur 12, et de développer le concept de café-trottoir.

A la faveur des derniers amendements, une période de transition a été accordée, mais elle a été fixée à un an seulement après la promulgation de la loi, indique Atef Majdalani au Commerce du Levant. 

De plus, initialement, la proposition de loi prévoyait un quota de 10% de chambres dans chaque hôtel réservé aux fumeurs. Suite aux revendications des hôteliers, cette part a été portée à 20%, poursuit-il.

Quant aux publicités pour le tabac, « elles seront interdites six mois après l’entrée en vigueur de la loi, pour permettre l’exécution des contrats déjà signés », explique Majdalani. Après cette période, aucune publicité ou sponsoring pour et par les produits à base de tabac ne sera tolérée.

Le non-respect de la loi entraînera des sanctions et amendes douloureuses. Pour les fumeurs dans les endroits publics, des amendes équivalentes au cinquième du salaire minimum (soit des amendes de 100.000 livres libanaises, ou 67 dollars) seront appliquées. Quant aux établissements contrevenants, ils seront passibles d’une amende pouvant atteindre jusqu’à 50 millions de livres (33.000 dollars), avec une possibilité d’emprisonnement pour les récidivistes, selon les explications fournies par Majdalani. C’est la police judiciaire qui devra veiller à l’application de la loi, ajoute-t-il.

Enfin, le député souligne que pour la première fois au Liban, la vente de tabac sera interdite aux moins de 18 ans dans les restaurants, qui ne pourront plus servir des narguilés pour les mineurs.

Majdalani rappelle que selon des études récentes, 40% des jeunes libanais de 12 à 15 ans fument, du narguilé particulièrement, une proportion alarmante.

Selon lui, 4000 décès sont enregistrés chaque année à cause du tabagisme. Et le ministère de la Santé débourse annuellement l’équivalent de 300 millions de dollars pour soigner la panoplie de maladies résultant du tabagisme, comme le cancer des poumons, les infarctus cardiaques, l’infertilité et l’impotence, pour n’en citer que quelques uns.

Toutefois, la loi ne prévoit pas une hausse des taxes sur le tabac. « Nous avons essayé de le faire en 1998, un essai qui s’est soldé par un échec cuisant, en raison de la perméabilité de nos frontières, et l’impossibilité de limiter la contrebande de Syrie. Non seulement les recettes de la Régie ont chuté de 70%, mais en plus, la consommation a augmenté », déplore Majdalani.

En principe le texte devrait être finalisé dans quelques jours, mais rien ne garantit qu'il soit bientôt soumis à l'Assemblée générale.