Karam Winery
Le terroir de Jezzine

Cave et vignobles à Jezzine, 10 hectares
Date de création : 2003
Production : 60 000 bouteilles/an
Exportation : environ 40 %
Ventes : toute la production
Répartition du capital : famille Karam (les frères Habib et Sam Karam et leur père Nicolas)
Gamme de prix : entre 7 et 35 dollars

Habib Nicolas Karam, dit Capitaine Karam, est pilote de ligne sur la Middle East Airlines. Dans les années 1990, aussi bien par goût pour le vin qu’avec l’envie d’industrialiser l’agriculture de la région de Jezzine, où ses grands-parents produisaient du raisin de table, il se lance dans la production vinicole avec son père et son frère. En 2003, 35 000 bouteilles, les premières de Karam Winery, sont mises en vente.
La famille Karam qui ne souhaite pas communiquer le montant des investissements réalisés a plusieurs objectifs. D’abord, se distinguer sur le marché grâce à « un vin au goût différent des autres », plus libanais, « moins dans l’imitation des vins français » selon le propriétaire. Pour cela, Karam Winery s’est installée dans la région de Jezzine, où le terroir est différent de celui de la vallée de la Békaa, terre de prédilection des producteurs. Les Karam n’hésitent pas non plus à planter de nouveaux cépages, comme le Viognier ou des cépages américains. Ils veulent aussi garder certains secrets. Ensuite, la cave cherche à proposer « du bon vin à un prix raisonnable », mais surtout elle veut toucher un public averti. « Nous voulons vendre à des amateurs de vin, pas faire de la grande consommation », souligne Habib Karam. Au Liban, son vin n’est disponible que dans deux points de vente, la cave Aziz et le duty-free de l’aéroport, ainsi que dans quelques restaurants et hôtels haut de gamme comme le Phoenicia. Il est aussi proposé en première classe sur les vols de la Middle East Airlines. À l’étranger, ce Libano-Américain vend uniquement aux États-Unis. Il s’appuie sur sa filiale Karam Imports, basée près de Washington. Elle importe plusieurs marques de vins étrangers, mais seulement Karam depuis le Liban. Elle fournit particuliers et grands hôtels notamment.
Habib Karam souhaite atteindre son maximum de production, fixé à 100 000 bouteilles, d’ici à cinq ans. « Après, cela ne veut pas dire que j’arrêterai de progresser ! » s’exclame-t-il. Mais pas en quantité, il compte construire une nouvelle cave, plus moderne, et y associer un restaurant pour assurer la promotion de son vin mais aussi des produits de la région. Un investissement qu’il estime à près de quatre millions de dollars. Aujourd’hui, la cave est rentable et réalise quelques profits, qui sont immédiatement réinvestis.

Ixsir
Carlos Ghosn se lance dans le vin

S. L.

Cave à Basbine. Vignobles à Basbine, Jezzine, Aïnata, Niha, Kab Élias 120 hectares à ce jour
Production 2009 : 210 000 bouteilles
Investissement : 6 millions de dollars
Gamme de prix : pas encore fixée
Export : pas encore

La cave est en cours de construction et le vin sera lancé au printemps 2010. Mais le projet de Wines of Lebanon, la société qui produit le vin Ixsir, s’annonce déjà de poids. Les actionnaires sont de grands noms. Déjà dans le secteur du vin, Hadi Kahalé, ancien de Kefraya et titulaire d’un mastère en gestion de domaine viticole et le groupe Debbané-Saïkali, qui possède la pépinière Exotica et la cave à vins Enoteca commencent à monter un projet d’exploitation vinicole. Ils s’appuient financièrement sur la Bank Audi, qui les met en contact avec Carlos Ghosn, PDG de Nissan-Renault et amateur de vin, intéressé par cet investissement au Liban. Enfin, Khalil Debs, Walid et Samer Hanna, et Nabil Chaya plus connus pour leurs activités dans la Bank Audi, rejoignent le projet. Les trois groupes d’investisseurs ont chacun un tiers du capital. Constituée en SAL, Wines of Lebanon a chargé l’œnologue Gabriel Riviero, un ancien de Kefraya, à la base du projet, de la direction technique d’Ixsir.
En 2007, les partenaires entament une étude des sols pour sélectionner les plus beaux terroirs du pays. En plus de leur passion pour le vin, une boisson qu’ils apprécient tous, ils souhaitent que leur projet contribue d’une part au développement des régions, afin d’y maintenir les agriculteurs, et d’autre part à la promotion de la mosaïque des terroirs libanais. Aucun des actionnaires ne compte faire fortune grâce à cette activité, « ils ont déjà des revenus confortables », précise Hadi Kahalé avec le sourire.
À Jezzine, qui représente le sud du pays, sept hectares sont loués et plantés fin 2008. Dans la Békaa, Wines of Lebanon s’intéresse à des productions réalisées dans les villages de Niha et Kab Élias, mais aussi au Nord, avec les 20 producteurs composant la coopérative d’Héliopolis. (voir page XX).
L’entreprise est en train d’y finaliser des accords d’exclusivité avec les vignerons pour leur acheter tout leur raisin chaque année, leur organiser des formations et mettre en place des protocoles de travail pour garantir la qualité du fruit. Côté montagne, Wines of Lebanon a acquis un terrain à Basbine au-dessus de Batroun. « Il nous reste à trouver un terroir de montagne orienté vers la mer », dit Hadi Kahalé, directeur général du projet. « En tout, on devrait arriver à 140 hectares situés entre 300 et 1 800 mètres d’altitude », explique-t-il.
La cave est située sur le terrain de Basbine et répond à des normes écologiques calquées sur les Britanniques de la méthode Breeam, parmi les plus contraignantes, et espère, une fois le chantier terminé (en 2010), être certifiée par cet organisme. 19 000 m2 de terres ont été retirées afin que le bâtiment soit semi-enterré, à la fois pour limiter les dépenses d’énergies mais aussi pour que la cave se fonde dans le paysage. Un coût total près de 20 % plus élevé, explique Hadi Kahalé. Entre l’achat ou la location des terrains et la construction de la cave, plus de 6 millions de dollars ont été investis, et les actionnaires espèrent que la rentabilité arrivera « dans cinq à six ans ». La cave, qui emploie six personnes à plein-temps pour le moment, vinifiera les grappes provenant de toutes les régions. Les raisins seront apportés de chacune des zones en camion réfrigéré pour éviter leur oxydation, entraînant un surcoût de 15 % que la compagnie accepte de prendre en charge pour s’assurer de la qualité.
Ixsir, qui a commencé avec 70 000 bouteilles produites dans la cave d’un ami en 2008, « année essai », en a produit 210 000 cette année et plafonnera, de toutes façons, à 500 000 cols. Au début, la cave commercialisera deux gammes : une moyenne, avec un blanc, un rosé et un rouge, et une haut de gamme comprenant un rouge et un blanc. Mais elle n’exclut pas de faire, « quand on sera sûrs de l’avoir », un très haut de gamme ou encore des éditions limitées par régions.
À terme, Wines of Lebanon aimerait exporter 60 % de ses bouteilles. Pour cela, elle s’appuie sur des distributeurs qui cibleront le marché de la diaspora libanaise mais pas seulement. Ixsir devrait être présent en Europe et aux États-Unis, mais elle pense aussi aux pays où le nom de Carlos Ghosn peut lui ouvrir des portes, comme le Japon « où il est une icône ». Pour la commercialisation au Liban, l’entreprise est en train de travailler les accords avec les restaurants haut de gamme mais aussi avec les supermarchés, « mais uniquement ceux qui savent traiter et stocker le vin comme il le faut », précise Hadi Kahalé. Pour la distribution, si rien n’est fixé, elle pense peut-être à passer par Enoteca, la cave à vins importatrice appartenant au groupe Debbané, un des actionnaires. La société compte aussi beaucoup travailler sur les ventes directes à la cave et au travers d’un site Internet, pour se constituer une clientèle très fidélisée. La cave fait partie d’un projet d’œnotourisme, et comprend un parcours de découverte pensé pour être ludique et didactique. Sur le terrain, une maison seigneuriale du XVIIe siècle va être rénovée pour accueillir un restaurant et une boutique de produits du terroir