L’année 2010 a été bonne pour le secteur du ciment, mais les prochains mois devraient être plus difficiles pour les trois industriels qui se partagent le marché libanais.
Les livraisons de ciment au Liban ont augmenté de 6,7% en 2010 atteignant 5,23 millions de tonnes, dont environ 10% de contrebande vers la Syrie.
Si l’on ajoute les 635.000 tonnes de ciments officiellement exportés, la production totale du pays en 2010 aura été de 5,86 millions de tonnes.
« L’année a été exceptionnelle », commente Jamil Bou Haroun, le responsable de la communication externe de Holcim, l’un des trois cimentiers du pays avec la Cimenterie nationale et Ciment de Sibline.
Selon une étude de la Blominvest Bank, Holcim détient la plus forte part de marché, 43 à 45%, contre 39% à 41% pour la Cimenterie nationale, et 16% à 18% pour Sibline. Les producteurs libanais sont protégés par le ministère de l’Industrie qui s’est engagé à ne pas fournir de licence d’importation tant que les prix locaux restent à un certain niveau.
D’après l’étude, le marché a progressé à un taux composé annuel de 10,3% ces dix dernières années, avec une croissance record de 23% en 2007, soutenue par la reconstruction post guerre de juillet 2006.
Depuis, la demande est tirée par le boom du secteur immobilier, alimenté par les entrées de capitaux dans le pays et l’appétit des investisseurs arabes pour le pays du Cèdre.
Mais cela risque de ne pas durer, comme en témoigne le tassement des ventes immobilières en janvier 2011.
« Cela laisse présager une croissance zéro ou même une légère baisse des livraisons de ciment en 2011, surtout qu’il n’y a pas de grands projets d’infrastructures annoncés pour l’année à venir », souligne le PDG de La Cimenterie Nationale, Pierre Doumet, dans un entretien au Commerce du Levant.
La Blominvest Bank estime que le marché devrait décliner à un taux annuel composé de 0,8% entre 2010 et 2014.
Les cimentiers devront donc se tourner davantage vers l’exportation, notamment vers la Syrie, l’Irak, et l’Egypte, qui pratiquent des prix supérieurs aux tarifs libanais (entre 120 et 140 dollars). A environ 86 dollars la tonne, le ciment libanais reste compétitif, même avec les frais de transport, qui peuvent atteindre jusqu’à 40 dollars la tonne.
Mais les marchés traditionnels du ciment libanais commencent aussi à arriver à saturation. C’est notamment le cas de la Syrie qui a absorbé 70% des exportations libanaises en 2010, contre 20% pour l’Egypte, 5% pour l’Irak et 5% pour Chypre. La Cimenterie Nationale a assurée la majeure partie de ces exportations, soit 615.000 tonnes, selon son PDG.
La Syrie en particulier a augmenté sa capacité de production dans l’objectif d’atteindre l’autosuffisance. Le cimentier français Lafarge y a développé ses activités pour produire environ 3 millions de tonnes par an, ce qui lui permet de couvrir à lui seul le tiers de la demande syrienne.
« C’est pourquoi nous cherchons aujourd’hui de nouveaux marchés en Europe », explique Bou Haroun. « Nous nous intéressons particulièrement aux marchés espagnols et portugais » précise Doumet.
Mais « la concurrence est rude, notamment du côté de la Turquie, qui exporte 15 millions de tonnes par an », ajoute Bou Haroun.
Et la concurrence risque encore de se durcir avec la flambée des prix des carburants. « Une hausse supplémentaire ne pourrait qu’avoir des répercussions sur le prix de la tonne de ciment produite au Liban, alors que le prix du carburant en Egypte ou en Irak est de loin inférieur », souligne Pierre Doumet.
Holcim a d’ailleurs dû augmenter ses prix début 2011, passant à 88 dollars la tonne en moyenne, selon Bou Haroun.


