Le groupe Audi-Saradar a choisi de se désengager du secteur de l’assurance en cédant 81 % du capital de LIA Insurance au groupe marocain Saham devenu numéro un africain (hors Afrique du Sud) notamment grâce au rachat d’un groupe panafricain à capitaux libanais.

Le groupe marocain Saham Finances a investi 105 millions de dollars pour acquérir 81 % de LIA Insurance, filiale du groupe Audi-Saradar. La clôture de la transaction qui valorise la compagnie d’assurances libanaise à 130 millions de dollars a été annoncée lors d’une conférence de presse commune de Samir Hanna, CEO du groupe Audi-Saradar, et Moulay Hafid Elalamy, fondateur et président du conseil d’administration de Saham Finances.
Le patron marocain qui a côtoyé des Libanais sur les bancs de l’université et affirme avoir « appris » de leur manière de faire des affaires à long terme sans se préoccuper des aléas de la conjoncture dirige le plus grand groupe africain d’assurances (hors Afrique du Sud) et considère l’entrée sur le marché libanais comme le point de départ d’une stratégie d’expansion au Moyen-Orient. « Les perspectives de croissance sur nos marchés sont de 10 % par an, alors qu’en Europe, vers laquelle les sociétés marocaines se tournent naturellement, c’est la stagnation. »
Saham Finances est, avec Saham Offshoring et Saham Santé, l’une des filiales du groupe Saham, créé à Casablanca en 1995, qui emploie 5 600 personnes et a réalisé un chiffre d’affaires de 802 millions de dollars en 2011.
Son expansion hors du marché marocain, où sa société CNIA est quatrième du marché des assurances, s’est notamment effectuée grâce à l’acquisition fin 2010 du groupe panafricain Colina à capitaux libanais. Colina appartenait alors à 85 % au groupe Libano-Suisse. Sous l’impulsion de son PDG Michel Pharaon, la Libano-Suisse avait racheté la compagnie ivoirienne en 1989 et entamé une expansion en Afrique de l’Ouest dans un premier temps, puis en Afrique centrale pour devenir en une dizaine d’années numéro un de cette zone. Grâce à cette acquisition, Saham est désormais présent dans 15 pays d’Afrique où il détient 20 compagnies d’assurances, ainsi qu’une société de réassurances et deux sociétés d’assistance.
Le groupe marocain qui compte dans son capital Abraaj Capital et la SFI (groupe Banque mondiale), entrés à hauteur de 250 millions de dollars chacun, pour une part de 18,75 % du capital chacun, se dit particulièrement satisfait d’avoir acquis « des actifs de qualité » : LIA Insurance est capitalisée à hauteur de 65 millions de dollars et affiche une rentabilité de 18 %.
À partir de cette “base saine”, Moulay Hafid Elalamy a deux objectifs de croissance, interne et externe. Tout en comptant sur le management libanais – « nous sommes marocains, mais la société restera libanaise et cette transaction est davantage un partenariat qu’une acquisition » –, il a l’intention d’apporter à LIA son savoir-faire afin de développer de nouveaux produits. Quant à la croissance externe, elle commencera d’abord par le Liban, puis le Moyen-Orient, avec l’objectif de s’implanter notamment en Irak, en Syrie et en Arabie saoudite. « Les Libanais sont des modèles pour les Marocains. En particulier dans le secteur de la finance, affirme Moulay Hafid Elalamy. Lorsque je vois l'étendard de la Bank Audi dans le monde, je me dis que nous sommes capables d'entamer notre développement à partir du Liban. D’autant que dans notre secteur, on trouve des Libanais dans les plus hautes sphères de l’assurance et de la réassurance dans le monde. »
Bank Audi, qui encaisse 46 millions de dollars nets avec cette transaction, semble satisfaite du prix obtenu : la compagnie est valorisée 12 fois ses bénéfices et deux fois sa valeur comptable. Mais la décision de se désengager de l’assurance est surtout stratégique. « Cela n’a pas de sens pour une banque de rester propriétaire d’une compagnie d’assurances s’il faut consolider les deux activités, car cela revient in fine à garantir l’activité d’assurance à partir de la base des dépôts », explique Samir Hanna, selon qui les règles prudentielles de Bâle III confirment ce principe de gestion du risque. Il précise que la Bank Audi reste actionnaire à un peu moins de 20 %, juste en dessous du seuil de la consolidation.

 

Un marché à fort potentiel

Primes/habitant
Liban : 332 dollars
Maroc : 81 dollars
Moyenne mondiale : 634 dollars

Marché de l’assurance en 2011
(en dollars)
Liban :1,2 milliard , +13 %
 Maroc : 2,7 milliards, +9 %
Moyen-Orient : 25 milliards, +11 %

Source : Saham Finances.