43 ans
Directeur général d’Iwan Maktabi
Collection : débutée au milieu des années 1995. Environ 70 œuvres
Première œuvre acquise : des fragments de tapis anciens
Dernière œuvre acquise : une jarre surdimensionnée de l’artiste iranien Farhad Moshiri (1963)

Chez les Maktabi, on hésite toujours entre patrimoine et modernité. Pour preuve, les boutiques de tapis Iwan Maktabi : on y vend bien sûr des tapis traditionnels. Mais la plupart sont aussi truffés de pièces modernes comme cette réinterprétation d’un tableau de Ayman Baalbaki (1975), une pièce unique réalisée avec la connivence du peintre lui-même. « Collectionner, c’est aimer… De manière obsessive. »
Mohammad Maktabi a toujours baigné dans l’art. Son père lui-même collectionne les œuvres d’art islamique. Du coup, le fils s’attache, par souci de “compétition inconsciente” avec son père, à l’art contemporain. Il s’intéresse d’abord aux maîtres actuels de la calligraphie iranienne ou arabe. « Ma famille est venue d’Ispahan pour s’installer à Beyrouth en 1926. » Ils y ont conservé des liens aussi bien commerciaux que familiaux. « Cette proximité explique sans doute mon intérêt, même si l’art iranien me semble aussi posséder une énergie, encore absente de la scène arabe. » Sa première œuvre d’un artiste iranien ? Rien moins qu’une sculpture, “Pink heech”, de Parviz Tanavoli (1937), le père de l’art contemporain iranien. Mohammad Maktabi ne donnera pas le prix. Mais une sculpture similaire s’est vendue en 2011 chez Christie’s pour un peu moins de 100 000 dollars. « J’ai besoin de regarder cette pièce d’un mètre cinquante chaque matin. Cela fait partie de ma vie. »
Ce besoin ne connaît guère de limites financières, « même si ces acquisitions se font inévitablement au détriment d’autres. » Aucun sentiment d’insatisfaction ici. Sans doute parce que la possession chasse toute amertume. D’ailleurs, sa dernière acquisition, une jarre surdimensionnée du sculpteur iranien Farah Moshiri, il l’a pourchassée sept années avant de la débusquer auprès d’un collectionneur canadien. « Je la voulais absolument. » Cette pièce enferme le désir, la vie, ou la mémoire, affirme l’artiste. « Je recherche l’originalité, une libre réinterprétation du passé. Autrement, je préfère acheter des pièces anciennes. » Ainsi, la boucle est-elle (presque) bouclée : Mohammad Maktabi fait retour vers des œuvres que, précisément, son père a aimées.