La tendance générale des marchés boursiers est positive, soutenue par la reprise économique mondiale et la baisse des prix pétroliers. Ils devraient croître entre 5 % et 25 % en 2015, selon le Crédit agricole suisse. Mais la diversification, en termes géographiques et sectoriels, reste de mise. Alors qu’au Japon et en Europe, l’annonce par les banques centrales de nouveaux plans d’assouplissement ont eu un effet positif sur les marchés boursiers, les perspectives aux États-Unis sont plutôt à une accalmie, après deux années de frénésie, sous l’impulsion du dernier Quantitative Easing. Certains y craignent même un ajustement à la baisse dans le sillage de l’éventuelle hausse des taux par la Fed. « Cela s’est déjà produit à plusieurs reprises dans l’histoire financière américaine », souligne Patrick George, directeur des investissements à la FFA Private Bank. En février 1994, juin 1999 et juin 2004, l’indice S&P 500 s’était contracté de 4 % en moyenne durant les trois premiers mois suivant la hausse du taux directeur, selon Goldman Sachs Global Investment Research. Dans l’expectative, le marché boursier américain n’évolue d’ailleurs que faiblement. L’indice Dow Jones a progressé de 2 % depuis fin décembre, passant de 17 823 à 18 252 points à la mi-mai. « Si la Fed reporte sa décision au-delà du quatrième trimestre, le marché pourrait néanmoins remonter », tempère Patrick George. Mais les opportunités de placement ne manquent pas, même en cas de hausse des taux. Certaines actions pourraient même prendre de la valeur à moyen terme, notamment les titres financiers, estiment les analystes. « Avec la hausse des taux d’intérêt, les banques pourront réaliser des marges plus amples », explique Georges Abboud, directeur de la banque privée de la BlomInvest. Selon lui, les investisseurs pourraient également miser sur les actions automobiles américaines, soutenues par un pétrole plus faible, et les titres propres au secteur de la consommation, favorisé par un plus grand pouvoir d’achat. Le Crédit agricole suisse privilégie, quant à lui, les PME, « à l’exception du secteur de la technologie, les multinationales américaines verront leurs résultats quelque peu pénalisés par l’affermissement du dollar (…). Depuis février, l’indice Russell 2000 (qui comprend environ 2 000 entreprises à petite capitalisation, NDLR) surperforme les autres indices américains tels que le S&P 500 et le Dow Jones », souligne à cet égard Christina Azouri, conseillère en placements au Crédit agricole suisse. Contrastant avec la performance et les perspectives boursières aux États-Unis, le marché européen connaît, quant à lui, une embellie. Des indices comme le DAX, le CAC 40 ou le Stoxx Europe 600 index ont déjà enregistré une forte croissance depuis le début de l’année (+17 % en moyenne). « L’injection massive de liquidités pourrait mener à la même effervescence observée aux États-Unis », souligne Patrick George. Selon lui, la forte valorisation des entreprises européennes pourrait néanmoins limiter l’impact de l’assouplissement monétaire. Le coefficient de capitalisation des bénéfices s’élevait, pour l’indice CAC 40, à plus de 25,7 début mai et à près de 25 pour le Stoxx Europe 600 index, contre 11 et 13,8 fin 2011. Selon la banque HSBC, le marché boursier européen – hors Royaume-Uni – reste le plus attrayant. « Nous favorisons les actions des sociétés tournées vers l’export, celles du marché de luxe et des grandes capitalisations », précise Peter Yeates, directeur général de la HSBC au Liban.
Mais certains craignent une surchauffe, voire l’éclatement d’une bulle boursière en Europe. « L’indice DAX s’élevait à moins de 9 000 points en octobre dernier, contre un plus haut à plus de 12 000 en avril, alors que l’économie allemande est loin d’être euphorique. Cette déconnexion entre les fondamentaux économiques et les marchés boursiers, alimentée par le QE, risque d’être néfaste », met ainsi en garde l’économiste Paul Doueihy. Au Japon, les perspectives boursières sont également positives, à la lumière du “Bazooka” qui dope l’activité depuis le dernier trimestre de 2014. L’indice Nikkei 225 a bondi de quelque 15 000 à plus de 20 000 points en quelques mois.
Enfin, dans les pays émergents, les pronostics sont nuancés. La HSBC a maintenu sa position sur l’Inde, la Chine et l’Indonésie, même si globalement elle est désormais “neutre” sur le marché asiatique, et a dégradé à “négative” sa position sur la Russie. L’Inde apparaît comme l’“exception” dans ce paysage. Les gérants de portefeuille sont de plus en plus nombreux à favoriser les actions indiennes, soutenues par une nouvelle dynamique politique et économique.

Le marché boursier du Golfe résiste

Au Moyen-Orient, notamment dans le Golfe, les places boursières font preuve de résilience, en dépit des tensions géopolitiques et de la chute des prix du pétrole. Cela est principalement dû au fait que « les compagnies pétrolières arabes ne sont pas cotées en Bourse, contrairement à Gazprom en Russie ou Petrobas au Brésil, par exemple. Elles n’ont donc pas été pénalisées par la chute des cours. En revanche, le secteur pétrochimique a été affecté, même s’il ne représente que 7 à 8 % de la capitalisation boursière », explique Sébastien Hénin, gérant de portefeuille chez The National Investor (TNI), une banque d’affaires basée à Abou Dhabi.
En parallèle, « les autres secteurs, comme la banque, l’immobilier et les télécoms profitent de la dynamique actuelle et du maintien des dépenses d’investissements », ajoute-t-il. Hésitante durant les premiers mois de l’année, la Bourse de Dubaï s’est brutalement réveillée après la publication des résultats trimestriels, supérieurs aux estimations. Le Dubai Financial Market General Index (DFMGI) a bondi de près de
3 000 points en décembre dernier, à plus de 4 000 points début mai. Autre facteur favorable au marché boursier du Golfe : l’ouverture en juin de la place de Riyad aux investisseurs étrangers, pour la première fois depuis des décennies.
« Cela devrait paver la voie à une éventuelle entrée de l’Arabie saoudite dans l’indice MSCI Emerging Market, qui représente uniquement les places qatarienne, émirienne et égyptienne, et ne pèse qu’à hauteur de 1,4 % de l’indice mondial (…) Cela est susceptible de conférer un plus grand poids à la région et d’attirer ainsi davantage d’investisseurs à terme », souligne Sébastien Hénin.