Le problème – Monsieur N. travaille depuis cinq ans en tant qu’ingénieur auprès d’une société de construction. Son directeur l’a récemment convoqué pour l’informer qu’il serait muté en Gambie pour une mission de chantier qui durerait près de 18 mois. La société payera les frais de résidence et de transport, ainsi que le prix des billets allers-retours pour son congé annuel au Liban. Le directeur se prévaut d’une clause de mobilité insérée dans le contrat de travail, qui permettrait à la société de changer le lieu de travail de Monsieur N., sur le territoire libanais ou à l’étranger. Ce dernier ne peut malheureusement pas accepter cette affectation en raison de la gravité de l’état de santé de son père. De plus, cette mutation ne lui rapporte aucun avantage financier. La société peut-elle le contraindre à quitter le pays ? Et qu’adviendrait-il s’il refusait une telle affectation ?
Le conseil de l’avocat – Le lieu de travail est un élément essentiel du contrat de travail qui lie le salarié à l’employeur. Ce dernier ne peut décider unilatéralement du changement d’affectation que dans le cas où le nouveau lieu de travail reste dans le même secteur géographique. En dehors de cette exception, le changement de lieu de travail constituerait une modification du contrat et l’employeur devrait obtenir l’accord du salarié pour mettre en œuvre la mutation. Toutefois, il en est autrement lorsque le contrat de travail comporte une clause de mobilité prévoyant expressément la mutation du salarié à l’étranger, comme dans le cas présent. En effet, dès lors que le salarié signe une telle clause, il ne peut plus invoquer une modification de contrat pour refuser une nouvelle affectation décidée par son employeur. En refusant la mutation, Monsieur N. risque d’être licencié sous sa propre responsabilité. En revanche, si la décision de le muter était injustifiée, et si elle n’est pas dictée par l’intérêt de la société (ce qui ne semble pas être le cas de l’espèce), cette modification serait considérée comme portant sur un élément substantiel du contrat et entraînerait, en cas de refus du salarié, la rupture du contrat de travail à la charge de l’employeur. Ainsi, la Cour de cassation a décidé que, s’il appartenait à l’employeur d’organiser le travail dans le cadre de son entreprise et dans l’intérêt de celle-ci, la modification du lieu de travail d’une employée, par la seule volonté de l’employeur, pour des raisons non justifiées par les besoins de l’entreprise et les nécessités du travail, constituait une modification portant sur un élément substantiel du contrat de travail. De plus, cette modification entraînait dans le cas de l’espèce des conséquences négatives sur la situation de l’employée (d’ordre moral et professionnel) et sur les attributions de celle-ci, ce qui justifiait le refus de l’employée. Par conséquent, la Cour de cassation a considéré que cette modification équivalait à un licenciement abusif, car elle se basait sur des raisons injustifiées et a condamné l’employeur à verser des indemnités équivalant à six mois de salaire en se basant sur l’article 50, alinéa d-1 du code du travail (Cass. civ., 8e ch., n° 47/2001, 10 mai 2001).

___________________
Posez votre question

Si vous êtes confrontés à un problème juridique d’intérêt général, n’hésitez pas à nous écrire. Notre avocat vous conseillera.
Le Commerce du Levant
Rubrique juridique
Fax : 05/453644
[email protected]