Un article du Dossier

Le Liban fait son cinéma

Rares sont les films libanais qui peuvent se targuer de faire des bénéfices. Avec près de 60 000 dollars de profits sur les plus de 800 000 investis, “Welaane” est entré en 2017 dans ce cercle très restreint. Eagle Films, la société productrice, a appris avec le temps à concocter la bonne recette. Dans le cas de “Welaane”, celle-ci a été mijotée avec soin : une dose de stars du petit écran (Maguy Bou Ghosn, Carlos Azar) une bonne plâtrée de marketing (un budget de 100 000 dollars pour une omniprésence de plusieurs semaines dans les médias et sur les panneaux publicitaires du pays), le tout au service d’une comédie romantique grand public sur un thème consensuel. « Les pompiers sont des hommes de l’ombre qui sont partout, mais que personne ne remarque, explique Jamal Saman, le directeur d’Eagle Films, qui a confié l’écriture du film à Claude Saliba, auteure rodée aux longs-métrages grand public, et la réalisation au non moins habitué du genre, Élie F. Habib. Dans cette région entourée par le feu, je voulais faire quelque chose qui puisse faire rire du sud du Liban à la Békaa. » Ce précepte, Jamal Saman l’applique depuis la fin des années 2000, quand sa société se lance pour la première fois dans les longs-métrages au Liban. Eagle Films produit alors “Bébé”. Un carton avec plus de 158 000 entrées. « Tout le cinéma libanais évoquait la guerre civile, le marché avait besoin de ces comédies familiales légères », justifie Jamal Saman. Dans la même veine viendront ensuite “Vitamin” (180 000 entrées), “Al-Sayida al-Thaniya” (102 000 entrées), puis “Welaane” le dernier du genre en décembre 2016. Financé intégralement par la société Eagle Films (dont Jamal Saman et Maguy Bou Ghosn sont actionnaires), ce long-métrage réalise au terme de trois mois de projection au Liban plus de 153 000 entrées. La septième meilleure performance de l’histoire pour un film libanais. À présent, “Welaane” devrait poursuivre son chemin dans les salles du monde arabe (Émirats arabes unis, Koweït, Qatar, Jordanie, Égypte…) − avec des entrées cumulées cependant bien inférieures aux résultats libanais − avant d’atterrir ensuite sur le petit écran. Moyennant la retransmission quotidienne de la bande-annonce lors de sa présence dans les salles, les chaînes LBCI puis MTV diffuseront le film au Liban d’ici à deux ans. À l’étranger, des chaînes payantes régionales comme OSN (contre 40 000 à 50 000 dollars) ont d’ores et déjà acheté le droit de passer, puis héberger le film sur leur canal et leur plate-forme de vidéo à la demande (VoD). Autre relais de diffusion, les compagnies aériennes qui pourraient rapporter selon le producteur entre 15 000 à 20 000 dollars. « Ce qui marche c’est de financer son film de A à Z, estime le directeur d’Eagle Film, dont la société réalise la majorité de ses bénéfices sur la distribution de films libanais et étrangers (50 % de son activité), et la production de séries télé. Un fonds de commerce lucratif. « Je ne suis pas un homme de festival, je fais un cinéma commercial, reconnaît le producteur. Jamal Saman en est sûr, il œuvre à la construction d’une industrie cinématographique dans son pays. À terme, il rêve de dépasser la barre du demi-million de spectateurs dans les salles libanaises. Il lui faudra pour cela faire bien mieux que le long-métrage libanais le plus vu de l’histoire au pays du Cèdre : “Wa Hallak La Wein”. Entre 2011 et 2012, la comédie dramatique de Nadine Labaki avait enregistré plus de 320 000 entrées.   

“Welaane” 

Réalisation : Élie F. Habib

Production : Eagle Films

Budget : 800 000 dollars

Financement : Eagle Films


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