Avec le nouveau gouvernement se dessine une nouvelle politique économique basée sur l’ouverture des marchés et la dynamisation de l’activité. Toutefois, cette politique nécessite un ensemble
indissociable d’actions pour garantir son succès.
Après des années d’errance, les autorités auraient enfin compris l’inéluctable nécessité d’ouvrir l’économie nationale au monde pour s’y intégrer avec succès. Le Liban devrait ainsi chercher à retrouver la formule gagnante qui avait contribué à sa prospérité antérieure : liberté et facilité d’entreprendre, ouverture et interaction avec les marchés extérieurs, dynamisme et professionnalisme du secteur privé…
Cependant, cette approche doit traiter l’ensemble des dysfonctionnements économiques en englobant les aspects législatifs, sociaux et éthiques.
Face aux multiples économies concurrentes et à la globalisation de toute activité économique, la bataille ne peut plus être gagnée par les discours, mais par des actions concrètes mesurables sur le terrain. Ainsi, rien ne sert de se vanter de la liberté d’entreprendre si la moindre initiative est ralentie ou même avortée par une administration publique improductive et corrompue ou si les investissements ne sont pas protégés et régulés par une législation claire et une justice opérante et efficace.
La réussite ne peut pas se jouer sur un seul front, au risque de déstabiliser l’ensemble de l’édifice économique. Dans cette logique, l’action gouvernementale, qui semble se focaliser actuellement sur des mesures législatives aux dépens des réformes structurelles, risque vite de se heurter sur les mêmes incohérences du passé. Ceci est d’autant plus critique qu’aucune mesure corrective n’a été jusqu’à présent appliquée. Bien au contraire, l’histoire récente du Liban révèle qu’à chaque égarement, on trouvait ensuite les personnes et les discours pour absoudre ces erreurs sans même chercher à enrayer leurs causes ou mettre en place des garde-fous pour l’avenir.
Ainsi, aucune modernisation ne portera totalement ses fruits si une refonte globale de l’administration publique n’est pas opérée, non seulement au niveau des procédures et des hommes, mais surtout au niveau de l’éthique et de la mentalité des fonctionnaires et des responsables en insufflant les notions de service public et de “redevabilité”. L’assainissement de la vie politique rentre dans ce cadre, notamment en levant la mainmise des politiciens sur l’administration et sur la gestion des affaires publiques.
Il est ainsi inadmissible qu’un secteur, et encore moins une entreprise ou des individus, puisse prendre en otages l’ensemble de l’économie et des Libanais. En effet, les raisons sociales maintes fois évoquées pour stopper les privatisations et même la réforme administrative révèlent l’étroitesse de la vision économique de certains politiciens et même de quelques économistes. Ceux-ci sacrifient dans les faits une main-d’œuvre qualifiée, qui faute de travail se retrouve poussée à l’émigration, pour maintenir les privilèges et la situation de rente d’une poignée de fonctionnaires improductifs et sous-qualifiés mais bénéficiant de protection et d’appui sectaire ou clanique. De plus, ils perpétuent la médiocrité des services publics rendus au détriment de l’ensemble de l’économie nationale.
De toute façon, ce processus de privatisation est devenu incontournable pour infléchir le poids de la dette publique d’autant plus que le gouvernement semble avoir fait le choix de la réduction des droits de douane qui reste la principale source de revenus du Trésor public. Cette dernière initiative bien que courageuse et nécessaire porte toutefois des risques financiers majeurs au cas où la relance de l’activité économique ne serait pas à la hauteur des attentes. En effet, le déséquilibre des finances publiques pèse de tout son poids sur toute décision ou initiative économique et financière.
Pour contrer cette lourdeur structurelle, les responsables doivent faire preuve de courage, de rigueur et d’ingéniosité afin de se libérer des idées préconçues et des tabous qu’ils se sont imposés volontairement et involontairement. La restructuration de la dette est ainsi indissociable du traitement du coût et des dépenses du secteur public où certaines directions et administrations continuent à bénéficier de largesses financières qui n’ont jamais été à la portée du pays. Il s’agit désormais de transformer “l’entente nationale” d’un alibi à une hémorragie financière vaseuse, qui a bénéficié à quelques heureux profiteurs, en une source de revenus et de prospérité pour l’ensemble des Libanais.


