Les 24 et 25 septembre dernier, le Parlement a adopté 16 projets de lois (sur les 29 initialement prévus). Les députés ont en effet jugé ces projets ou propositions de lois comme une procédure d’urgence, alors que la formation du gouvernement tarde toujours. L’adoption de ces textes, il est vrai, fait en effet partie des exigences des bailleurs de fonds pour financer une partie du programme d’investissements, décidé lors de la Conférence économique pour le développement par les réformes et avec les entreprises (CEDRE) d’avril dernier. À cela s’ajoutent des prêts ou des dons dont le déblocage était en attente d’une approbation parlementaire.

Marwan Assaf

PROPOSITIONS DE LOIS

- Rédigée en 2005 par le ministère de l’Environnement, la loi portant sur la gestion des déchets (tous types de déchets) a finalement été adoptée le 24 septembre dernier. Elle traînait dans les tiroirs de l’Assemblée depuis 2012. Cette nouvelle législation entérine le principe d’une gestion décentralisée des déchets. Elle laisse ainsi aux municipalités le soin de collecter, traiter, valoriser et détruire les déchets produits dans leur région. La loi prévoit également la création d’une agence nationale, sous la supervision du ministère de l’Environnement, composée d’experts indépendants et de représentants de la société civile. Cette agence est censée contrôler l’élaboration des cahiers des charges et la bonne application des projets mis en place par les édiles. En revanche, la loi ne précise pas les techniques à mettre en œuvre. Un manque de précision qui pour la société civile pave la voie à l’incinération, citée comme un exemple de “méthodes scientifiques et modernes” dans son article 18.

- Initiée à partir de 1999, la proposition de loi sur les transactions électroniques et les données personnelles était en sommeil au Parlement depuis 2010. Elle a finalement été approuvée le 24 septembre dernier devant l’Assemblée. « C’est un ensemble de circulaires dont la portée dépasse le cadre de la seule signature électronique », précise Ali Nahlé, directeur du département technologie de l’information de la Banque du Liban. En théorie, elle devrait donc permettre une digitalisation de l’ensemble des procédures bancaires et favoriser la création de banque 100 % numérique. « Et prévoit même la possibilité de monnaie électronique ou d’e-wallet. » Le texte législatif entérine d’ailleurs le rôle de la Banque centrale comme autorité de certification, qui sera la seule au Liban habilitée à émettre des certificats numériques. Mais la loi ne se cantonne pas au monde bancaire : elle réglemente les transactions du commerce en ligne, donne un cadre légal au traitement et à la conservation des données personnelles et organise même le secteur des fournisseurs d’accès (FAI). Cette initiative représente “une réelle avancée” dans la protection des données personnelles des citoyens. « La sécurité des données est la base de la confiance, qui est le socle essentiel du développement de l'économie numérique », se réjouit Ali Nahlé.

- Autre loi votée, celle sur la médiation qui permet au juge, saisi d’un litige, de proposer aux parties en conflit de recourir à un médiateur. Pour cela, il faut que toutes deux s’accordent sur le principe ainsi que l’objet sur lesquels la médiation porte. Le juge décidera alors de faire appel à l’un des centres agréés par le ministère de la Justice. Lors de la médiation, les délais de prescription sont suspendus, le temps que les parties trouvent un accord. Un avantage alors que, lorsque la médiation n’est pas décidée par un juge, les délais continuent toujours de courir. Une fois acceptée, la décision de s’engager dans la procédure de médiation ne peut faire l’objet d’un appel.

- Les députés ont adopté la loi sur la protection des lanceurs d'alerte. Cette loi garantit l’anonymat du whistleblower et la confidentialité des informations recueillies grâce au signalement. Le but est de protéger les lanceurs d’alerte contre le harcèlement, les discriminations professionnelles auxquelles ils pourraient faire face. Elle peut aller jusqu'à lui assurer une protection physique (sur le modèle de la protection des témoins) si besoin est. L'autre innovation relève des incitations financières qui sont accordées aux auteurs d'un signalement. En guise de récompense (ou de dédommagement), la loi prévoit de leur attribuer un pourcentage des montants qu'ils permettraient à l'État de recouvrer. Par la suite, un “haut comité contre la corruption” devrait venir renforcer ce texte relatif à la protection des lanceurs d'alerte afin de recueillir les signalements et de centraliser l'action judiciaire menée.

- Portée par le député Joseph Maalouf (Forces libanaises), la proposition de loi qui vise le renforcement de la transparence dans le secteur des hydrocarbures impose aux différentes autorités responsables (Conseil des ministres, ministère de l’Énergie, ministère des Finances, Autorité de l’énergie (LPA) et compagnies pétrolières) une série d’obligations. En premier lieu, la publication des documents : contrats d’exploration et de production signés avec les compagnies pétrolières, licences d’exploration attribuées, données liées à l’avancement des travaux… Les députés et la société civile pourront ainsi assurer le suivi avec les acteurs concernés.

FONDS ACCORDÉS

- Augmentation des fonds accordés par le Liban à la Société islamique pour le développement du secteur privé (montant non communiqué).

- Accord de financement de la Banque mondiale pour renforcer la gouvernance financière au sein du ministère des Finances. À ce jour, une avance de 6 millions de dollars a été accordée.

- Prêt de 120 millions de dollars de la Banque mondiale en vue du renforcement de la couverture santé. Cet accord vise à assurer des services de santé “de qualité” aux Libanais non assurés et vulnérables et des réfugiés syriens au Liban, une population estimée à 340 000 personnes. Le prêt arrive à échéance dans 23 ans et le Liban bénéficiera d’une période de grâce de six ans.

- Prêt de 200 millions de dollars de la Banque mondiale pour la réhabilitation et la maintenance du réseau routier. La Banque mondiale estime que 500 kilomètres de route sont à réhabiliter d’urgence et qu’environ un million de Libanais bénéficieront de ce projet. Ce prêt arrive à échéance dans 32 ans et demi et le Liban bénéficiera d’une période de grâce de sept ans.

- Prêt d’environ 80 millions de dollars (68,5 millions d’euros) de la Banque européenne d’investissement (BEI) pour l’agrandissement et l’amélioration de l’usine de traitement préliminaire des eaux usées de Ghadir (de 50 000 m3 à 140 000 m3 par jour). La BEI assure ici 46,75 % du total des travaux (146 millions d’euros), tandis que la Banque islamique de développement et l’État libanais se chargent du reste (respectivement 47,79 % et 5,46 %). Ce projet transformera cette station d’usine de prétraitement en usine de traitement primaire des eaux usées. Elle améliorera la qualité de l’eau rejetée dans la mer et réduira les polluants qui y sont rejetés. Environ un million de Libanais devraient profiter de ce projet.

- Projet pour la construction de deux systèmes d’assainissement des eaux usées dans le Chouf. Financé par un prêt de 51 millions de dollars (15 millions de dinars koweïtiens) par le Fonds koweïtien de développement économique arabe à 2,5 % sur 25 ans, avec une période de grâce de cinq ans.

- Allocation d’une enveloppe exceptionnelle de 66 millions de dollars (100 milliards de livres libanaises) pour subventionner les prêts logement pour 2018.