Le problème Mademoiselle F. est responsable d’un magasin de prêt-à-porter dans un centre commercial. Elle a quitté son poste sans raison pendant plus de deux heures, causant un préjudice à son employeur, puisque les clients n’ont pas pu être accueillis durant son absence. Mademoiselle F. avait auparavant reçu deux avertissements écrits de la direction des ressources humaines lui reprochant d’avoir contrevenu de manière flagrante aux dispositions du règlement intérieur de la société. Le directeur général de l’entreprise aimerait savoir s’il peut licencier Mademoiselle F. et quelles seraient les indemnités auxquelles elle aurait droit.

Le conseil de l’avocat – Selon l’article 50 du code du travail, l’employeur et le salarié ont chacun le droit de résilier le contrat de travail à durée indéterminée à tout moment. Cependant, l’exercice de ce droit ne doit pas être abusif et il convient de respecter les délais de préavis impartis par la loi aux deux parties. Le législateur a toutefois prévu des cas où l’employeur peut résilier le contrat de travail sans payer aucune indemnité, ni même adresser un préavis (article 74 du code du travail), notamment lorsque le salarié commet trois violations graves au règlement intérieur de l’entreprise au cours de la même année (alinéa 4 de l’article 74 précité). Mais ces dispositions ne sont susceptibles d’être appliquées que si la société dispose d’un règlement intérieur. Selon l’article 66 du code du travail, tout employeur de plus de quinze salariés est tenu de rédiger un règlement intérieur encadrant le travail au sein de son entreprise. Ce règlement, facultatif pour les entreprises de moins de quinze salariés, prévoit un certain nombre d'obligations réciproques, notamment en matière de sécurité, de congés ou de sanctions, que le salarié et l'employeur doivent respecter. Le règlement intérieur s'impose donc à tous les salariés de l'entreprise. Il doit être préalablement certifié par le ministère du Travail, qui en contrôle le contenu et vérifie qu’il est conforme aux lois en vigueur. Ce règlement doit être également affiché et aisément accessible sur les lieux de travail.

La mise en œuvre de l’alinéa 4 de l’article 74, qui autorise la résiliation du contrat de travail sans indemnité ni préavis, ne peut néanmoins avoir lieu que si trois éléments sont réunis.

D’abord l’infraction au règlement intérieur doit être importante et pouvoir être qualifiée de faute lourde. Cette violation doit donc avoir porté un réel préjudice à l’entreprise. En cas de litige, le juge aura seul qualité pour apprécier le degré de gravité de la faute. Ensuite, pour justifier le licenciement, la violation du règlement intérieur par le salarié doit avoir eu lieu trois fois durant une même année et ceci à dater de la première violation perpétrée.

Enfin, l’employeur a l’obligation de notifier le salarié par écrit de toute infraction commise dès qu’il en a pris connaissance. Ainsi, tout défaut de notification suite à une violation du règlement intérieur entraîne l’inapplicabilité de l’article 74. En effet, le but des avertissements écrits est de sensibiliser l‘employé aux conséquences de ses actes et à la précarité de sa situation afin de le dissuader de réitérer des agissements qui pourraient aboutir à son licenciement.

Il convient de souligner également qu’une partie de la jurisprudence (Conseil arbitral du travail – décisions 53/54, 126/64 et 572/64) considère que l’employeur a l’obligation de notifier le ministère du Travail de toute infraction au règlement intérieur commise par le salarié et cela quel que soit le degré de sa gravité. En pratique, les entreprises n’informent pas systématiquement le ministère du Travail des violations au règlement intérieur par les salariés.