On a beau disserter sur les méthodes “globalisantes” de marketing, la psychologie humaine est telle que le contact direct reste incontournable. Une assertion qui ressemble à un freudisme attardé, mais qui trouve quand même sa concrétisation dans la vente directe.

Il en faut du dynamisme, et de bons produits,
pour que la niche difficile de la
vente directe puisse rivaliser avec la vente
classique et la grande distribution. En définitive,
le créneau a su s’imposer, mais avec des
hauts et des bas au cours des 15 dernières
années. Les actrices de cet essor : des forces
de vente essentiellement féminines travaillant
à temps plein ou partiel dans des secteurs
variés, mais aussi des structures d’encadrement
basées sur la motivation.
La cosmétique, les petits articles de cuisine et
les vêtements sont autant de secteurs couverts
par la vente directe, que ce soit par présentation
instantanée du produit chez le client, ou à
travers des catalogues. Mais la gamme des
produits concernés tend également à se diversifier,
vers une plus grande sophistication.
Côté organisation, on parle de plus en plus
aussi de vente directe par réseau (VDR), appelée
parfois “multiniveau” ou “marketing de
réseau”. Il s’agit d’une méthode rajeunie de la
vente individuelle, mais qui met cette fois en
place un réseau de distributeurs indépendants
(DI) dont la rétribution fait l’objet d’un plan de
rémunération original et gratifiant. Chaque DI
peut, une fois formé, développer à son tour
par parrainage un réseau de DI, sur les ventes
duquel il sera rémunéré. C’est ce rôle fondamental
du distributeur indépendant, devenant
subitement “entrepreneur”, qui fait la particularité
de la VDR. Une façon de répondre favorablement
à l’ambition des vendeurs, qui était
plutôt limitée dans l’ancien système.
TROIS SCHÉMAS-TENDANCES
Si les systèmes de vente directe qui existent
au Liban se ressemblent, les marques se différencient
néanmoins par les supports adoptés.
On en dénombre trois essentiels : - Le face-à-face, connu aussi par le porte-àporte.
Ici, l’on pense tout de suite à Avon mais
aussi à Rainbow, Karsher et Kurby, qui sont de
nouvelles générations d’électroménagers vendus
à domicile par démonstration d’usage.
- Le système de party – ou de “sobhié” – cher
à Tupperware.
- La vente par correspondance (VPC), par
catalogue – connue en France à travers des
marques comme Yves Rocher et La Redoute.
Mais la Poste n’est pas notre fort, de sorte que
la version libanaise est une fusion – face-àface
+ catalogue – assortie d’une livraison par
la vendeuse ou via un bureau de relais. C’est
la méthode utilisée d’ailleurs au Liban depuis
plus de 20 ans par La Redoute et plus récemment
par des produits cosmétiques comme
Le Club des Créateurs de Beauté et Oriflame.
Mais qu’est-ce qui favorise l’essor de la vente directe sur un marché ? Deux facteurs
essentiels : d’une part, la hausse des prix sur
le marché classique face à la baisse du pouvoir
d’achat, et, de l’autre, le besoin d’un revenu
additionnel chez les femmes au foyer sans
grandes qualifications. Les professionnels du
secteur y ajoutent un facteur social : «La vente
directe correspond aussi à un style de vie, qui
offre à chacun des chances, des possibilités
de gain et la satisfaction d’avoir réussi à entreprendre
un business personnel».
Pour l’entreprise, opter pour la vente directe
est une forme de commercialisation qui se
caractérise par de bonnes possibilités de productivité,
sans investissement lourd. Mais les
conditions pour réussir se résument par deux
ingrédients essentiels :
• Un produit de qualité qui englobe également
un service après-vente irréprochable
et des stocks suffisants. Des stocks qu’il
faudrait manier différemment selon qu’on
est agent commercial du produit, ou industriel-
producteur. Il est également important
d’avoir un bon catalogue et de le renouveler,
c’est un peu comme une vitrine de
magasin que l’on change, ce qui permet de
redynamiser la consommation. La nouvelle
tendance, pour cette année, est de publier
un catalogue annuel contenant à peu près
200 références, quitte à sortir un supplément
pour certaines occasions durant l’année
(Saint-Valentin, fête des Mères...).
• Ressources humaines. Il faut surtout garder
en tête que les vendeuses sont des personnes
à la recherche à la fois d’un revenu et
d’un statut social. Elles n’ont pas l’esprit “mercenaire”,
mais sont plutôt sociables et aiment
apprendre. D’habitude celles qui réussissent
dans la vente directe trouvent la vente classique
assez ennuyante. Ainsi, pour animer des
réseaux, le coach idéal doit savoir jongler entre
la motivation de ces femmes-représentantes
et la satisfaction du consommateur final
auquel il n’a accès que par le biais de cellesci.
Et pour motiver, il faut offrir des cadeaux,
récompenser les meilleures vendeuses, et
proposer un système de commissions irréprochable
et transparent. En somme, investir sa
marge publicitaire sur ses vendeuses.
CAS D’ÉTUDE : ORIFLAME
Cette marque cosmétique suédoise, vendue
dans 60 pays par vente directe, a choisi en mai
2004 d’opérer au Liban, un des rares pays
où la maison mère n’a pas hésité à investir.
«Nous sommes convaincus qu’il existe
un potentiel énorme encore inexploité,
insiste Jean-Luc Bertrand, directeur de la
filiale libanaise. Les femmes ont un bon
niveau d’éducation et le marché cosmétique
est encore apte à se développer. Par
ailleurs, l’économie en difficulté encourage
la recherche de revenus supplémentaires».
D’ailleurs, Oriflame se caractérise par la
chance qu’elle donne à ses “consultantes”
de s’assurer une pérennité de revenus, non
seulement cumulables sur leurs ventes,
mais également sur celles du groupe
qu’elles arrivent à former, grâce à un système
de commissionnement propre. Selon
Bertrand, les revenus mensuels d’une
bonne consultante ayant 6 mois d’ancienneté
peuvent atteindre 3 000 $. C’est ce
qui explique en quelque sorte que, début
2005, Oriflame comptait déjà 2 200
consultantes à son actif.
Autre particularité de la marque : son
showroom, prévu à la fois pour accueillir et
former les consultantes, mais qui est aussi
une vitrine stratégique permanente –
située juste au croisement Chevrolet. Ce
qui donne une idée de plus aux promoteurs
potentiels d’un nouveau produit : pourquoi
ne pas commencer à lancer le produit par
vente directe avant de passer au schéma
classique ? L’idée est déjà opérationnelle
dans d’autres pays. On n’arrête pas le progrès
du commerce…
(*) Cadre commercial et responsable il y a quelques
années de la gestion de la gamme cosmétique “Le Club
des Créateurs de Beauté” (groupe Fattal), qui était commercialisée
par vente directe.
C
Éléments de comparaison
Vente directe Vente conventionnelle
Commercialisation sans gros Investissements en locaux,
investissements mobilier…
Vendeurs libres sans la lourdeur Coûts salariaux importants
de l’emploi fixe et rigides
Marketing direct grand public Besoin de campagnes pub régulières
Concurrence contournée Concurrence directe
(avec la boutique en face…)
Potentiel géographique illimité Expansion géographique limitée
par les investissements nécessaires
Décisions et actions lourdes Décisions applicables sur-le-champ
à mettre en oeoeuvre
Personnel inconstant et volatile Personnel constant, fiable
et contrôlable Jargon de la vente directe
(ou les quelques termes que s’échangent les pros entre eux)
Capital rendez-vous.
Nombre de rendez-vous
fixés et notés sur l’agenda
de la présentatrice.
Hôtesse. Personne qui invite
chez elle ses amies et
connaissances pour
une réunion menée
par une représentante
des produits dont
elle souhaite la
démonstration.
L’hôtesse n’a rien à
voir avec l’entreprise
elle-même.
Parrain ou marraine.
Qui a coopté (recruté)
un autre distributeur,
son filleul, et sera commissionné
sur lui pour la formation
et l’animation d’un
réseau.
Plan de rémunération.
Système de commission
avec un barème de rémunération
lié aux niveaux
de qualification et de
chiffres d’affaires réalisés.
Chaque société a son
plan spécifique.
Présentatrice. Envoyée par
la firme. On l’appelle aussi :
consultante, déléguée,
ambassadrice,
démonstratrice, représentante.
Recrutement.
Toute action
conduite dans la
perspective d’inciter
une personne
à devenir
vendeuse-déléguée.
Réunion.
Groupe de cinq
ou six personnes
en moyenne qui désirent
qu’on leur parle d’un
produit. Un terme souvent
remplacé par atelier, Rien à voir avec le télémarketing ?
Si, il existe bien des points
communs entre la vente
directe et le télémarketing,
dont notamment la
relation directe vendeurclient
en dehors d’un
point de vente. Mais ces
deux méthodes ne sont
pas pour autant toujours
comparables.
Un chef de file du télémarketing
au Liban est
Téléperformance, filiale
du groupe international
éponyme présent dans 30
pays. La société s’est
implantée au Liban (au
sein du groupe Fattal), en
2000, mais a dû subir, lors
de son lancement, la
mauvaise image qui était
véhiculée dans les pays
par des initiatives peu
professionnelles.
Aujourd’hui, elle s’est
imposée… même si l’activité
“vente pure et dure”
par téléphone reste minoritaire.
Car Téléperformance se
veut être une solution
téléphonique globale, ce
qu’on désigne communément
par “call center”.
Pratiquement, il
s’agit de gérer, à travers
46 postes 24h/24, toute
opération d’appels téléphoniques
massifs,
entrants ou sortants, que
ce soit pour vendre,
constituer une base de
données, évaluer une
campagne publicitaire,
étudier un marché – ou
s’assurer que les invités à
votre mariage seront
bien présents…