«Ces sacs allient esthétisme et protection de l’environnement. » Suzanne Khoury, propriétaire d’une boutique à Achrafié, parle ainsi de la marque libanaise de sacs Waste (gaspillage, en français). Sa particularité ? Les créations sont réalisées en Flex, un matériau qui entre dans la composition des affiches publicitaires. Le Flex peut être mat ou brillant, opaque ou transparent. Il est surtout imperméable et résiste au temps. Mais, petit défaut, il ne se recycle pas. D’où l’idée de Stéphanie Dadour et Waleed Jad, les deux créateurs de la marque libanaise, de l’employer pour la fabrication de sacs recyclés. Le concept n’est pas nouveau : la marque suisse Freitag utilise des bâches de camion depuis 1993 pour fabriquer des sacs très tendance, quand d’autres marques retraitent les pneus usés.
Les deux amis libanais se sont lancés en 2006 avec le Kees el-Doukan (le sac pour l’épicerie). En 2009, ils ont officialisé leur SARL. Waleed, Stéphanie et sa sœur, Jennifer, ont investi personnellement dans cette entreprise. « L’apport minimum selon la loi libanaise, soit 5 millions de livres libanaises (plus de 3 300 dollars) », assure Stéphanie. Le retour sur investissement ? « Les ventes ne font que commencer, nous ne savons pas encore », poursuit-elle. Le prix de vente aux enseignes intéressées varie de 25 000 livres libanaises (17 dollars) pour le Kees el-Doukan à 45 000 livres libanaises (30 dollars) pour le sac de plage, dit The It Bag.
Pour obtenir la matière première, cette étudiante en architecture d’intérieur à Paris et ce producteur-imprimeur ont démarché les publicitaires libanais afin de récupérer leurs affiches. Plusieurs ont répondu présents, comme la marque de vêtements pour homme Rectangle Jaune. Lors de la collection 2009, Rectangle Jaune représentait 40 % du Flex récupéré. Waleed et Stéphanie s’adressent également aux imprimeurs. Mais ces derniers ont flairé la bonne affaire : « Certains ont décidé de nous vendre les affiches. Entre 50 et 120 dollars pour les campagnes publicitaires de 14 mètres par 4. Alors que normalement, ils les jettent et n’en font rien », explique Waleed.
Une fois le Flex récupéré et nettoyé, il faut « déconstruire la publicité, explique Stéphanie. La marque ne doit pas apparaître, cela engendrerait trop de complication au niveau des droits ». L’assemblage des morceaux découpés au préalable à l’aide de patrons en verre est réalisé par deux couturiers de Bourj Hammoud. Nazo est l’un d’entre eux. L’an dernier, il a fabriqué quelque 300 modèles. Pour assembler une vingtaine de pièces, trois heures sont nécessaires aux quatre ouvriers de l’atelier. La pièce est facturée entre deux et sept dollars, en fonction du modèle.