Un article du Dossier

La consommation, nouveau moteur des crédits aux particuliers

Y a-t-il un danger pour une banque à développer une offre de crédits à la consommation ?
Les crédits à la consommation au Liban ont un sens large : ils englobent plusieurs catégories de crédit comme les crédits auto, les prêts personnels, les prêts pour achat d’appareils électroménagers, d’ordinateurs, etc. Si l’on excepte les crédits auto, garantis par un gage sur le véhicule, les autres crédits à la consommation sont risqués, car ils ne sont pas sécurisés par une garantie : l’institution financière qui les octroie n’exige pas de gage ou d’hypothèque pour ce type de crédits comme c’est le cas avec des prêts immobiliers ou automobiles.
C’est pour cette raison que les établissements de crédits, qui s’engagent sur ce terrain, “scrutent” soigneusement leurs clients potentiels en utilisant des outils de “scoring”, qui analysent le profil de risque de l’emprunteur. Cette analyse étudie alors autant l’individu lui-même (revenu, situation familiale, actifs, etc.) que, dans la mesure du possible,  vu le secret bancaire au Liban, son historique de crédit.

Quelle est la procédure en cas de non-remboursement d’un prêt ?
Lorsqu’une institution financière ou une banque accepte de prêter de l’argent à un client, elle lui fait signer des billets à ordre, communément appelés traites. Ces traites peuvent, en cas de défaut de paiement de leur signataire, faire l’objet d’une exécution forcée directement auprès du bureau exécutif, présidé par un juge et dont la mission est l’exécution des engagements et des jugements.
L’établissement de crédit demandera alors la saisie des biens de l’emprunteur et éventuellement la saisie d’une partie de ses revenus jusqu’à extinction de la dette. Les frais de justice qui sont avancés par l’établissement de crédit seront finalement supportés par l’emprunteur défaillant. Cette procédure civile est assez rapide, en moyenne quatre à cinq mois, sauf si le client s’y oppose au civil ou au pénal, en alléguant que les traites, objets de l’exécution forcée, sont des faux. Le client espère dans ce cas que cette procédure retarde l’exécution forcée, mais il s’expose, si son action s’avère infondée, à une poursuite de la part de l’établissement de crédit pour dénonciation calomnieuse, abus de procédure et dommages-intérêts.
À la différence des chèques dont l’absence de provision donne le droit au bénéficiaire d’intenter une action pénale contre le tireur avec une sanction pouvant aller jusqu’à trois ans de prison, les traites ne sont pas assorties de sanctions pénales.

Que peuvent faire les ménages s’ils se trouvent en situation de surendettement ?
Il n’existe pas de procédures de surendettement au Liban. Si quelqu’un souhaite s’endetter, aucune limite n’est prévue par la loi. Toutefois, une majorité de banques refusent de prêter au-delà d’un certain niveau d’endettement qui correspond en général à un tiers des revenus du débiteur. Le concept de “faillite personnelle” » – c’est-à-dire le constat judiciaire qu’une personne est devenue incapable de payer ses dettes, ce qui permet d’en suspendre le paiement en attendant une décision du juge – n’existe pas au Liban pour les particuliers. Exception faite des commerçants, et pour ces derniers uniquement dans le cadre d’un défaut de paiement d’une dette commerciale. Dans ce cas, le tribunal constatera la faillite du commerçant et tous ses actifs seront affectés au remboursement de toutes ses dettes au profit des créanciers, qui sont groupés dans une masse.

En France, plusieurs lois renforcent la protection du consommateur. Pensez-vous que le Liban devrait à son tour agir contre le surendettement ?
Outre les lois relatives au surendettement des particuliers en France, les établissements de crédit peuvent même être tenus responsables par les tribunaux si la preuve est faite qu’ils ont encouragé un endettement excessif de leurs clients, tout en étant conscients de l’impossibilité pour ces clients de rembourser leurs dettes !
Il n’est pas sûr qu’une loi spéciale soit nécessaire au Liban. En pratique, les établissements de crédit libanais qui font face à un défaut de paiement tentent le plus souvent de convenir avec leur client d’un rééchelonnement de la dette, ce qui a pour effet d’aboutir à un résultat équivalent du point de vue de la protection du consommateur. Certains vont même jusqu’à effacer une partie des intérêts dus sur le crédit pour mieux aboutir à un arrangement amiable.
Ce qui me semble important en revanche, c’est de permettre la création, par une seule personne, d’un patrimoine commercial ou professionnel qui soit affecté à l’activité de cette personne et qui soit seul exposé aux risques liés à cette activité. En France, le législateur vient de franchir le pas en créant l’entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL). Tel n’est pas le cas au Liban où jusqu’à aujourd’hui la seule façon d’atteindre ce résultat consiste dans la création d’une société ; mais dans la mesure où la société requiert un minimum de trois associés, la personne concernée se voit obligée d’inviter des associés fictifs à faire partie de la société pour arriver au minimum imposé.

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