Les trois premiers “Millénium” s’ingurgitaient d’une traite, addictifs et palpitants. Rien dans le style, et pourtant Stieg Larsson déroule son histoire avec les résultats qu’on sait : 80 millions de lecteurs et un succès planétaire pour son héros, le journaliste Mikael Blomkvist, maître de l’investigation économique. Mais plus encore que ce reporter en quête d’absolu, c’est son autre personnage qui fascine. Cette Lisbeth Salander, hackeuse solitaire, petit génie agoraphobe, qui « n’aimait pas les hommes qui n’aimaient pas les femmes » (euphémisme traduisant souvent son envie de les tuer). Plus de 1 500 pages d’intrigues entremêlées – parfois, il faut l’avouer, totalement absconses – qui ont fini par s’enchevêtrer et laisser le lecteur exsangue à la toute dernière page.
Aussi, lorsque les éditeurs ont annoncé un
4e tome, alors que l’auteur des trois premiers, Stieg Larsson, est mort d’une crise cardiaque il y a quelques années, on n’a guère pu résister. Certes, pour les millions d’inconditionnels de la saga originelle, ce nouvel épisode relève du sacrilège. Écrit par David Lagercrantz, journaliste et écrivain suédois, connu jusque-là pour sa biographie de Zlatan Ibrahimovic, ce “Millénium 4” a hélas du mal à reprendre le flambeau. Un côté ultradocumenté certes, mais une écriture qui pèche par une absence d’intimité dans sa relation aux personnages. C’est peut-être là que le bât blesse : si David Lagercrantz a respecté la trame initiale, il n’a pas su s’approprier ces monstres sacrés, restant à distance respectueuse, comme s’il hésitait à se les accaparer. Pourtant, même un rien édulcorés, on les retrouve avec grand plaisir, espérant que d’ici au tome 5, déjà annoncé, l’auteur aura davantage pris ses aises dans la trame de millénium.